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31 octobre 2007

« L’intégrisme, l’islam et nous » (1/3), une conférence de Dounia Bouzar



Dounia Bouzar
(photo tirée du site http://www.dynamique-diversite.fr/

Introduction :
Dounia Bouzar a présenté une brillante conférence lors de la soirée organisée le 25 octobre dernier à l’Assemblée Nationale par l’association « Paroles de Femmes », auprès de laquelle elle travaille comme consultante. Anthropologue du fait religieux, elle est experte pour l’Union Européenne sur la prévention de l’intégrisme. En janvier 2005, elle a démissionné du Conseil Français du Culte Musulman. Elle a été désignée par le Time Magazine « héroïne européenne » pour son travail novateur sur l’islam et vient d’être nommée Chevalier de l’Ordre des Palmes Académiques. Chargée de recherche à la Protection Judiciaire de la Jeunesse, elle a co-fondé le projet « Dynamique Diversité ».
Avec son aimable autorisation, je publie en trois parties cette conférence, tirée de son dernier ouvrage « L’intégrisme, l’islam et nous, on a tout faux ! » (Editions Plon).


Depuis le 11 septembre, tout le monde croit savoir ce qu’est l’intégrisme.
Il s’est présenté à nous sous forme d’image spectaculaire, revenant en boucle avec un nom : Ben Laden. Et une religion : l’islam.
On s’est concentré sur cette « tête de réseau ». Pourtant, le piège consiste à personnaliser l’intégrisme. Car pendant ce temps, on oublie tous ceux qui l’aident et tous ceux qui l’approuvent. Car pendant ce temps, on oublie d’étudier pourquoi certains l’aident et l’approuvent ... Une solidarité internationale s’est mise en place. Des mesures militaires se sont déployées, sans précédent. Mais attention, la haute technologie ne combat pas l’idéologie. La défaite des terroristes sur le plan militaire ne diminuera pas leur dangerosité.
L’aspect matériel ne doit pas primer sur l’aspect psychologique.
Par quels procédés le discours intégriste arrive-t-il à métamorphoser des êtres humains en véritables machines meurtrières n’importe où et n’importe quand ? En France, comment ces discours font ils autorité ?
Rappelons que religion veut dire « relier ». Comment les intégristes transforment-ils les religions en frontières qui séparent les uns des autres ? Comment font ils pour réduire un message d’amour en conviction de haine ? Comment peut-on être à la fois médecin et intégriste ?

En France, les jeunes qui tombent dedans n’ont pas de lien direct avec les groupuscules politiques du Moyen-Orient.
Impossible dorénavant de les classifier selon des critères traditionnels : plus de zones géographiques définies, pas de revendications nationales construites, pas de courants religieux homogènes, pas de méthodes d’action structurées, pas de combat politique élaboré ... Une seule chose est claire : les intégristes recherchent la toute puissance.
L’intégrisme, c’est avant tout un projet de régénération et d’unification. L’intégrisme, c’est d’abord un processus. Un processus d’extension externe et de purification interne.
J’ai bien dit « purification interne », puisque que les populations musulmanes sont les victimes les plus nombreuses de l’intégrisme ! Et il instrumentalise l’islam pour se faire.

Aujourd’hui, j’espère vous prouver qu’il pourrait utiliser n’importe quelle autre religion, et même une idéologie politique. Des groupuscules veulent anéantir tous ceux qui ne sont pas comme eux en instrumentalisant l’islam. Il faut donc bien partir des réalités.

Mais présenter l’intégrisme comme l’application littérale de l’islam est une erreur grave.
Cette erreur sert l’intégrisme, puisqu’elle fait l’économie des procédés d’endoctrinement.
Cette erreur sert l’intégrisme, puisqu’elle fait l’économie des raisons d’endoctrinement.
Cette erreur sert l’intégrisme, parce que ceux qui veulent respecter la liberté des cultes vont nier ce phénomène.
Cette erreur sert l’intégrisme parce que tous ceux qui considèrent la religion musulmane comme responsable du radicalisme valident ainsi la définition des intégristes ...

D’ailleurs, les ingrédients du discours intégriste ressemblent étrangement à ceux du fascisme (1) :
- un sentiment de crise d’une telle ampleur qu’aucune solution rationnelle ne peut en venir à bout ;
- la seule façon de s’en sortir passe donc par la primauté du groupe. Pour privilégier l’exaltation, on coupe les musulmans de leurs cultures, on développe le sentiment d’appartenance à une communauté plus pure, ce qui permet de justifier n’importe quelle action contre les ennemis internes ou contre les ennemis externes ;
- puis on fortifie ce groupe purifié, en désignant un bouc émissaire.
On déplace ainsi l’agressivité sur l’extérieur. Les adeptes doivent considérer « les autres » comme un tout négatif afin de se percevoir comme un tout positif. L’estime de soi se nourrit du mépris de l’autre : les Occidentaux en général, les Juifs en particulier...
On dit qu’ils ont concocté un plan pour maintenir les musulmans en position de dominés ... Le discours intégriste a besoin de la haine à l’égard de l’Occident car il y trouve sa justification.
- ensuite, on prétend que la destinée historique du groupe dépend de l’instinct d’un chef sauveur, un héros, toujours masculin, qui détient la vérité, qui est supérieur à toute raison rationnelle ;
- enfin, on assure que si le groupe est en danger, c’est que « les autres » ont compris qu’il détient la vérité. Puisque le groupe détient la vérité, il est en droit de dominer les autres pour « sauver le monde » .

Et bien-sûr, tous les moyens seront bons.

Il ne s’agit pas de se soumettre à une religion mais de s’approprier l’autorité de cette religion en son nom propre pour s’ériger soi-même en autorité au-dessus de tous les autres hommes.
Il n’est donc pas question de Dieu dans ce processus. Les intégristes n’ont que faire de Dieu. Ce qu’ils veulent, c’est prendre la place de Dieu !

Dounia Bouzar
(1) : Robert O. Paxton , Le fascisme en action (The anatomy of fascism) , le Seuil, Trad. de William Olivier Desmond, en coll. avec l’auteur.

29 octobre 2007

Quand l’Afghanistan sortira de la nuit … Gérard Cardonne sera mon invité le 4 novembre

Nous parlerons dimanche prochain de l’Afghanistan. C’est un pays musulman que je n’avais pas encore traité, et pourtant il fait la une de l’actualité depuis plusieurs années. J’ai eu la chance, dernièrement, de faire la connaissance d’une personnalité qui le connaît parfaitement, Gérard Cardonne. Gérard Cardonne est un écrivain engagé, qui a déjà publié une vingtaine d’ouvrages, les premiers étaient consacrés à son Alsace natale qui lui est tellement chère. Mais ses derniers livres ont évoqué ensuite les drames qui ont ensanglanté le Monde au cours des dernières années, d’abord la Bosnie, puis l’Algérie ; et il y a un fil conducteur qui les relie car ils ont presque tous été consacrés à un combat, celui des femmes qui, en terre d’islam, sont souvent opprimées, victimes de préjugés machistes au nom de la religion. C’est ainsi qu’il a écrit « La sultane debout », consacré à la lutte des femmes algériennes contre l’obscurantisme, et il vient de publier « Selma, une femme libre », qui est un éloge de l’émancipation des Tunisiennes.

Mais surtout, et cela nous ramène à notre sujet de notre émission du 4 novembre, Gérard Cardonne a écrit un livre qui est sorti pratiquement au lendemain du 11 septembre et qui a eu un immense succès, « La nuit afghane » (Editions Hirlé). Rappelons rapidement le contexte : l’Afghanistan était alors dirigé par les horribles Talibans depuis cinq ans ; un silence de plomb régnait dans nos médias à propos du régime de Kaboul, sans doutes le plus répressif de tous les régimes islamistes ; et contre ce régime, un homme, le commandant Ahmad Shah Massoud combattait, à la tête d’une guérilla dans les montagnes du Panshir. Et puis, l’histoire s’est accélérée comme tout le monde le sait, il y a eu d’abord l’assassinat de Massoud par Al-Qaïda ; puis le 11 septembre, organisé par Ben Laden qui était hébergé par les Talibans ; l’intervention américaine, la libération de Kaboul ; et depuis, hélas, la guerre n’est pas fini, les forces de l’OTAN sont confrontés à un terrorisme redoutable, et on peut se demander quand l’Afghanistan « sortira de la nuit », pour reprendre le titre de son livre. Alors j’évoquerai avec Gérard Cardonne son roman en première partie d’émission, mais comme les faits qu’il relate datent déjà de plusieurs années, nous évoquerons en deuxième partie ensemble ce qui se passe là-bas, dans ce pays où il retourne souvent. Et beaucoup de questions se posent !
- Aujourd’hui après le changement de régime, les témoins disent que les femmes afghanes portent toujours l’horrible burqa (voir couverture du livre), alors on se demande quand seront-elles vraiment émancipées ?
- Dans l’introduction qu’il avait écrit pour ce livre, le commandant Massoud disait notamment « un islam modéré reconnaît la liberté individuelle pour l’homme et pour la femme » : comment concevait-il cet « islam modéré » ?
- Que penser de l’appel du 9 septembre dernier du Président Hamid Karzaï, où il a dit qu’il était prêt à accepter des Talibans au gouvernement et à rencontrer le mollah Omar ?
- Que penser des récents succès des Talibans ? Est-ce que la population les soutient localement parce que les gens ont oublié ce qu’était le régime islamiste ? Ou bien est-ce qu’il y a aussi un ressentiment nationaliste envers les Occidentaux à cause de la présence des troupes étrangères, ou parce que les Afghans ont été déçus de ne pas voir arriver l’argent promis ?

