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31 octobre 2011

Elections tunisiennes : les résultats officiels


TUNIS (TAP) - Le président de l'ISIE Kamel Jendoubi, a annoncé, jeudi soir 27 octobre, que le mouvement ''Ennahdha'' a remporté 90 sièges de l'Assemblée Constituante, qui compte 217 sièges, soit 41,47 %.

Voici la liste des vainqueurs des élections de la Constituante :
  • Ennahda: 90 sièges  (41,47%)
  • CPR: 30 sièges  (13,82 %)
  • Ettakatol: 21 sièges (9,68 %)
  • Pétition populaire: 19 sièges  (8,76)
  • PDP: 17 sièges (7,83 %)
  • PDM: 5 sièges) (2,3 %)
  • Parti d'El Moubadara (l'initiative): 5 sièges  (2,3 %)
  • Afek Tounes: 4 sièges (1,84%)
  • El Badeel Etthaouri: 3 sièges (1,32 %) 
  • MDS: 2 sièges
  • Mouvement des patriotes démocrates: 2 sièges 
Les 14 listes suivantes ont obtenu 1 seul siège à la Constituante :
·         Parti culturel unioniste de la nation "El Oumma" 
  • Mouvement du peuple 
  • Liste fidélité aux martyrs 
  • Parti libéral maghrébin
  • Liste l'indépendant 
  • Liste la voix de l'avenir 
  • L'union patriotique libre 
  • Anidhal progressiste 
  • Anidhal social 
  • Parti justice et équité 
  • Chams Al Aridha 
  • Liste pour un front patriotique tunisien 
  • Mouvement du peuple unioniste 
  • Liste la justice
  • Liste fidélité aux martyrs
Voir sur le site de l'agence Tunis Afrique Presse la présentation officielle des résultats. 

J.C


Nota de Jean Corcos
CPR : Conseil pour la République
PDP : Parti Démocrate Progressiste
PDM : Pôle Démocratique Moderniste
Voir sur cette page de Wikipedia une présentation des partis politiques tunisiens.

Percée islamique en Tunisie, par Gérard Akoun


Les Tunisiens se sont rendus massivement dans les bureaux de vote pour participer aux  premières élections  libres et démocratiques organisées dans ce pays, les premières dans le monde arabe. Il s’agissait  d’élire  les 217 députés  qui seront  chargés de rédiger une nouvelle  constitution, élire un président de la République, tout en gouvernant la Tunisie pendant cette période de transition qui ne devrait pas excéder une année. De nouvelles élections législatives et présidentielles  seront alors organisées. Mais nous n’en sommes pas encore là. Les résultats de ces élections libres, répétons-le, ont donné une majorité au parti islamiste « modéré »  Ennahda, qui a recueilli entre 30 et 40 % des suffrages, ce qui fait de lui le premier parti au sein de l’Assemblée.
Ce  résultat  a surpris de nombreux observateurs dans la mesure où ce parti n’avait  pas été à l’origine du mouvement de révolte qui a permis de chasser  Ben Ali du pouvoir, même si ses militants avaient fini par se joindre aux manifestants. 

Trois raisons permettent de comprendre cette percée des islamistes : 
 La première, Ben Ali, comme les autres dictateurs dans le monde arabe,  avait laminé toute opposition. Seuls, les islamistes, pourtant  durement  pourchassés, emprisonnés, martyrisés, ont pu subsister dans la clandestinité, parce qu’ils  avaient  l’avantage par rapport aux laïcs ou aux libéraux  de pouvoir se rencontrer dans les mosquées, de garder ainsi  un lien avec la population et exprimer, discrètement, leur opposition au pouvoir en place. La Mosquée, dernier lieu de contestation du pouvoir dictatorial, illustrait parfaitement le face à face, voulu  par Ben Ali et consorts. Ils  apparaissaient, ainsi, aux yeux des Occidentaux, comme les seuls remparts contre le danger islamique, et par conséquent ils pouvaient obtenir  d’eux qu’ils ferment les yeux sur leurs atteintes au droit de l’homme, comme sur leurs turpitudes, et qu’ils leurs apportent un soutien sans faille.
La deuxième, les islamistes se sont investis dans l’action sociale envers les plus  démunis, en particulier dans les régions délaissées par le pouvoir, qui a privilégié le développement côtier. Ils disposaient donc d’un important réseau social.
La troisième, habitués à la clandestinité, ils étaient les mieux structurés, les mieux organisés pour  être à même de quadriller les circonscriptions  et donc de pouvoir plus  rapidement et plus efficacement  s’engager dans la bataille électorale. Il faudrait ajouter qu’ils ont disposé d’un financement important qui leur a été, sans doute fourni, en grande partie, par des pays du  Golfe, dont le Qatar qui souhaite être influent politiquement et économiquement dans le Maghreb à défaut de pouvoir l’être dans le Machrek.
Voter pour Ennahda,  ennemi irréductible de la dictature, c’était donc se venger de Ben Ali, mais aussi pour les Tunisiens  qui lui ont apporté leur suffrage  choisir des candidats proches du peuple qui, ils le pensent, seraient moins corruptibles que d’autres,  parce qu’ils respecteraient les préceptes islamiques. Ajoutons à cela que les autres partis en lice ont du se construire ou se reconstruire, et que souvent proches idéologiquement ils se sont présentés  en ordre dispersé, alors que  seules des questions de personnes les séparaient.
  