Je vous recommande enfin de visiter le site de Gérard Cardonne, où vous pourrez découvrir ses témoignages et actions sur le terrain en Afghanistan :

26 octobre 2007

Belly dancing


La période austère des fêtes juives de la rentrée est déjà terminée depuis un moment, on peut donc se "lâcher" un peu ...

... et je me permets de publier sur le blog cette photo, prise à l'occasion de l'anniversaire d'un cousin. Un cliché assez flou pour que l'on ne puisse reconnaitre ni les invités, ni la danseuse du ventre, une des principales animations de la fête !

Car c'est ainsi : 30 ans, 40 ans après avoir quitté notre Orient natal, nous, les "Tunes", conservons assez de nostalgie pour prévoir un peu de musique arabe à chaque fête. Et même si l'actualité n'est pas riante, quelques déhanchements osés sur des ritournelles entrainantes font régulièrement oublier le "vrai monde" - celui qu'aurait mystérieusement survolé la danseuse, maquillée et arnachée comme une princesse des mille et une nuits venue sur son tapis magique nous faire rêver de "la-bas" ...

Vous chantiez ? Allez, dansez maintenant !

J.C

25 octobre 2007

La Turquie, l'Irak et les Kurdes : quelques rappels d'André Nahum, à l'heure d'une très grave crise régionale

Bonjour.

Comme si les États-Unis n'avaient pas assez de problèmes en Irak, voilà que se profile maintenant la possibilité d'une attaque d'envergure de l'armée turque sur le Nord du pays afin de chasser les combattants du PKK de leur sanctuaire.
Dimanche dernier, les rebelles kurdes avaient monté une embuscade qui s'est soldée par la mort de 15 soldats turcs et la capture de huit autres. C'est plus qu'il n'en fallait pour exacerber le ressentiment de l'armée et du peuple turcs qui réclament maintenant une intervention énergique.
On comprend l'embarras du gouvernement de Bagdad sur lequel Ankara exerce sa pression, ainsi que sur les États-Unis, pour qu'ils mettent un terme à l'activité du PKK dans le Turkestan irakien et que ses combattants soient expulsés. Situation difficile quand on sait que cette région jouit d'une très large autonomie, qu’elle est la seule qui reste relativement calme et que le Président de l’État irakien est lui-même kurde.
Le gouvernement irakien ne peut pas se payer le luxe d'une crise avec la Turquie, d'un nouveau conflit et d'un nouveau front.Les USA ne peuvent se permettre de se brouiller avec leurs alliés turcs qui sont membres de l'OTAN, et l'un des très rares pays à majorité musulmane à se proclamer laïc malgré la prépondérance croissante des fondamentalistes, et qui ont très mal vécu un vote du Congrès américain appelant à reconnaître le génocide arménien.
Mais qui est ce PKK et que représente-t-il ?
Souvenons nous que le peuple kurde qui vivait groupé jusqu'au17ème siècle à l'intérieur de l'Empire Ottoman est écartelé depuis les années 1920 entre la Turquie, l'Iran, l'Irak et la Syrie. Après la première guerre mondiale les Français et les Britanniques ont dépecé l'empire turc vaincu et remodelé la carte du Moyen-Orient ; MM Sykes et Picot qui ont dessiné les frontières des nouveaux États, aveuglés par les problèmes de pétrole, par leurs intérêts nationaux et la nécessité de récompenser les cheikhs arabes qui les avaient soutenu pendant la guerre et auxquels il fallait donner des trônes, ont complètement occulté les droits des Kurdes. Dans les années vingt, on a créé de toutes pièces un État irakien en réunissant artificiellement des populations et des provinces qui n'avaient rien de commun entre elles sinon leur appartenance à l'islam et la richesse de leur sous-sol en hydrocarbures, et le seul peuple qui aurait dû bénéficier d'un État cohérent n'a pas été entendu.
Après la chute de Saddam Hussein, qui les avait asservis et souvent massacrés, les Kurdes d'Irak ont gagné avec l'aide des Américains une quasi-indépendance à l'intérieur de l’État irakien, ce qui ne peut qu'attiser les rancœurs et les envies de leurs frères de Turquie, d'Iran et de Syrie. En Turquie, ils sont 20 millions environ le quart de la population. Bien qu'ils aient actuellement 20 députés au parlement groupés sous la bannière du DTP, leur organisation politique, ils ne bénéficient nullement des droits des minorités, de la reconnaissance de leur personnalité au sein de la nation et de leur langue, le kumaci. Le PKK fondé en 1978 par Abdullah Oçalan, aujourd'hui emprisonné à vie après avoir été condamné à la peine de mort, est passé à l'action violente multipliant les attentats et les embuscades.
Sous les pressions américaines et irakiennes, il vient de proclamer qu'il est prêt aujourd'hui à un arrêt des hostilités. Une offre que le gouvernement turc a rejeté. L'essentiel pour lui, s'il ne veut pas perdre la face est dans l'immédiat la récupération de ses huit captifs.
L'Administration américaine a tout intérêt de calmer la situation, obtenir par la négociation le retour des soldats turcs retenus par le PKK, et un retour au calme sur la frontière. Elle s'y emploie certainement. Mais même si elle y arrive, cela ne résoudra pas le problème de fond, remis à l'ordre du jour par l'émergence en Irak d'une entité kurde quasi-indépendante. Il ne peut être résolu que par une négociation nationale, en Turquie même et internationale.

André Nahum
Judaïques FM, le 24 octobre 2007

24 octobre 2007

Sarkozy sur Israël : des paroles courageuses, et attendues depuis si longtemps !

Nicolas Sarkozy et Ehud Olmert,
Paris le 22 octobre 2007 (photo Reuters)

Vous l'avez déjà entendu ou lu, dans la presse ou sur le Web : le voyage du Premier Ministre israélien à Paris a été un franc succès - comme à Londres d'ailleurs le lendemain. Face à la menace de plus en plus angoissante d'un Iran dirigé par des fanatiques et devenant demain une puissance nucléaire, les grandes démocraties occidentales se serrent les coudes ! Le Président français avait posé le problème en des termes très nets lors de sa conférence de presse du 27 août dernier, en disant qu'il fallait éviter "le choix catastrophique entre une bombe iranienne et le bombardement de l'Iran". La seule manière de l'éviter, soutenue d'ailleurs à la fois par les États-Unis et Israël - directement menacé dans son existence -, ce sont de vrais sanctions pour acculer le régime des Mollahs. Nous ne savons pas ce que se sont dits exactement Olmert et Sarkozy au palais de l’Élysée lundi dernier ; mais le premier semblait fort satisfait de ce qu'il avait entendu, et d'ailleurs Ehud Olmert a évoqué ensuite cette campagne d'isolement de l'Iran, soutenue au sein de l'Union Européenne par la France et par le Royaume-Uni, et qui pourra être poursuivie - sauf veto de la Russie et de la Chine - au Conseil de Sécurité de l'ONU.

Mais c'est à propos du droit à l'existence et à la sécurité que Nicolas Sarkozy a tenu les propos les plus nets et les plus réconfortants. Extraits choisis, d'abord pour la sympathie qu'ils expriment vis à vis de l'état juif :
"L'établissement d'Israël a été un miracle, et l'évènement le plus significatif du 20ème siècle".
"On dit que je soutiens Israël parce que mon grand-père était juif, mais ce n'est pas une affaire personnelle (...) Israël a introduit la diversité et la démocratie au Moyen-Orient. C'est un miracle qu'un tel État soit né à partir des restes dispersés du peuple juif".
"La sécurité d'Israël est une ligne rouge claire, qui ne doit pas faire l'objet de négociations (...) C'est une condition inviolable, sur laquelle nous ne reculerons jamais".