Le parti islamique sort vainqueur de ces élections mais il ne détient pas la majorité absolue à l’Assemblée.  Il est donc obligé de composer. Il appelle, par conséquent, à la formation d’un gouvernement d’union nationale, dont le Premier Ministre serait issu de ses rangs.  Le chef  d’Ennahda ne réclame pas ce poste pour lui-même, il ne sera pas non plus candidat au poste de Président de la République. Il s’est engagé  à ne pas remettre en cause les libertés publiques et les droits des femmes, au contraire, il s’en fait, non sans ambigüité, le défenseur : les femmes qui voudront porter le voile ou le niqab pourront enfin le faire en toute liberté ! Monsieur Ghannouchi souhaite, aussi, que son parti détienne le portefeuille de l’Éducation pour mettre en avant l’identité arabe de la Tunisie, il a déclaré « notre langue, c’est la langue arabe, elle est devenue franco arabe, c’est de la pollution linguistique » il veut donc un dialogue national sur l’éducation. Il  va procéder, ainsi,  par petites touches, aux marges, car il ne faut pas s’y tromper,  le chef  d’Ennahda n’a pas renié ses écrits sur l’islamisation de la société. Et il les appliquera si les démocrates tunisiens ne se ressaisissent pas, si les jeunes qui ont provoqué la chute de Ben Ali pour la liberté, la dignité et le travail ne restent pas vigilants - le pays  compte 700.000 chômeurs, dont 50.000 nouveaux diplômés - et les islamistes n’ont pas de solution miracle.

Le combat pour la démocratie n’est pas perdu, il va continuer.

Gérard  Akoun      
Judaïques FM, le 27 octobre 2011

30 octobre 2011

Une "quinzaine tunisienne"


Quelques mots, amis lecteurs, pour vous présenter le dossier spécial qui va occuper la majeure partie du blog dans les deux prochaines semaines - sauf, bien sûr, développements graves en Israël avec la nouvelle série de bombardements que subit l'état juif.

J'ai choisi de vous proposer une sélection d'articles commentant ces élections historiques, et en premier lieu, bien sûr, le succès incontestable des islamistes. Je le ferai dans le même souci d'objectivité que celui auquel vous êtes habitués maintenant, en vous donnant à lire des opinions différentes, affaire de vous construire la votre après réflexion : hélas - et si on pouvait s'exprimer ainsi sur mon blog - je dirais que "la messe est dite" pour la plupart des sites d'information, les médias dominants - télévisions surtout - nous vantant les "islamistes modérés" tunisiens, et les sites de la "blogosphère juive" peignant systématiquement en noir les suites du "Printemps arabe" ...

Demain, je commencerai donc cette série par l'édito de mon collègue de Judaïques FM, Gérard Akoun, qui analysait jeudi dernier à notre antenne les causes du succès d'Ennahda. Et je la finirai dans une quinzaine par un petit article vous donnant mes propres sentiments sur le sujet !

J.C

Où va l'Egypte ? Chérif Amir sera mon invité le 6 novembre



Avant de vous présenter cette émission et notre invité, quelques mots à propos de notre programmation. Comme vous le savez, cette série essaie toujours de garder un certain recul mais il ne faut pas non plus trop se détacher des évènements. L'actualité brûlante de ces dernières semaines dans le monde arabe, cela a été à la fois la Tunisie, avec le succès du parti islamiste Ennahda, et la fin de la guerre en Libye, avec la mort de Kadhafi : je consacrerai donc deux émissions spéciales à ces pays au cours des prochaines semaines. Mais dimanche prochain, nous allons parler de l’Égypte, ce grand pays voisin direct d'Israël, pour lequel l'actualité des dernières mois a été aussi très riche, et pour en parler j'aurai un invité égyptien que j'avais déjà eu l'occasion de recevoir à ce micro, Chérif Amir. Rappelons que c'est un jeune universitaire d'origine copte, et qu'il a poursuivi ses études à Paris où il a brillamment soutenu une thèse de doctorat sur le thème : "L'impact des convictions religieuses sur les conflits du Moyen-Orient". Sa théorie, qui est assez inquiétante mais à laquelle, hélas les développements récents du "Printemps arabe" semblent donner raison, c'est que le facteur religieux est tout à fait incontournable, à la fois dans la politique intérieure comme dans les conflits régionaux. Il s'est spécialisé dans l'étude du mouvement des "Frères Musulmans" , "Al ikhwan al moslemine", et pour lui ce n'est pas seulement de la théorie : appartenant à une minorité il craint, comme les Juifs, comme Israël, qu'une lame de fond ne vienne tout balayer. Rentré en Égypte pendant plusieurs mois, il a été présent au moment d'évènements très graves comme l'attaque par la foule de l'Ambassade d'Israël au Caire, et surtout le massacre de dizaines de coptes le dimanche 9 octobre ; cela s'est passé tout près de chez lui et il racontera ces moments tragiques à nos auditeurs. Mais, au delà de cette actualité, ce qui nous intéresse c'est le futur proche, dont dépend l'équilibre et la sécurité de tout le Moyen-Orient : "Où va l’Égypte ?", voilà notre question et j'espère que cette émission y répondra en partie.