Tous ces propos, dont je vous donne la traduction, proviennent d'une version rapportée par Aluf Ben sur le site du "Haaretz" , dont vous pourrez lire en lien le texte (en anglais).

Mais le plus important, à mon avis, dans les propos de Sarkozy - et en cela il tranche nettement sur la lâcheté et la frilosité, non seulement de son prédécesseur à l’Élysée, mais aussi des classes, à la fois politique et médiatique, française et européenne - c'est ce qu'il a dit sur la question cruciale des négociations à venir, celle qui a empêché tout règlement du problème palestinien en raison du refus obstiné d'Arafat - et hélas, semble-t-il aussi, de la direction même "modérée" qui gouverne actuellement à Ramallah : non, les "réfugiés palestiniens" (comprendre : les quatre millions d'enfants et petits enfants de ceux qui ont fui Israël en 1948) ne peuvent "retourner" dans ce pays, car cela équivaudrait à un suicide démographique pour l'état juif.

Écoutons à nouveau le Président français :
"Chaque côté doit avoir son propre "État nation" (...) Il n'est pas raisonnable pour les Palestiniens de demander à la fois un Etat indépendant, et aussi le retour des réfugiés dans l’État d'Israël, qui a aujourd'hui déjà une minorité de un million d'Arabes".

Voilà, c'est bref et en même temps fondamental : et si toutes les puissances du "Quartette" parlent aussi clairement, le conflit pourra se résoudre enfin, car les Palestiniens comprendront qu'ils doivent soit accepter un compromis, soit continuer une guerre de cent ans ... Tellement fondamental que l'article du "Haaretz" est intitulé ainsi : "Sarkozy au Premier Ministre : les réfugiés palestiniens ne doivent pas retourner en Israël".
Et bien ... Pensez-vous que la presse nationale (ou nos radios, ou nos télévisions) aient repris une info aussi fondamentale ? ... Bien sûr que non, hélas, alors qu'il s'agit d'une petite révolution pour le Quai d'Orsay !
Pour sourire un peu, lisez plutôt ce que rapporte le "Figaro", pourtant peu suspect d'antipathie vis à vis d'Israël ... sans commentaires !
"Hier à l'Élysée, Nicolas Sarkozy et Ehoud Olmert ont également fait le point sur la préparation de la conférence envisagée fin novembre ou début décembre à Annapolis, dans le Maryland, sur le processus de paix israélo-palestinien. Pour le premier ministre israélien, la rencontre ne doit pas entrer dans les détails de la négociation mais en fixer le cadre général. Selon l'Élysée, Nicolas Sarkozy a rappelé le souhait de la France que des discussions s'engagent entre les parties sur le statut final d'un État palestinien, mais aussi sur le droit au retour des réfugiés palestiniens, la question de Jérusalem et la sécurité."


J.C

22 octobre 2007

Ann Coulter, ou « les ennemis de nos ennemis ne sont pas forcément nos amis »



Je voudrais dédier cet article aux (hélas nombreux) blogs ou sites, juifs communautaires ou simplement sympathisants d’Israël, qui n’hésitent pas à mettre en liens d’autres sites que l’on pourrait clairement cataloguer comme racistes - pour parler clairement : anti-musulmans (c'est-à-dire s’attaquant à des êtres humains, hommes ou femmes, pour ce qu’ils seraient en raison de leurs croyances, et non pour ce qu’ils feraient ou pour ce que feraient une minorité d’entre eux). La « ligne jaune » entre le « parler vrai » - contre un « politiquement correct » insupportable, hurlant à « l’islamophobie » à chaque fois que sont énoncées des réalités souvent observées en terre d’islam, comme l’absence de liberté individuelle, ou la mise à l’écart des femmes -, et un vrai discours de haine - considérant comme inévitable une guerre de religions, avec bien sûr en ligne de mire l’élimination de « ceux d’en face » - peut sembler subtile, il faut le reconnaître. Quitte à me répéter, j’essaye en tout cas de la garder toujours à l’esprit, en écrivant sur ce blog ou en menant mes interviews à la radio. Et, à force de lectures et d’expérience, je pense arriver à la respecter.

Il y a, en la matière, plusieurs tests faciles à mener pour débusquer les vrais racistes :
- Ceux qui, sous couvert de critiquer l’islam en tant que religion, concentrent leurs attaques sur une seule cible, sont-ils prêts à voir leur propre foi soumise à la même analyse critique (voir « Charlie Hebdo » en tant que modèle en la matière, qui n’a pas été condamné dans l’affaire des « caricatures de Mahomet » en raison de cette ligne claire) ?
- Ceux qui dénoncent, à juste titre, l’islamisme (que l’on peut appeler également « islam politique » ou plus durement « islamo-fascisme » comme Bernard-Henri Lévy dans son dernier livre (1)), sont-ils d’accord pour promouvoir un « islam apolitique », bref à promouvoir en terre d’islam la même laïcité que celle qui s’est imposée, chez nous, au fil des siècles ? Le pessimisme, qui est curieusement toujours énoncé lorsque l’on évoque un tel chantier, traduit, en réalité, un mépris raciste.
- Et enfin (et il est étonnant que tant de Juifs se laissent attraper dans un tel piège), ceux qui font de la « lutte anti-islam » l’alpha et l’oméga de leur engagement, peuvent-ils tolérer des religions non chrétiennes en Occident ? La lecture des blogs d’extrême droite qui (hélas !) pullulent en toute impunité malgré leur racisme évident, devrait pourtant conduire à comprendre l’évidence : oui, on peut être à la fois raciste et antisémite - les termes « islamistes » et « sionistes » servant toujours de paravents ... Et les ennemis (intégristes chrétiens par exemple) de nos ennemis (les supporters du Djihad international) ne sont pas forcément nos amis !

Et j’en viens donc à vous parler de la jeune et jolie Ann Coulter, figure de proue de l’aile ultra conservatrice du Parti Républicain aux États-Unis, et régulièrement invitée sur les plateaux de télévision où elle est connue pour ses propos tranchants et agressifs : on l’a même surnommée la « Michaël Moore » des Républicains (et dans mon esprit, ce n’est pas un compliment, car le gros Moore, adulé en France, a fortement contribué à rendre ici Ben Laden relativement sympathique !).
On lira en lien sur l’encyclopédie Wikipedia la page qui lui est consacrée.
J’en reproduis quelques citations qui vous donneront une idée du personnage.

Sur le Moyen-Orient, au lendemain des attentats du 11 septembre 2001 :
"Nous devons envahir les pays musulmans, tuer leurs chefs et les convertir au christianisme." (..) "Nous devons demander à voir les passeports, y compris sur les vols intérieurs, et fouiller n'importe quel individu masculin suspect à la peau basanée." (citation rapportée par Silvia Grilli pour le magazine "Panorama", traduite et publiée dans le numéro 628 de Courrier international du 14 novembre 2002)

"Ça vaudrait tellement mieux pour le pays si les femmes ne votaient pas. En fait, à chaque élection présidentielle depuis 1950, excepté Barry Goldwater en 1964, les Républicains auraient gagné si seuls les hommes avaient voté." - 17 mai 2003.
Sur Bill Clinton :
"Si vous ne détestez pas Bill Clinton et les gens qui travaillent à le maintenir au pouvoir, c'est que vous n'aimez pas votre pays" - Juillet 1999


Maintenant à propos des Juifs, je voudrais vous faire connaître un incident récent vécu en direct sur un plateau de télévision, en espérant que cela contribuera à ouvrir un peu les yeux des quelques excités irresponsables évoqués plus haut ... On se reportera en lien à l’article publié par Bradley Burston sur le site du « Haaretz », le 16 octobre dernier.
Ann Coulter était donc récemment l’invitée de l’émission « The Big Idea » sur la chaîne CNBC, et le journaliste qui l’interrogeait était un Juif, Donny Deutsch.
Elle commença par évoquer la grande convention nationale du Parti Républicain à New York, en 2004, en disant : « Les gens étaient heureux, tolérants. Ils sont chrétiens, ils défendent l’Amérique ».
Donny Deutsch, interloqué :« Vous voulez dire qu’il vaut mieux que nous soyons tous chrétiens ? »
Réponse d’Ann Coulter : « Oui »
Et elle avança comme argument que cela permettrait un « chemin plus rapide vers Dieu »
Le journaliste lui fit alors remarquer que cela lui rappelait la position d’Ahmadinejad, qui voudrait rayer Israël de la surface de la Terre.
Et l’autre, sans ciller : « Non. Je veux seulement dire que nous voulons améliorer les Juifs »

Voilà. Je crois qu’il n’y a pas grand-chose à ajouter : si vous entendez quelqu’un qui rêve tout haut de convertir tous les Musulmans, demandez-vous ce qu’il envisage aussi pour les Juifs !