Parmi les questions que je poserai à Chérif Amir :

- Quelle est la situation générale des Coptes depuis la révolution de février ? La dernière fois, vous avez évoqué leur rôle dans la chute de Moubarak, or aujourd'hui on lit que 100.000 d'entre eux ont fui le pays ces derniers mois : est-ce vrai, et pourquoi ?
- A propos de cette manifestation copte du 9 octobre au Caire, qui a très mal fini : que s'est-il passé ? Pourquoi les Coptes ont-ils organisé cette manifestation ? Il y a eu au final plus de vingt tués, mais les chaines satellitaires comme Al-Arabiya ont dit que les manifestants avaient tiré sur les policiers qui n'auraient fait que riposter, et dans les reportages, c'étaient eux qui étaient présentés comme des "Chahids", des martyrs.
- A propos du triangle entre Jérusalem, Le Caire et Gaza : depuis la chute de l'ancien régime, il y a eu un certain nombre de gestes faits en faveur des islamistes : officiellement, il n'y a plus de blocus pour les personnes sur la frontière de Rafah ; c'est au Caire que ce sont déroulés les négociations entre le Fatah et le Hamas pour un hypothétique gouvernement d'union nationale qui n'est toujours pas arrivé ; mais c'est surtout et en grande partie grâce au gouvernement égyptien qu'il y a pu y avoir l'accord pour la libération de Guilad Shalit, en échange de 1.027 terroristes palestiniens. Que faut-il en penser ? Est-ce qu'il faut y voir une nouvelle politique du Hamas, qui s'éloignerait de la Syrie où il y a la révolution, au profit de l’Égypte ? Ou alors - hypothèse pessimiste -, est-ce que cela est le reflet de la main mise progressive des Frères Musulmans sur le pouvoir ?
- Près de neuf mois après les immenses manifestations de la Place Tahrir : où en sommes-nous ? Où en est-on par rapport au procès de Moubarak - qui est le seul chef d'état arabe déchu à être traduit en justice à ce jour -, il n'a été ni exilé comme Ben Ali, ni lynché comme Kadhafi ? Où en est-on par rapport aux élections, les législatives sont prévues fin novembre, mais l'armée repousse les présidentielles à fin 2012 ?

J'espère que vous serez nombreux au rendez-vous dimanche prochain !

J.C

28 octobre 2011

Connaissez-vous ce charmant pays (suite) ?


La devinette du mois
- octobre 2011

Nouvelle devinette, dans la série inaugurée il y a maintenant quelques mois : il s'agit de deviner un pays musulman, d'après l'architecture, typique, de sa capitale ou d'une grande ville.

Celle-là me semble un peu plus facile que la précédente ... une ville au bord de la mer ... une grande mosquée imposante, mais dont le style ne fera pas trop hésiter les fins connaisseurs entre le Maghreb et le Moyen-Orient.

Comme d'habitude, mails bienvenus à l'adresse du blog : rencontre@noos.fr. Les centaines d'amis de mon réseau FaceBook pourront aussi répondre sur mon page, où je mettrai un lien. Le résultat sera donné avec la prochaine devinette, le mois prochain.

Quand à la devinette précédente, il s'agissait de l'Algérie, la photo ayant été prise à Oran, grand métropole de l'Ouest du pays. Exceptionnellement, je n'ai eu AUCUNE réponse, ni par courriel, ni sur ma page F.B ... et pourtant, un détail aurait pu vous aider si vous aviez agrandi la photo : un tout petit drapeau algérien, flottant sur un balcon ! 



J.C

27 octobre 2011

Tunisie : de Ben Ali à Ennahda


Sans commentaires, hélas ... les légendes sont en arabe, mais le sens est clair : les Tunisiens ont conquis leur liberté il y a quelques mois, pour courir peut-être vers une autre cage en votant massivement pour Ennahda !
Je reviendrai la semaine prochaine, plus longuement, sur ces résultats bien traumatisants en publiant une sélection d'articles et en vous faisant part, bien sûr, de mes sentiments personnels. 

J.C 

25 octobre 2011

Les 10 raisons pour lesquelles nous savons que l’Iran veut la Bombe


Le 4 septembre dernier Téhéran a annoncé que la centrale de Bushehr était connectée au réseau. Bushehr est la façade pacifique du programme nucléaire iranien. En même temps, d’après les constatations du dernier rapport de l’AIEA, l’Iran continue ses progrès vers l’obtention de l’arme nucléaire. On peut souligner que dans ce rapport l’Agence a exprimé son « inquiétude croissante » au sujet de l’existence possible en Iran « d’activités nucléaires militaires secrètes passées ou présentes y compris celles en rapport avec le développement d’une charge nucléaire pour missile. » [1]

Comment savons-nous que l’Iran veut la bombe? Il n’y a pas une seule preuve irréfutable (et comment pourrait-il y en avoir, sauf essai nucléaire?), mais plutôt une multitude de pistes qui conduisent à cette constatation. La plupart proviennent des travaux de l’AIEA. Prises dans leur ensemble, elles mènent à la conclusion évidente que l’Iran veut au minimum une option nucléaire, et probablement la bombe atomique.

1.    L’Iran a cherché à cacher ses activités et installations à l’AEIA
En 2003, l’ampleur des efforts iraniens a éclaté au grand jour. L’Iran avait caché la construction d’une usine d’enrichissement à Natanz et d’un réacteur de recherche à Arak, la fabrication de centrifugeuses, l’existence d’un programme d’enrichissement au laser, ainsi qu’un certain nombre d’expériences sensibles. [2] L’Iran a ensuite empêché l’AIEA de réaliser une inspection complète des sites de Lavisan-Shian et de Parchin, suspectés d’abriter des activités nucléaires. Plus tard, l’Etat iranien a omis de déclarer à l’avance la construction de l’usine d’enrichissement de Fordoo.