J.C


(1) « Ce grand cadavre à la renverse », Editions Grasset

21 octobre 2007

Toujours mieux référencé sur la Toile (re-suite)

L’audimat de « rencontrejudaiquesfm »s’est consolidé au cours de l’été, après deux reflux attendus (l’après-élections présidentielles, qui avaient vu deux records absolus en avril et mai, puis le mois d’août, période de congés à la fois pour le blog et pour beaucoup d’internautes). Mais septembre a vu, en termes de visites (3.553), le troisième meilleur chiffre enregistré depuis que l’audimat est enregistré sur « sitemeter ».

La très grande majorité des visites vient toujours de recherches en direct sur Google ou autres moteurs, mais beaucoup sont initiées par des liens figurant sur d’autres blogs ou sites : ainsi comme on peut le lire sur le moteur technorati, ce blog continue, lentement mais sûrement, de s'affirmer en termes de référencement.

Les liens nouveaux sont parfois sympathiques, parfois beaucoup moins ...

Ainsi, les articles ou activités en relation avec la Tunisie n’ont pas échappés aux sites associés à des médias de ce pays, le blog étant cité :
- sur le site de "Tunis Hebdo"
- sur le moteur "Tunisia watch".

Hélas, hélas, on peut aussi découvrir de drôles d’internautes, ainsi des vrais nazis « tchatant » joyeusement sur des sites hébergés dans des pays où les pires horreurs peuvent être publiées sans soucis ... l’adresse « stormfront.org », agrémentée d’une croix celtique, appartient visiblement à cette catégorie !
En allant sur cette page d’un forum en langue française, vous pourrez apprécier le haut niveau de réflexion de ces ordures racistes : un participant relève dans l’actualité du jour 4 noms juifs et une Musulmane (Rachida Dati), étant bien entendu que le grand-père converti au christianisme de Sarkozy ou les parents également convertis de Fabius suffisent à les « enjuiver » ... Mais comme j’avais publié sur le blog un extrait d’interview de la Garde des Sceaux exprimant sa proximité avec les Juifs, cela suffit à des débiles pour y trouver une preuve supplémentaire du fameux complot !

Mes excellents confrères de « diasporablogj » (voir en « links » permanent) ont parlé, non pas du blog mais de mon émission, c'est sur ce lien. Et cela en des termes peut-être trop flatteurs, puisqu’il est écrit que ma série « est la seule, sur l'ensemble de la fréquence juive, à apporter un peu d'air frais et de convivialité sur ce média communautaire dangereusement « ghettoïsé », replié sur lui-même. » Cela correspond sans doutes au volet « dialogue interconfessionnel » de « Rencontre », qui a du être la seule émission de la fréquence juive à recevoir plus d’une soixantaine d’invités de foi ou de culture musulmane. Là-dessus, l’actualité - souvent sinistre - m’a aussi souvent amené à recevoir des experts non musulmans pour éclairer nos auditeurs sur ce qui se passe « dans l’Orient compliqué » !

Enfin, on pourra lire sur le site "cyberacteurs" (consacré aux actions militantes relayées sur la Toile), le communiqué de l’association Bulgaria-France remerciant les différentes personnes et associations ayant mené campagne pour la libération des infirmières bulgares : mon blog et l’émission « Rencontre » ont été cités, et j’en suis très fier !


J.C

19 octobre 2007

Benazir Bhutto, ou l'espérance fragile

Retour triomphal de Benazir Bhutto à Karachi
(photo Associated Press, 18 octobre 2007)


Il y a des jours où on a le moral dans les chaussettes en raison de l’actualité. Rarement joyeuse, celle du monde musulman (qui constitue le plat de résistance de mon émission et du blog), était particulièrement sinistre cette semaine. Jugez-en plutôt :
- entre Israéliens et Palestiniens, et malgré les navettes et le séjour prolongé de la Secrétaire d’État Condoleeza Rice, impossible de se mettre d’accord sur au moins le cadre global de futures accords - avec le risque de faire capoter la conférence internationale programmée à Annapolis à la fin de l’année ;
- à propos de l’Iran, on a la très désagréable impression qu’une véritable alliance s’est nouée et se renforce avec la Russie néo-impériale de Poutine - qui vient d’honorer le nabot antisémite et négationniste de Téhéran de la première visite officielle d’un dirigeant du Kremlin depuis plus de soixante ans. Le déplacement impromptu jeudi 18 octobre du Premier Ministre israélien Olmert à Moscou, avant un déplacement à Paris et Londres - tandis que sa Ministre des Affaires Etrangères s’apprête à partir à Pékin - semblent autant d’efforts désespérés pour déplacer une muraille ; la communauté internationale n’est pas unie pour imposer des sanctions à la République Islamique : et ce sera bientôt « le choix des armes », pour reprendre le titre d’un livre de François Heisbourg que je viens de terminer et qui sera le thème d’une prochaine émission !

Au milieu donc de ce tumulte et sous les noirs nuages qui s’amoncellent (Georges W. Bush à même évoqué « une troisième Guerre Mondiale » si l’Iran devenait une puissance nucléaire), un sourire était venu apporter un peu de fraîcheur à une actualité qui en a bien besoin : celui de Benazir Bhutto, ex-Premier Ministre du Pakistan, qui vient de rentrer au pays après huit ans d’exil : accueillie comme une diva par des dizaines de milliers de partisans venus l’attendre à l’aéroport de Karachi, elle arrive dans un pays presque au bord de la guerre civile depuis l’assaut donné il y a quelques mois contre la fameuse « Mosquée rouge » d’Islamabad, le quartier général islamiste qui défiait le pouvoir des militaires et du Président Musharraf ; islamistes qui - avec Al-Qaïda - ont menacé de mort Benazir Bhutto, rentrée quand même de son exil de Dubaï, bravant le danger ...
Un danger hélas plus que réel, car son cortège a été visé immédiatement par deux attentats-suicide particulièrement meurtriers : 126 morts, des centaines de blessés - hélas, les "nazislamistes" tiennent toujours leurs promesses, et on peut craindre que cette terreur ne soit qu'un début.

Mais revenons à Benazir Bhutto, et au contexte politique. Hier bannie par les militaires qui avaient renversé le gouvernement civil, elle devrait s’allier (pour combien de temps ?) avec son ex-ennemi pour faire face, ensemble, à la vague intégriste qui gangrène le pays. Je vous renvoie à cette page de l'encyclopédie Wikipedia (hélas disponible seulement en anglais) pour en savoir plus sur cette jeune (54 ans) et jolie femme d’État. Aura-t-elle une destinée plus heureuse que son père, Ali Bhutto, qui finit à la potence ? Bien sûr, et comme sa biographie vous l’apprendra, elle n’a pas eu une carrière sans tache : sous son gouvernement (en 1996), les Talibans puissamment soutenus par le Pakistan prirent le pouvoir à Kaboul ; et elle et son mari sont compromis dans de lourdes affaires de corruption !

Mais, et malgré cela, son retour aux affaires me semble un évènement heureux pour plusieurs raisons :
- c’est une claque à la figure des islamistes de tous poils qui veulent enfermer les femmes derrières une burka ou un nikab ; c'est aussi (et hélas on vient de le voir), un défi courageux au terrorisme d'Al-Qaïda qui n'hésite pas à massacrer des milliers d'innocents pour imposer son "agenda" politique ;
- c’est une revanche pour la minorité chiite opprimée dont elle est issue, et donc un gage pour la démocratie pakistanaise ;
- enfin, son retour met fin au face à face sans issue entre militaires et intégristes - une plaie hélas récurrente dans tout le monde musulman !

J.C

18 octobre 2007

Wafa Sultan : depuis l'affaire des caricatures, une brèche s'est ouverte pour les Musulmans

J'avais publié l'année dernière un lien, pour suivre la fameuse intervention de Wafa Sultan sur Al Jazeera, intervention qui a été vue sur différents sites par plus d'un million d'internautes ! Cette femme, docteur en psychologie d'origine syrienne réfugiée aux Etats Unis, n'allait pas avec le dos de la cuiller pour désigner ce qu'on appelle ici pudiquement "conflit de civilisation", en disant que c'était en réalité le choc de la civilisation contre la barbarie (retrouver l'article par le libellé "Wafa Sultan").