2.   Les activités les plus sensibles d’Iran sont contrôlées par le Ministère de la Défense
Alors que le programme de l’Iran est officiellement sous le contrôle de l’Agence Iranienne pour l’Energie Atomique, l’AIEA a constaté que de nombreuses activités secrètes liées au nucléaire étaient en fait conduites sous l’égide du Ministère de la Défense. [3]

3. Le programme d’enrichissement de l’Iran n’a pas de logique économique
Les réserves de gaz de l’Iran permettraient au pays de subvenir à ses besoins en électricité pendant plusieurs décennies. L’investissement de Téhéran dans un programme d’enrichissement coûteux, prétendument destiné à fabriquer du combustible pour les centrales nucléaires, n’a pas de justification économique.
Le site de Natanz a une capacité limitée. Une fois terminé, il ne pourrait alimenter qu’un seul réacteur pendant un an. Aucun pays n’a jamais exploité des installations d’enrichissement pour une seule centrale: il est bien moins cher, dans ce cas, d’acheter le combustible sur le marché.

4. Le programme d’enrichissement de l’Iran n’est pas cohérent avec ses buts déclarés
L’Iran prétend avoir besoin d’uranium enrichi à 3% pour ses centrales nucléaires. Mais la Russie fournit le combustible pour Bushehr et il serait impossible pour l’Iran de l’exploiter avec son propre combustible. Si le projet était d’alimenter un hypothétique réacteur à venir, il n’y avait aucune raison pour que Téhéran commence l’enrichissement dès 2006.
L’Iran est à présent en train de construire une deuxième centrale d’enrichissement à Fordoo, mais cette installation est beaucoup plus petite que celle de Natanz. Sa taille convient à une utilisation militaire.
En 2010, l’Iran a commencé à produire de l’uranium enrichi à 20%, prétendument pour ré-alimenter le réacteur de recherche de Téhéran. Cependant, rien ne prouve que l’Iran ait le savoir-faire nécessaire pour produire les barres de combustible pour ce réacteur particulier.

5. L’Iran possède un document qui explique comment effectuer le moulage de l’uranium en demi-sphères
L’AIEA a pu constater que l’Iran possède un document qui explique comment effectuer le moulage de l’uranium en demi-sphères, c’est–à-dire comment fabriquer un cœur de bombe atomique. [4] Ce document a été fourni par le réseau Khan.

6. L’Iran construit un réacteur à l’eau lourde sans but scientifique précis
L’Iran construit un nouveau réacteur de recherche à Arak. Ses caractéristiques—un réacteur de 40 mw qui utilise de l’uranium naturel et de l’eau lourde—pourraient en faire une structure adaptée à la production de plutonium que qualité millitaire. En fait, il ressemble étrangement à des réacteurs utilisés par d’autres pays pour produire du plutonium militaire.
Il convient de mentionner, à ce propos, que l’Iran a mené des expériences sur la séparation du plutonium dans des cellules chaudes. [5]

7. L’Iran a mené des expériences et des études en rapport avec l’armement
L’Iran a produit du polonium, qui peut être utilisé pour le déclenchement d’une réaction neutronique en chaîne. [6] Il a également mené des études sur le déclenchement de réactions neutroniques en utilisant le deutérure d’uranium (méthode chinoise). [7]
Des organisations relevant du ministère de la Défense ont étudié et testé les mécanismes d’explosion d’une arme nucléaire (détonation simultanée de puissants explosifs autour d’un cœur sphérique). [8] Téhéran a reconnu avoir fait des tests sur les détonations simultanées tout en prétendant que ceux-ci étaient à but non nucléaire. [9] Cependant, des documents détenus par l’AIEA montrent que les exigences iraniennes ne concordent qu’avec un projet d’armement nucléaire. [10]
On ne sait pas si l’Iran poursuit toujours de telles activités. Les essais ont peut-être été assez concluants pour permettre à Téhéran de construire un dispositif fonctionnel (surtout, si, comme on le redoute, l’Iran a reçu des modèles d’ogives provenant du réseau Khan). En 2009, l’AIEA aurait conclu que «l’Iran a suffisamment d’informations pour être capable de concevoir et produire un dispositif d’implosion fonctionnel.» [11]
L’Iran a également projeté de faire de nouveaux essais nucléaires: il a étudié l’architecture d’un site d’essai (avec pour projet une détonation à 400 mètres de profondeur), et a conçu un équipement spécial pour le déclenchement du tir à distance. [12]

8. L’Iran a fait des essais sur un missile à capacité nucléaire
En 2004, l’Iran a fait des essais sur un missile Shahab 3 avec un corps de rentrée en forme de biberon (tricône), parfaitement adapté à une arme nucléaire. Cet essai a été vu à la télévision.
Ceci conforte la conclusion par l’AIEA au sujet des efforts de Téhéran pour placer une charge sphérique sous la coiffe du Shahab-3. [13]
Le fait que l’Iran ait également fait des essais de simulation d’explosion d’une charge de missile à une altitude de 600 mètres- ce qui n’a de sens que si la charge est nucléaire- ne devrait laisser aucun doute sur les intentions de l’Iran. [14]

9. L’Iran refuse de mettre en place des mesures de transparence
L’Iran refuse de déclarer à l’avance toute nouvelle infrastructure nucléaire qu’il construit ou projette de construire: en 2007, il a suspendu la mise en place du code modifié 3.1, une réglementation de l’AIEA à laquelle il avait souscrit en 2003.
L’Iran refuse également de mettre en place le protocole additionnel de l’AIEA (alors qu’il l’avait signé en 2003), qui est, selon l’Agence, le seul moyen à sa disposition pour vérifier l’absence d’un potentiel détournement de matériel nucléaire. Le refus de l’Iran limite sérieusement la capacité de l’AIEA de découvrir d’éventuelles activités illégales supplémentaires.
Si Téhéran n’avait que des intentions pacifiques et cherchait à prouver sa bonne foi, pourquoi refuserait-elle une transparence accrue?

10. L’Iran rejette des propositions de reprise de négociations
L’Iran a rejeté les propositions de l’AIEA et des membres permanents de l’ONU et l’Allemagne destinées à permettre la reprise des négociations (“Double Temps Mort” en 2007, et ”Gel contre Gel” en 2008). Téhéran n’a pas répondu favorablement aux ouvertures de l’administration Obama. Il a rejeté une proposition de 2009, qui était censée être une mesure de confiance, de transférer la plus grande partie de son stock d’uranium enrichi à 3% dans un pays étranger en échange de barres de combustible à l’uranium enrichi à 20% pour le réacteur de Téhéran. L’Iran ne manifeste aucun intérêt pour aucune sorte de « grand marchandage ».
Si Téhéran n’avait que des intentions pacifiques et cherchait à prouver sa bonne foi, pourquoi refuserait-elle de telles propositions?
                                                *
En somme le programme nucléaire Iranien n’est pas compatible avec son objectif soi-disant civil, mais est en revanche compatible avec un objectif militaire.
Certains affirment que Téhéran ne veut qu’une option nucléaire, et ne cherchera pas à aller au-delà du seuil. Ceci pourrait bien n’être qu’une douce illusion. Il n’y a aucun exemple dans l’histoire de pays qui, en l’absence de changement de régime (par exemple le Brésil dans les années 80), a été si loin et investi autant dans un programme nucléaire, sans franchir le pas. [15]La nomination en février 2011 de Fereydoun Abbassi Davani, l’un des principaux architectes du programme militaire, à la vice-présidence de la République islamique et à la tête de l’AIEA, n’augure rien de bon.
Traduit de l’anglais.

Bruno Tertrais
Source : site http://www.realite-eu.org, 12 septembre 2011

Références :
[1] International Atomic Energy Agency (IAEA), GOV/2011/54, 2 September 2011.
[2] IAEA, GOV/2003/75, 10 November 2003.
[3] IAEA, GOV/2004/11, 24 February 2004; Institute for Science and International Security (ISIS), “Briefing Notes from February 2008 IAEA meeting regarding Iran’s nuclear program”, 11 April 2008
[4] IAEA, GOV/2005/87, 18 November 2005.
[5] IAEA, GOV/2003/75, 10 November 2003.
[6] IAEA, GOV/2004/11, 24 February 2004.
[7] IAEA, GOV/2011/29, 24 May 2011.
[8] IAEA, GOV/2008/15, 26 May 2008; Ibid., GOV/2008/4, 22 February 2008.
[9] IAEA, GOV/2008/15, 26 May 2008.
[10] ISIS, “Briefing notes…”, op. cit.
[11] ISIS, “Excerpts from Internal IAEA Document on Alleged Iranian Nuclear Weaponization”, 2 October 2009.
[12] IAEA, GOV/2008/15, 26 May 2008.
[13] IAEA, GOV/2008/15, 26 May 2008.
[14] ISIS, “Briefing notes…”, op. cit.
[15] La comparaison parfois faite avec le Japon est inappropriée: il n’y a pas de preuve que Tokyo ait une option nucléaire. Le Japon a des raisons économiques et techniques solides à son enrichissement d’uranium. Toutes ses installations sont totalement accessibles à l’AIEA. L’Agence n’a jamais trouvé, ni jamais été informée, d’aucune activité nucléaire suspecte ou illégale au Japon.

Nota de Jean Corcos :
On reparle - enfin ! - dans la presse française de la course de l'Iran vers la bombe ; et cela à l'occasion d'un prochain rapport de l'AIEA qui serait, nous dit-on, beaucoup plus clair sur le sujet. Cet article de Bruno Tertrais, maître de recherche à la Fondation pour la Recherche Stratégique, est donc tout à fait le bienvenue pour mettre les choses au point. Bruno Tertrais, rappelons-le, a été mon invité en janvier 2010. On pourra découvrir ou ré écouter mon interview en allant sur ce lien.

23 octobre 2011

Kadhafi, tyran craint jusqu'à son dernier souffle, par Pierre Prier



Le Guide de la révolution, au pouvoir depuis 1969, a toujours cherché à se distinguer de ses pairs.

Mouammar Kadhafi avait juré de mourir en Libye. Il a tenu parole, retranché dans sa ville natale. Jusqu'à l'ultime moment, il faisait encore peur. Le premier ministre du nouveau gouvernement exposait il y a deux jours encore ses craintes de voir le Guide déchu organiser la reconquête en recrutant des mercenaires à coups de milliards. La légende de Kadhafi, l'homme seul contre tous, provoquait encore la crainte, alors qu'il ne régnait plus que sur quelques centaines de mètres carrés de sol libyen. Le vieux Guide aux cheveux teints et aux déguisements d'opérette est finalement resté fidèle au ­jeune capitaine émacié qui, jadis, présentait un profil de médaille.
Ce Bédouin né de parents nomades renversa le 1er septembre 1969 le roi Idriss, monarque arrivé peu auparavant au pouvoir avec la bénédiction de l'Occident. La Libye était alors un pays improbable, puzzle de provinces ottomanes assemblées par la colonisation italienne. Elle était aussi immensément riche, grâce à son pétrole si clair et si abondant. Le capitaine, autopromu colonel, s'en servit pour réaliser ses rêves et ses caprices.