Elle a été interviewée par une chaîne de télévision du Danemark, pays qui a été dans "l’œil du cyclone" en raison des caricatures de Mahomet publiées dans un journal local. Voici la retranscription vidéo de ces neuf minutes de passage, neuf minutes d'impressionnante conviction en langue anglaise - heureusement avec sous titres en français. Elle parle de ses ex-compatriotes qui vivent dans des société fermées, et qui ont besoin d'un regard extérieur pour remettre en cause leur manière de penser ; elle dit que, de ce point de vue, l'affaire des caricatures de Mahomet a pu jouer un rôle positif ; elle évoque, sans s'en émouvoir, les menaces de mort qu'elle reçoit quotidiennement en disant que son engagement donne un sens à sa vie, et qu'elle accepte les risques; elle donne enfin un point de vue très pessimiste sur l'islam, en disant que - à son avis - ce n'est pas une religion ordinaire mais aussi un projet politique, qui n'accepte aucun compromis : en conséquence, elle ne croit pas à la réforme de l'islam, mais à sa profonde transformation, de manière à séparer le politique du religieux.

J.C

Wafa Sultan - ITV
envoyé par OrientExpress

15 octobre 2007

Richard Prasquier, Président du CRIF, sera mon invité le 21 octobre

Comme je vous l’avais déjà annoncé (lire ici), j’ai déjà pré enregistré mon interview avec le nouveau Président du CRIF, Richard Prasquier. Et cela a été un grand honneur d’avoir comme invité une personnalité éminente de notre Communauté, comme lui.
 Notre série, « Rencontre » est consacrée au monde musulman, et d’ordinaire nous recevons soit des musulmans - et l'émission est une passerelle inter religieuse sur la bande FM -, soit des experts du sujet. Mais, même si le Monde musulman n’est pas son domaine principal de réflexion, Richard Prasquier sait combien chaque évènement, où qu’il se produise, risque d’avoir un impact sur une autre latitude. Comme principal responsable de la communauté juive de France, il connaît parfaitement les rouages de haine qui, au travers des télévisions satellitaires, de certains sites Internet ou des prêches antisémites dans certains quartiers ou certaines mosquées, se sont traduits et se traduiront par des violences.

Parmi les questions abordées lors de notre entretien :

- Où en sont les recommandations du rapport de Jean-Christophe Ruffin sur l’antisémitisme, et juge-t-il utile de poursuivre en justice les propagandistes d’un antisionisme radical ?
- Est-ce que les agressions physiques récentes, en dehors d’une actualité brûlante au Proche Orient, ne démontrent pas que l’on a affaire maintenant à un antisémitisme indéracinable chez une partie de la jeunesse d’origine maghrébine ou africaine ?
- Peut-on craindre une dérive « à la britannique » pour la situation des Juifs en France, avec comme au Royaume Uni une communauté musulmane beaucoup plus radicalisée que chez nous, et des associations poussant au boycott d’Israël ?
- A-t-il de nouvelles idées pour relancer le dialogue judéo musulman, et est-il conscient du fait qu’une large partie de la communauté juive manifeste beaucoup de réserves face à ces initiatives ?
- Comment expliquer les démarches récentes du CRIF, qui a été reçu par plusieurs ambassadeurs de pays arabes et musulmans ?

J.C

14 octobre 2007

Roquettes du Hamas : menaces sur le Néguev

"Exposition" de roquettes Qassam,
kibboutz Yad Mordechaï, mai 2003
(photo Jean Corcos)

D’abord quelques mots à propos de cette photo. Ce n’est pas tous les jours que, loin du studio de Judaïques FM et des mes interviews, certes passionnantes mais loin du terrain, j’ai pu me sentir (un peu) l’âme d’un reporter dans un pays en guerre ... Envoyé donc par ma radio en mai 2003 pour accompagner une mission d’amitié de l’AUJF, du CRIF et du FSJU en Israël, nous avons été très près de la frontière de la bande de Gaza - qui, à l’époque, n’avait pas été encore complètement évacuée. Mais déjà (rappel utile pour les critiques oublieux de ces faits), les Palestiniens du Jihad islamiste comme du Hamas avaient commencé à bombarder la frontière Sud du pays, leurs tirs se concentrant sur la petite ville de Sderot et les kibboutzim voisins. Et déjà à l’époque, donc, l’armée israélienne n’avait pas trouvé de parade à ce genre d’attaques.

Cette photo a été prise au kibboutz Yad Mordechaï, où on nous avait présenté une collection des projectiles reçus. On remarquera la modestie des débuts artisanaux de l’industrie de guerre « made in Gaza » : à gauche, de simples petits obus de mortiers ; la pièce de droite, en revanche, pouvait largement tuer, et du reste beaucoup d’Israéliens ont été tués et des dizaines blessés au fil des tirs terroristes visant délibérément des civils. En cliquant sur le libellé « Sderot » ci-dessous, on trouvera quelques échos publiés sur le blog à propos de cette guerre de basse intensité subie par les localités frontalières de la bande de Gaza, et qui fait rarement la « une » de nos médias.

Mais voici que la menace s’aggrave - et là, quels que soient les rappels historiques comme celui fait au début, et les excellentes raisons, militaires ou politiques qui expliquent le refus du gouvernement israélien de renvoyer l’armée occuper Gaza à nouveau, force est de constater deux choses :
- le Hamas, qui a pris complètement le contrôle du territoire au mois de juin dernier, a décidé l’affrontement et cela ne pourra qu’empirer ;
- l’abandon par Tsahal de la fameuse « route de Philadelphie » (qui bordait la frontière entre Égypte et la bande de Gaza), a fait exploser les trafics d’armes par les tunnels de contrebande.
Résultat, les islamistes possèdent maintenant des armes beaucoup plus sophistiquées que celles photographiées il y a quatre ans ... et c’est ainsi qu’un missile de type « Grad » a atterri dans un champ près de la ville de Netivot, dimanche dernier 7 octobre ! Je reproduis ci-dessous le communiqué publié sur le site de l’ambassade d’Israël à Paris, qui résume bien la gravité de la situation.

« Le dimanche 7 octobre, des terroristes de la bande de Gaza ont tiré un missile de type Grad qui a explosé près de la ville israélienne de Netivot, à 15 km à l’intérieur du territoire israélien. Ces roquettes de longue portée (25 km), produites en ex-URSS, sont une version améliorée des roquettes Katioucha, celles-là même qui ont été tirées par le Hezbollah sur Israël à l’été 2006. Le même jour, 8 obus de mortier ont explosé dans le kibboutz Keren Shalom, proche de la bande de Gaza, et 3 roquettes Qassam ont également été tirées depuis le nord de la bande de Gaza.
L’utilisation de missiles Grad représente une escalade dans la campagne terroriste menée par les organisations de la bande de Gaza, à la fois à cause de la portée plus grande de ces missiles et de leur force destructrice plus importante.
(...)
Depuis le désengagement israélien de la bande de Gaza il y a plus de 2 ans, Israël n’a récolté que plus d’attaques : plus de 2000 roquettes et des centaines d’obus de mortier ont explosé en Israël (une grande partie des roquettes et obus tirés retombant du reste en territoire palestinien), faisant 14 morts et des centaines de blessés, sans compter le traumatisme d’une population civile bombardée presque tous les jours depuis 2 ans. »



J.C

11 octobre 2007

100.000 pages !

Une information qui fait plaisir, en passant ... Mon compteur « sitemeter » a dépassé le cap des 100.000 pages, et cela s’est passé aujourd'hui, 11 octobre. Un bonne nouvelle ne venant jamais seule, ce "post" est le 600ème publié sur le blog : vous avez donc déjà des dizaines d'heures de lecture, en naviguant sur les "libellés" ou les archives !

Trois petits rappels :
- comme déjà dit et redit, il s’agit d’un cap symbolique, défini à 2-3 % près car il m'est impossible de quantifier précisément mes propres entrées sur le site ;
- par rapport au nombre de visiteurs, le ratio (assez stable) est de 1,6, ce qui traduit une assez bonne curiosité en moyenne (du moins si je compare à d’autres blogs dont les statistiques de « sitemeter » sont en lecture libre).
- le cap des 20.000 pages avait été atteint en juin 2006 (lire ici), soit au bout d’à peu près 16 mois d’existence du blog ; après environ la même durée, 80.000 pages supplémentaires ont été ouvertes ... ce qui en moyenne glissante correspond à un quadruplement de l’intérêt !