Voiture antiaccidents 

Au début, il décide d'être le nouveau Nasser. Comme le raïs égyptien, il a conquis le pouvoir à la tête d'un groupe d'«officiers libres». Comme lui, il veut unifier le monde arabe. Et qu'importe si les dirigeants voisins méprisent les Libyens, à leurs yeux gardiens de chèvres profitant d'une manne inespérée. Mouammar Kadhafi adopte les fondamentaux du nationalisme arabe, nationalisation des entreprises et expulsion des bases américaines. Sa seule tentative de créer un ensemble arabe, une union entre la Libye et la Tunisie, échoue en 1974. Bourguiba, d'abord tenté, recule devant la perspective d'un mariage invivable. Tant pis, Kadhafi se replie vers une autre ambition. Celle d'écrire une page entièrement nouvelle de l'histoire de l'humanité, de réaliser la démocratie intégrale. En 1977, il décrète la «République des masses», censée se gouverner seule à travers des comités populaires. Comme toutes les utopies réalisées, le rêve vire rapidement au cauchemar. Dans ce paradis sur terre, la seule appartenance à un parti politique est passible de la peine de mort. Les comités populaires sont vite chapeautés par des comités révolutionnaires, milices idéologiques et militaires de style léniniste. Les récalcitrants finissent à la prison d'Abou Salim ou pendus en public, comme les étudiants de Benghazi dans les années 1990.
La Libye et ses quelque 5 millions d'habitants est trop exiguë pour Kadhafi. Les Arabes ne veulent pas de lui comme chef ? Les mouvements révolutionnaires du monde entier repartent de Tripoli avec des valises chargées de pétrodollars. Le Guide envoie des cargos entiers d'armes et d'explosifs à l'IRA irlandaise. Les Brigades rouges italiennes et l'ETA basque trouvent aussi bon accueil à Tripoli.
Ce pouvoir de nuisance illimité paraît monter à la tête du colonel. Il multiplie les provocations délirantes. Assure que Shakespeare était arabe, car son vrai nom était «Cheikh Zuber.» Présente à la presse, lors du trentième anniversaire de la révolution, la première voiture antiaccidents, qu'il a dessinée lui-même. Assure récemment que l'Europe va devenir musulmane. Est-il sincère ? Un observateur, l'héritier du trône de Libye Mohammed al-Senoussi, confie: «Ne vous y fiez pas. Il adore jouer les idiots pour mieux tromper les Occidentaux.» 

Bédouin dur en affaires 

Mais le bouffon est sanguinaire. En 1986, Ronald Reagan fait bombarder sa caserne de Tripoli en représailles d'un attentat dans une discothèque de Berlin qui a tué des militaires américains. En 1988, Kadhafi se venge. Il fait exploser un Boeing de la Pan Am au-dessus de la ville écossaise de Lockerbie, faisant 270 morts. L'année suivante, il récidive avec un DC-10 de la compagnie française UTA (170 morts), probablement en représailles de la déculottée infligée par les troupes françaises à son armée au Tchad, qu'il avait envahi.
L'Afrique est le nouveau terrain de jeu de Kadhafi. Il a tiré un trait sur le monde arabe, qui l'a rejeté. Désormais, il se rend aux réunions de la Ligue arabe revêtu de boubous africains, en général pour insulter ses pairs. En 1988, on le voit, la seule main droite gantée de blanc. Il explique qu'il veut ainsi éviter de serrer des «mains tachées de sang». Au sommet suivant, il traite le roi Fahd, son voisin, de «produit britannique». Fumant un gros cigare, Kadhafi se tourne ostensiblement vers son voisin chaque fois qu'il exhale la fumée. En 2011, l'Arabie accusera le colonel d'avoir monté un complot pour assassiner le roi Abdallah. Déçu par les Arabes, Mouammar Kadhafi se veut maintenant le roi de l'Afrique. En 1999, il transforme la poussiéreuse Organisation de l'Union africaine (OUA) en Union africaine, avec des statuts calqués sur ceux de l'Union européenne. Mais il voit plus loin, rêve des «États-Unis d'Afrique», comme il le déclare au Figaro. Un nouveau pays avec une monnaie, une armée et un président, dont on devine facilement le nom. Il n'arrivera jamais à ses fins, les chefs d'État africains se méfiant de ses ambitions. Le Guide tente de les fléchir par tous les moyens: valises de billets offertes à chaque passage à Tripoli, par exemple. Les présidents africains s'amusent à comptabiliser le nombre de séjours effectués par leurs pairs à l'hôtel Méhari de Tripoli, sachant qu'ils en repartent toujours lestés de plusieurs millions de dollars. L'autre méthode du Guide, c'est de subventionner l'opposition de ceux qui lui résistent, voire des mouvements armés. Il dévient le bailleur de fonds des atroces chefs de guerre du Liberia et de la Sierra Leone, dont le Libérien Charles Taylor, aujourd'hui jugé par un tribunal international.
Mouammar Kadhafi avait-il changé ? En 2003, effrayé par le sort de Saddam Hussein, il entame immédiatement des négociations secrètes avec Londres et Washington, qui aboutiront en décembre de la même année à un revirement complet: abandon de son programme nucléaire, engagement à empêcher l'immigration africaine vers l'Europe, ouverture de la Libye aux compagnies pétrolières et au business occidental.

Mais le Guide n'en devient pas pour autant un partenaire comme un autre. Toujours provocateur, il exige - et obtient souvent - de planter sa tente au pied des palais présidentiels lors de ses visites officielles. Nargue ses nouveaux amis occidentaux en torturant de malheureuses infirmières bulgares, arrêtées sous le prétexte d'avoir volontairement inoculé le virus du sida à des enfants hospitalisés. La libération des infirmières et d'un médecin palestinien sera finalement négociée au prix fort. Tout comme la compensation des familles de victimes des attentats de Lockerbie et du DC-10. Le Guide paiera, mais ne reconnaîtra jamais sa responsabilité. Il avait pourtant livré un haut responsable des renseignements à la justice écossaise. Quand ce dernier, Abdelbassset al-Megrahi, est libéré en août 2009 pour raisons médicales, Kadhafi le reçoit en héros.
En Bédouin dur en affaires, il marchande son soutien, se plaignant sans cesse de ne pas avoir reçu suffisamment de compensations pour son retour sur la scène internationale. Il obtient de Berlusconi la construction aux frais de l'Italie d'une autoroute le long des 1200 km de côtes libyennes. Exige de la France et des États-Unis la vente de missiles pour soi-disant protéger l'Europe de l'immigration clandestine. Au cours des derniers mois, il n'a jamais compris que les Occidentaux se soient retournés contre lui. Ne laissaient-ils pas ses collègues dictateurs maltraiter leurs peuples ? Mouammar Kadhafi avait raté le printemps arabe. Il a alors cessé de marchander.

Pierre Prier
Le Figaro, 21 octobre 2011

Kadhafi, mort d'un antisémite

Kadhafi et Chavez
(photo Reuters)


Ainsi va l'actualité : les évènements historiques ne choisissent pas les dates où ils arrivent, ou alors il faudrait y voir une main divine ... Ce blog était en mode "pause" lorsque nous avons appris la fin brutale de Kadhafi, car comme je vous l'avais expliqué c'était une fête religieuse du calendrier hébraïque : deux jours plus précisément, clôturant la période de Souccot, avec une liesse particulière le vendredi, "Simhat Torah", "joie de la Torah" !
Ainsi donc, c'est alors que les Juifs pratiquants du monde entier chantaient et dansaient dans les synagogues - loin de la Libye ravagée par huit mois de guerre civile -, que des foules faisaient la queue dans la chambre froide d'un centre commercial de Misrata, pour voir et photographier la dépouille d'un dictateur ayant terrorisé son pays pendant 42 ans.

On lira sur le prochain article une synthèse historique très percutante écrite par Pierre Prier dans "Le Figaro", et qui résume l'essentiel : mais je voudrais insister ici sur le rapport de haine particulière qu'entretenait Mouamar el Kadhafi vis à vis des Juifs, un rapport obsessionnel qui est hélas la marque de plusieurs autres leaders du Tiers-Monde - le choix de cette photo avec Hugo Chavez n'est pas le fruit du hasard : allié d'Ahmadinejad, le "petit Hitler de Téhéran", le leader vénézuélien aura soutenu son ami jusqu'au bout !

Nasserien plus zélé que Nasser, lors de sa prise de pouvoir, il aura imité son maître spirituel d'abord en éliminant totalement la petite communauté juive qui vivait en Libye lors de son coup d'état, en 1969 : il n'en reste plus aucun, et Kadhafi a inoculé une telle haine antisémite dans son peuple que lorsque David Gerbi, Juif originaire du pays est venu récemment à Tripoli pour tenter de restaurer la synagogue, il a du fuir sous la menace des armes. De même et comme je vous en avais parlé, la rumeur sur les origines juives du dictateur aura décuplé la fureur des rebelles( lire ici).

Ensuite, il a été à deux doigts de commettre le pire attentat antisémite des dernières décennies, en faisant couler un grand paquebot à destination d'Israël : tout le monde l'a oublié, c'était en 1973 et le Yediot Aharonot le rappelle dans cet article.

La destruction rêvée, réclamée et considérée comme inéluctable de l’État juif sera restée quasiment la seule ligne dont le dictateur libyen n'aura jamais dévié, lui qui fut successivement l'ennemi puis l'allié de l'Occident ; et ce, alors que la plupart des dirigeant arabes continuent - sans doutes et dans le fond -, de penser comme lui tout en ne l'avouant pas. Une position, aussi, qui lui aura valu le soutien convaincu de tous les antisionistes radicaux, à commencer par Thierry Meyssan, qui dut fuir Tripoli au moment de l'entrée des rebelles il y a quelques semaines.

Une haine antisémite qui explique, aussi, l'horrible procès en sorcellerie fait aux malheureuses infirmières bulgares, torturées et retenues en otages pendant de nombreuses années sous le prétexte d'avoir inoculé volontairement le virus du Sida pour le compte du Mossad : mais les lecteurs fidèles savent combien cette affaire, à laquelle j'ai consacré une émission, m'avait marqué - lire sur mon blog. De ces années 2005-2007 date, je dois l'avouer, ma prise de conscience que ce faux bouffon qui aimait tant se déguiser était, d'abord, un antisémite dangereux et sanguinaire.

La mort de Kadhafi, lynché par la foule, aura été atroce, mais elle est aussi à la mesure du mal qu'il aura fait : dernier clin d'œil du destin, lui qui proclamait au début de la révolution son projet de tuer "comme des rats" son propre peuple révolté, aura été débusqué ... comme un rat, à la sortir d'une canalisation !

Jean Corcos
 

19 octobre 2011

Libre !!!