J.C

Le blog de Beni Issembert, mon "collègue" d'Infolive.tv

Blog en stock

C’est avec plaisir que je reprends, avec ce post, une rubrique un peu négligée ces derniers mois, celle consacrée aux blogs intéressants découverts au fur et à mesure de mes surfs sur la « Toile ». En général, leur présentation précède leur ajout sur la liste de mes liens permanents, liste constituant un petit « portail » à la fois sur Israël et sur le monde arabe. Je ferai une exception pour le jeune (il date de trois mois) blog de Beni Issembert, journaliste israélien de la chaîne de télévision « Infolivetv » que l’on peut visionner sur le Web (également en lien permanent) : je l’ai en effet déjà mis dans ma liste de « links ». Et il a eu, également, la gentillesse de publier la présentation de mon émission.

Ai-je besoin de le repréciser ici ? Si, pour ce qui concerne les sites israéliens (en anglais ou français) ou juifs francophones j’ai retenus clairement des sites et blogs de bords opposés - disons pour faire vite : « colombes » ou « faucons » -, c’est par souci d’un minimum d’éthique journalistique : on ne peut s’informer en ne lisant qu’un son de cloche. Cela ne signifie pas que je sois d’accord avec tout ce que les uns ou les autres publient. Cela ne signifie pas, non plus, que j’accepterais de mettre en liens des adresses où l’on lirait, de façon récurrente et obsessionnelle des propos racistes. Et, malheureusement, de telles adresses sont venues polluer le Web, probablement éditées par de très jeunes excités (on s’en rend compte à la fréquence des fautes d’orthographe ; et on s’en rend compte aussi par la pauvreté de leur contenu, constitué presque uniquement de « copiés collés » grappillés dans les mêmes sources) ... mais là n’est pas l’objet de cet article !

Beni Issembert tranche donc dans ce paysage israélien francophone, d’abord parce qu’il est un vrai journaliste. Il publie sur son blog de vraies interviews ou reportages, repris de « Infolivetv ». Parmi eux, j’ai particulièrement apprécié la série intitulée « le divan », où sont interrogés des députés originaux de la Knesset : preuve de son ouverture d’esprit, il a ainsi interrogé une député arabe chrétienne, Nadia Hilo, mais aussi le député nationaliste arabe Ahmad Tibi, personnage peu sympathique s’il en est. Beni Issembert a également aidé à faire découvrir Fayçal G., ce jeune marocain vivant à Tel Aviv auteur de « Fayce, le « je » de la paix » dont j’ai déjà parlé sur le blog (voir lien en libellé) : j’espère d’ailleurs construire une émission autour de son témoignage, assez exceptionnel.

Mais Beni Issembert ne se contente pas des reprises vidéos de la chaîne pour laquelle il travaille : également mis en ligne, et de façon assez régulière, des informations et analyses sur la situation (assez explosive) d’Israël en cette fin 2007. Et je dois avouer que, à la fois sur la forme et sur le fond, je suis la plupart du temps en phase avec ce qu’il écrit - peut-être parce que, justement, il n’a pas d’a priori idéologiques.

Enfin, une dernière précision : Beni est un parent ... d’Olivier Issembert, le jeune journaliste qui donne « les news » sur notre radio Judaïques FM !


J.C

10 octobre 2007

André Nahum ce matin sur Judaïques FM : entre Palestiniens et Israéliens, la confiance nécessaire

Bonjour.

Ehud Olmert a déclaré à la Knesset qu'il avait trouvé en Mahmoud Abbas un interlocuteur pour engager des négociations de paix, que les relations de travail avec le Président palestinien étaient bonnes et que ni lui ni son premier ministre n'étaient des terroristes. Il s'agirait donc d'une situation nouvelle qui pourrait déboucher enfin sur des solutions constructives. Si la création d'un État palestinien est désormais plus ou moins acceptée par l'opinion israélienne, les deux parties en présence ont des positions et des impératifs tellement éloignés que l'on ne voit pas très bien sur quelles bases elles pourraient arriver à un accord définitif.

Le problème le plus épineux, celui qui a fait capoter les discussions de camp David et de Sharm el Sheikh est le "droit au retour" des réfugiés palestiniens et de leurs descendants, évidemment inacceptable pour Israël qui verrait l'équilibre démographique et politique bouleversé par l'admission de centaines de milliers sinon de millions de Palestiniens éduqués dés le berceau dans la haine du juif.

Vient ensuite Jérusalem dont les Palestiniens réclament le secteur Est pour y installer leur capitale. Face à un Haïm Ramon qui se déclare disposé à accepter cette éventualité, plus de 60 % des israéliens sont opposés à tout partage de la "capitale éternelle" d'Israël.

Troisième obstacle : les implantations juives en Cisjordanie. Quel serait leur avenir dans un territoire devenu indépendant ? Devraient-elles être évacuées en totalité ou en partie ? Quel gouvernement israélien prendrait le risque de transplanter des dizaines de milliers de juifs quand on a vu les difficultés, les drames et les problèmes qu'a provoqué il y a deux ans l'évacuation du Goush Katif ?
Quatrième élément : sans vouloir douter le moins du monde de la sincérité et de la bonne volonté du Président Mahmoud Abbas, il faut reconnaître que sa faiblesse, son incapacité jusqu'à présent à désarmer les milices, l'influence persistante au sein de sa population d'un sentiment islamo-national exacerbé, le résultat désastreux de l'évacuation totale de la bande de Gaza, la proclamation d'un État palestinien totalement indépendant ne semble pas pouvoir être acceptée par Israël dans l'immédiat. Rien ne dit en effet que dès le lendemain de cette proclamation, des roquettes ne seraient pas envoyées sur Tel-Aviv ou Netanya comme elles le sont quotidiennement sur Sderot et le Néguev à partir de Gaza.

Ceci pour dire que l'on peut faire preuve d'un certain optimisme devant la tournure que prennent actuellement les relations entre le gouvernement israélien et l'Autorité palestinienne et la détermination américaine d'arriver à un résultat, mais cet optimisme ne peut être que très modéré. Les choses peuvent très probablement avancer, mais pour arriver à la paix, il faut que surviennent des changements en profondeur chez les Palestiniens, c'est à dire qu'il soit mis fin au règne des milices et de la terreur, qu'il soit mis fin à l'enseignement de la haine d'Israël et des Juifs à l’École et à l'Université , bref qu'un climat de confiance s'instaure non seulement parmi les dirigeants mais aussi dans les masses populaires. C'est certainement possible, mais ce n'est probablement pas pour demain.

André Nahum
Judaïques FM, le 10 octobre 2007

08 octobre 2007

Les Shadoks et l'immigration

 
Nous n’en avons pas fini de pleurer la deuxième mort des Shadoks avec la disparition il y a déjà plus d'un an de l’irremplaçable Claude Piéplu. Trop jeune à l’époque pour apprécier la profondeur de leurs maximes - si finement équilibrée par la voix haut perchée de celui qui les énonçait - je me dis qu’il me faudra trouver le temps de les relire, et de m’en imprégner !


Ainsi de celle-là, qui me semble parfaitement adaptée au problème de l’immigration. Problème posé à l’origine par l’extrême-droite qui en a fait son cheval de bataille depuis plus de vingt ans, elle a longtemps plombé le débat politique sur le fond. Dans un livre (logiquement) ignoré par la plupart des médias faiseurs d’opinion ("Etre de droite, un tabou français", Éditions Albin Michel), son auteur Eric Brunet décrivait un pays bloqué et sectaire ; et il démontait le mécanisme qui avait interdit de parler sereinement de ces sujets. Extrait, page 36 :
"Le syllogisme bancal a plané sur la France pendant près de vingt ans :
1. L’extrême-droite parle de l’immigration et de l’insécurité.
2. L’extrême-droite est dangereuse.
3. Ceux qui parlent d’immigration et d’insécurité sont donc de dangereux extrémistes."


Or qu’avons-nous entendu à longueur de journées sur les plateaux télé ou sur nos radios au cours de la campagne des présidentielles ? "Nicolas Sarkozy braconne sur les terres du Front National" ; "Ségolène Royal fait du Sarkozy" ; "c’est la Le Penisation des esprits". Même si au final le candidat de la droite a triomphé, les élites intellectuelles du pays n'ont pas accepté la simple remise en cause d'une immigration sans limites, aboutissant de facto à un déchirement du tissu social. A noter d'ailleurs que, sans surprise, c'est dans les zones du territoire où l'immigration a été la moins importante (la façade Atlantique, les Pyrénées, la Bretagne) que la gauche a réalisé ses meilleurs scores, tandis qu'elle se maintenait bien dans les centre villes de plus en plus habités par des "bobos". Par contraste, c'est dans l'Est ou dans les banlieues pavillonnaires des grandes cités que Nicolas Sarkozy a réalisé ses meilleurs scores.


Mais revenons à la question de fond : au prétexte d'une association de termes maladroite (le fameux "ministère de l'immigration et de l'identité nationale" programmé pendant la campagne présidentielle, mais non exactement dénommé ainsi dans le nouveau gouvernement), il a été fait un procès en pétainisme au futur Chef de l’État, sans opposition argumentée sur le fond. Car il ne s’agit jamais de débattre sur des sujets engageant l’avenir de la France, et sur des thèmes clairs : l’immigration doit-elle continuer à ce rythme ? Doit-elle venir toujours en majorité des anciennes colonies ? Est-il judicieux d’importer chaque année des "bacs moins cinq" quand des "bacs plus cinq" doivent s’exiler pour trouver du travail ? Comment loger les nouveaux arrivants, alors qu’il y a déjà un déficit de deux millions de logements neufs ? Les journalistes "libéraux-libertaires" - dont le référentiel imprimé reste « le grand quotidien du soir qui fait la morale » - ignorent superbement l’inquiétude des Français qui n’en peuvent plus de leur langue de bois. Aux oubliettes, donc, l’abaissement dramatique du niveau scolaire dans des centaines d’établissements fréquentés par une jeunesse mal intégrée, la fuite des enfants "français de souche" vers des écoles privées qui grève encore plus les fins de mois difficiles de leurs parents, la ghettoïsation des "cités poubelles" emmurées par l’abandon économique et travaillées par l’islam politique ; oubliée l'impossibilité de trouver du travail pour les nouveaux arrivants, alors même que "l'ascenseur social" est en panne pour les enfants d'immigrés nés dans notre pays.


Là-dessus, il est bien sûr impossible de faire l'impasse sur beaucoup d'aspects peu reluisants de la Loi dite "Hortefeux" qui est finalement passée après seconde lecture au Sénat dans la nuit du 4 au 5 octobre : ainsi des fameux tests ADN pour prouver la filiation, jugés détestables par la LICRA dont pourtant le président, loin du simplisme d'autres associations antiracistes, a dit avec justesse combien l'emploi de certaines expressions ("rafles", "déportation") étaient indignes car elles banalisaient la Shoah ; ainsi également des "centres de rétention" où les conditions de vie des "sans-papiers" seraient indignes d'après plusieurs ONG dont la CIMADE. Mais là n'est pas le fond du dossier, oublié à chaque polémique nouvelle ; et ceux qui refusent tout frein à l'immigration ne sont pas questionnés, eux, sur leur propre positionnement : au nom de quoi devrait-on accepter l'arrivée de millions de nouveaux arrivants en France, et donc - du fait de leur jeunesse, et de leur démographie - la substitution de la population d'origine par une population majoritairement issue des anciennes colonies ?


Qu’on se le dise donc superbement, comme les Shadoks : "il n’y a pas de problème d’immigration !" Et surtout, que l’on ne rappelle pas le corollaire shadokien que tout le monde finit par comprendre : il n’y a pas de problème parce qu’il n’y a pas de bonnes solutions à se problème, mais que des mauvaises entre lesquels il faudra choisir : soit on refuse l’invasion démographique - et nous rendrons malheureux les candidats refoulés par une société de plus en plus fermée ; soit on cherche à les maintenir dans leurs pays, en faisant pression pour changer des régimes qui engendrent la misère - et c’en est fini de "la voix de la France", traditionnellement chère au Quai d’Orsay et basée sur le statu-quo outre-Méditerranée ; soit on laisse tout le monde entrer avec la régularisation des sans-papiers - et la France, déjà criblée de dettes et en panne d'investissements, continuera de couler plus ou moins rapidement selon les scénarios.


Jean Corcos

07 octobre 2007

La mondialisation de la haine





Photos Associated Press, prises le 5 octobre 2007, à l'occasion de la journée "Al-Qods" :
- en haut à gauche, Cachemire indien ;
- à droite, photo du haut, Indonésie ;
- à droite, photo du bas, Syrie
- en bas à gauche, Iran, avec hélas (grande mode islamiste importée de Palestine), un petit enfant avec en guise de jouet un fusil d'assaut ...

























Vendredi dernier, les Juifs célébraient la fête de "Simhat Thora", la "joie de la Thora", célébrée (comme le veut la coutume) dans l'allégresse, afin de marquer la fin du cycle annuel de lecture du Livre de la Loi. Les fêtes juives d'automne correspondaient cette année au mois de Ramadan. Et il y a - hélas ! - un autre rituel, celui-là qui n'a rien de religieux et qui relève uniquement de la manipulation politique, faisant se rassembler dans le monde entier des Musulmans le dernier vendredi du mois de Ramadan. En effet, depuis la révolution de 1979, le régime iranien organise à ce moment là du calendrier islamique de grandes manifestations dites de la "journée Al-Qods" (Jérusalem), dont l'objectif officiel est de "soutenir la Palestine" - mais qui est, en réalité, l'occasion de déverser une propagande antisémite abjecte visant la destruction de l'Etat juif. Or donc, cette année, ces manifestations sont tombées le 5 octobre, jour de fête chez les "Sionistes" tellement haïs !

Comme le souligne un courrier diffusé par l'Ambassade d'Israël à Paris, "en quête d'un rôle hégémonique panislamique, l'Iran tente de rallier le monde musulman contre Israël, ennemi fédérateur, "chancre dans le corps islamique". Son visés également le "grand Satan", c'est à dire les États-Unis et l'Occident, accusé d'être à la tête d'un complot anti-islamique." Un grand coup de chapeau à notre confrère "mediarabe.info" (en lien permanent) qui, dans un article publié vendredi dernier que je vous invite à lire, parle de cette journée et surtout donne le lien permettant de télécharger, en version pdf, l’ouvrage indispensable de "L’American Jewish Committee" : cette brochure analyse les enjeux, pour l’Iran, derrière cette "mobilisation", et dénonce ces nombreux militants de gauche « qui refusent de voir ce qu’est le régime iranien : un obscurantisme clérical dont l’antisémitisme utilise tous les clichés de celui professé, naguère comme de nos jours, par l’extrême droite occidentale ».

Ce 5 octobre, sans surprise, le nabot antisémite de Téhéran a donc renouvelé ses lugubres invectives contre Israël et les Juifs, demandant que "les Sionistes" soient transférés "en Europe ou en Alaska", et disant que "l'Holocauste était un prétexte qui avait permis le génocide des Palestiniens".

Mais le pire, ce sont ces manifestations de Musulmans qui ne sont ni des Iraniens intimidés par leur police, ni des Palestiniens pro-Hamas : du Cachemire à l'ile de Java en passant par Damas, ces visages aux rictus haineux annoncent peut-être aussi un danger à venir : il y a en effet maintenant des manifestations de ce type en Europe et en Amérique, et la propagande iranienne risque d'enflammer l'antisémitisme dans les communautés musulmanes implantées en Occident. Et comme le souligne l'article de "mediarabe.info" pré-cité, le très extrémiste "Parti des Musulmans de France" de Mohamed Latrèche appelait hier à manifester à Argenteuil, en pleine solidarité avec Mahmoud Ahmadinejad !

J.C

06 octobre 2007

C'est le temps des expos ...
























Première exposition, celle dont je vous ai déjà parlé sur le blog le 16 septembre, l'hommage à Varian Fry à la Halle Saint Pierre (jusqu'au 9 mars 2008). J'ai eu le plaisir d'avoir une visite guidée le jour du vernissage, par mon ami Karim Hervé Benkamla (photo de gauche), que l'on voit ici poser devant des panneaux de la partie historique de l'expo.

Deuxième exposition, celle-là hélas déjà terminée car elle n'a pas été programmée sur une longue période, celle du mosaïste Armand Cherbit (photo de droite, devant deux de ses œuvres) à la Mairie du XVIème arrondissement de Paris. La mosaïque est une forme d'art plastique hélas presque disparue aujourd'hui, et qui demande des trésors de patience et de doigté. J'ai eu le bonheur de connaître Armand Cherbit lors d'expositions passées de l'APSJF (Association des Peintres et Sculpteurs Juifs de France). Je reviendrai plus longuement sur l'artiste et sur son travail, dans un prochain post de ma série "Une Toile sur la Toile".

J.C

01 octobre 2007

Ma critique sur un livre de référence de Pierre Vermeren, « Maghreb, la démocratie impossible »

Introduction :Il y a déjà trois ans, le regretté journal d’information en ligne « proche-orient.info » publiait une critique, sous ma signature, d’un ouvrage tout à fait indispensable à qui veut mieux comprendre le Maghreb d’aujourd’hui au miroir de son histoire lointaine ou contemporaine.
Ce livre m’avait tellement intéressé que j’y avais consacré deux émissions avec l’auteur, que l’on peut écouter sous forme de podcasts en allant sur ce lien et sur celui-là. Par la suite, des liens amicaux allaient se nouer avec ce jeune et brillant historien, qui a bien voulu me proposer des articles pour publications sur le blog.
Je reproduis ci-dessous intégralement ma critique de son livre.

J.C

MAGHREB, LA DEMOCRATIE IMPOSSIBLE ?
Pierre Vermeren
Editions FAYARD
,

420 pages, 22 euros.

L’AUTEUR
Pierre Vermeren
Né en 1966 à Verdun. Normalien et agrégé d’histoire, arabisant, il a vécu huit années au Maroc, en Egypte et en Tunisie. Spécialiste du Maghreb, il a consacré sa thèse de doctorat à « la formation des élites par l’enseignement supérieur au Maroc et en Tunisie », et il a enseigné six ans au lycée Descartes de Rabat. Aujourd’hui enseignant d’histoire dans un Lycée de Bordeaux, il est chercheur associé au Centre d’études d’Afrique noire (CEAN).

LE LIVRE
Dans cet essai magistral, Pierre Vermeren frappe fort et juste, de la première à la dernière ligne. « Le Maghreb post-colonial est en passe de devenir la terra incognita de la recherche historique française ». Et l’auteur d’évoquer (ce qui ne lui fera pas que des amis), la disparition des experts chevronnés, et la quarantaine de journalistes et conseillers, « souvent marqués par une approche proche-orientale », qui travaillent parfois comme relais d’opinion des régimes autoritaires en place. Les toutes dernières lignes reviennent sur l’évocation, fréquente au fil du livre, de la fin des minorités non musulmanes aux tournants plus ou moins violents des indépendances. Ce sont maintenant les élites nationales qui risquent de partir, un risque de terrible régression pour le Maghreb « s’il perdait pour la troisième fois en un demi-siècle ses franges les plus dynamiques et les plus ouvertes sur le monde (après les pieds-noirs et les juifs maghrébins) ».
Les outils de l’historien viennent nous aider à démonter les mentalités collectives, avant, pendant et après la parenthèse coloniale française. S’appuyant sur des références bibliographiques très riches (douze pages en annexe) et d’innombrables références (romans ou essais, témoignages, articles de presse ou de sites Internet) l’auteur ré-écrit une histoire bouleversante parce qu’elle est celle des peuples et non celle des puissants, une histoire où des évènements mal connus ont engendré les pires conséquences. Deux exemples. En Algérie, des décennies de Code de l’Indigénat lèguent une jeunesse musulmane analphabète à 80 % à la veille de la guerre d’Indépendance. Pour « gagner les esprits », l’armée française lance une immense campagne scolaire jusqu’aux douars les plus reculés, campagne qui vient trop tard mais qui sera assez efficace pour produire la première génération effectivement francophone du pays. De cette génération émergent des « élites acculturées », souvent d’origine kabyle, contre lesquelles se dresseront, après l’arabisation forcenée de l’ère Boumediene, les masses pauvres dérivant vers l’islamisme. Au Maroc s’instaure à partir des années 80 un « tourisme sexuel », les Arabes du Golfe ne pouvant plus profiter des délices du Caire suite à la paix israélo-égyptienne. Agadir, Casablanca, deviennent des lieux de prostitution suscitant une violence anti-féminine ; et, avec une simultanéité chronologique stupéfiante, se multiplient alors sur le sol marocain les mosquées et institutions d’obédience wahabbite ...
Avant d’émerger comme nations indépendantes, les populations des trois états du Maghreb ont eu un vécu, des cultures, bien méprisées par nos orientalistes de salon. La « genèse millénaire du Maghreb » nous est restituée alors qu’elle est complètement ignorée de la mémoire collective française, obnubilée par la Guerre d’Algérie. Nous découvrons ainsi comment, « minoritaires au sein du monde berbère, les Arabes ont pu, grâce à l’autorité religieuse, accaparer le pouvoir de commandement politique » ; comment la géographie a eu, ici comme ailleurs, une influence déterminante sur les identités culturelles, les langues berbères étant balayées rapidement en Tunisie, pays de plaines, et résistant au Maroc et en Algérie, dans les zones montagneuses ou isolées (Atlas, Aurès, Kabylie, Sud saharien) ; comment les noms des localités reflètent la dialectique arabo-berbère, opposant cités proches de la Méditerranée et campagnes « amazigh », avant un exode rural massif favorisé par une démographie explosive ; comment le colonisateur a joué de ces oppositions, soutenant (en parallèle à l’émancipation des minorités juives), les « Berbères » contre « les Arabes » ; comment au moment des indépendances, et bien que les populations non arabisées aient payé un lourd tribut, c’est la ligne « arabo-islamique » incarnée surtout par l’Istiqlal marocain et le FLN qui va triompher ; comment un salafisme identitaire - qui n’a rien à voir avec les tentatives réformistes des penseurs moyen-orientaux, sombrant vite dans les délires violents des divers théoriciens du Djihad - a toujours imprégné les différentes luttes contre les envahisseurs européens ; comment le conflit israélo-palestinien fut « instrumentalisé », et comment « l’Afrique du Nord devint Maghreb », avec le plein soutien du Quai d’Orsay qui joua alors la grande partition de la « politique arabe ». La violence des régimes s’impose alors comme « mode de régulation politique », et il faut saluer le courage de Pierre Vermeren qui rappelle les dizaines de milliers de morts des différents massacres (Messalistes, Harkis, Kabyles en Algérie, véritables opérations militaires au Maroc, répressions sanglantes des émeutes de la faim en Tunisie). Ceci dans la stupéfiante indifférence de la France, car « les Etats se taisent en échange de services rendus » et « la gauche se tait par culpabilité ».
Une véritable histoire des peuples se doit aussi d’être celle des sociétés, sous tous les angles (politique, mais aussi économique, culturel, social). Alors que « dans les imaginaires, l’Afrique du Nord reste un vaste désert arrosé de soleil où on mange du couscous », Pierre Vermeren souligne quelques réalités explosives sur les bientôt 80 millions d’hommes et de femmes qui rêvent d’Europe grâce à la fée télévision : des sociétés éclatées entre une élite francophone, « nouveaux colons » vivant à l’occidentale, et un petit peuple méprisé, non encadré - tout simplement parce que les régimes l’ont toujours empêché - par des syndicats, associations, partis politiques, autant de structures d’intégration naturelles en démocratie ; un PNB par habitant qui est au Maroc équivalent à celui du Bostwana, alors que des dizaines de milliards de dollars ont été placés à l’extérieur ; l’exode des cerveaux (la moitié des diplômés maghrébins des Grandes Ecoles sont restés en France) ; la misère effroyable des diplômés purement arabophones, prisonniers d’un univers replié sur lui-même (absence quasi totale de traductions de publications étrangères) ; et leur sympathie naturelle pour les partis islamistes, qui répond autant à une détresse sociale qu’à leur seul référent culturel.
C’est peut-être à ce niveau que l’on peut formuler une critique à l’ouvrage. Tout à fait conscient de la barbarie du terrorisme islamiste, Pierre Vermeren rappelle aussi le débat franco-français sur la « deuxième guerre d’Algérie » et les analyses divergentes entre « pro-éradicateurs » et « pro-dialoguistes ». Oui, et c’est une réalité dérangeante, la mouvance la plus sympathique (organisations féministes, mouvement berbère, démocrates et libéraux) reste aujourd’hui minoritaire, et on peut en conclure qu’il n’y aura pas de démocratie là-bas sans une intégration des partis islamistes dans le jeu politique. « Le modèle turc est observé à la loupe » depuis novembre 2002, en particulier l’absence de dérapage grâce à l’armée qui « joue le rôle de garde-fou » ... Mais les forces islamistes sont-elles capables de jouer ce jeu au Maghreb ? Et pourquoi le même auteur qui dénonce, courageusement, la responsabilité des autorités dans l’élimination « soft » des séculaires communautés juives, ne mentionne-t-il pas le delirium antisémite des Ghannouchi ou Madani, dont l’influence fait des ravages dans nos banlieues ?
Enfin, une dernière critique pour ce qui concerne la petite Tunisie. Alors que, au sortir d’une éblouissante fresque historique, on est convaincu du parallélisme de destinée des « frères ennemis » algériens et marocains, ce parallélisme systématique dérape souvent pour le troisième pays, où (quoique l’on puisse penser des régimes), la vision politique de Bourguiba et le pragmatisme économique de Ben Ali ont, au moins, permis une prospérité économique, une émancipation des femmes et un niveau culturel uniques dans le Monde arabe.

Jean CorcosPublié en juillet 2004 par le journal « proche-orient.info »