Guilad Shalit téléphonant à ses parents
après sa libération, 18 octobre 2011


Libre !!! On n'arrive pas à l'imaginer, tant le malheureux Guilad avait fini par ressembler à des disparus célèbres, prisonniers oubliés et victimes d'un destin horrible comme le navigateur Ron Arad, dont Israël n'a plus eu de nouvelles depuis 25 ans ...

Tout a déjà dit, écrit et commenté sur cet échange incroyable, un conscrit kidnappé dans son pays en échange de 1027 terroristes, dont plusieurs responsables de plus de 600 victimes civiles de la seconde Intifada : les Israéliens, tout en approuvant ce prix très lourd à une très large majorité n'en ressentent pas moins une légitime amertume ; et une inquiétude compréhensible, face au risque d'autres enlèvements de soldats et à ce qu'il faut bien reconnaitre comme une victoire du Hamas.

J'aimerais cependant, à cette occasion "historique" comme à d'autres, vous faire entendre une "autre musique" qui ne nous fait pas désespérer de tous les Musulmans. Quelques exemples :
-  d'abord ce communiqué de l'Amitié Judéo-Musulmane de France : "L'ensemble des Imams, qui à la demande de l'A.J-M.F., de Michel Serfaty et de Mohammed Azizi ont rencontré Noam Shalit, expriment leur joie suite à la libération de Gilad Shalit par le Hamas. D'une voix unanime, ils expriment leur reconnaissance au Saint Béni Soit-il, pour le miracle de ce jour ainsi que leur sympathie à Noam Shalit, son épouse et ses enfants et à toutes les personnes qui ont milité pour la libération de Gilad Shalit" ;
- ensuite le souvenir de l'émission que j'avais consacré à l'affaire Shalit, c'était le 2 novembre 2008, et parmi mes deux invités figurait mon vieil ami Karim-Hervé Benkamla qui a milité, sans fléchir et courageusement jusqu'au bout, pour la libération de l'otage franco-israélien ;
- enfin ces propos d'une éditorialiste koweïtienne, rapportés par nos confrères de la "Metula News Agency", et qui a dit dans le plus grand quotidien de l’Émirat : "Bienheureux Guilad Shalit, et chanceux… de retourner dans un pays qui respecte les êtres humains et se soucie de leur sort" : il est vrai que le contraste était saisissant entre la silhouette amaigrie de l'otage, titubant après cinq ans d'isolement pratiquement total, et l'allure des dizaines de monstres libérés, bien nourris et paradant face à la foule en délire de Gaza !

J.C

18 octobre 2011

Le jeu subtil de Recyp Erdogan


 “Israël a choisi de s’isoler en perdant un allié comme la Turquie », a déclaré hier Recyp Erdogan. « Ce n’est pas le peuple d’Israël, mais le gouvernement d’Israël qui a choisi de s’isoler. Nos déclarations à propos d’Israël ne visent pas le peuple d’Israël ni les citoyens juifs de Turquie. C’est le gouvernement israélien que nous visons. »
Une déclaration assez surprenante quand on sait qu’au fil des jours, il multiplie ses exigences envers l’état hébreu.
        
Ce fut d’abord une demande d’excuses et de compensations matérielles pour les familles des militants turcs qui ont perdu la vie lors de l’abordage du “Marmara”, puis l’arrêt du blocus de la bande de Gaza, puis la menace d’envoyer devant un tribunal international les militaires israéliens qui ont  participé  à cette opération et dont Ankara affirme détenir la liste.
       
Aujourd’hui, Erdogan veut empêcher les Chypriotes Grecs et les Israéliens de procéder à des forages à la recherche de gaz naturel  dans une zone maritime qui leur est formellement dévolue par le droit international. 
 A la vérité il ne cherche nullement l’apaisement et ne rate pas une occasion au contraire pour envenimer la situation. Et cela n’est pas  pour nous surprendre.
       
L’affaire de la flottille de Gaza n’a jamais été un hasard. Elle a été en fait un piège dans lequel Israël a foncé tête baissée. 
Il est devenu de plus en plus évident que, dans son désir d’accéder au  leadership du monde arabe, le premier ministre turc a découvert l’arme suprême grâce à laquelle il pouvait fédérer un certains nombre de pays, naguère soumis à l’empire Ottoman et cette arme, c’est ?... devinez !..
Eh bien la haine d’Israël tout naturellement. C’est facile et ça peut rapporter gros
En fait la Turquie se fiche d’Israël comme d’une guigne, mais elle a besoin de le mettre au pilori pour convaincre les pays arabes de se réfugier sous son aile tutélaire. Il y aurait gros à parier par ailleurs, qu’Ankara ne se préoccupe pas plus du sort des Palestiniens qu’elle ne l’a fait durant les soixante dix dernières années, mais ils sont aujourd’hui à la mode et c‘est un bon cheval à enfourcher pour devenir le leader incontesté de la région.
Plus fin et plus habile que son ami et allié Ahmadinejad, Erdogan, y met les formes, continue à se dire démocrate  et laïc et prend bien soin avec des déclarations lénifiantes comme celles d’hier, de ne pas rompre ses liens avec l’OTAN et les États-Unis, tout en amenant son pays vers un régime islamiste. 
Pour l’ heure, le Turc et l’Iranien semblent cheminer la main dans la main, mais visant tous les deux le même trône, ils s’affronteront inévitablement dans un avenir plus ou moins proche.
        
Dans cette partie difficile, Israël n’est cependant pas démuni de moyens.
- Il s’est  déjà rapproché de la Grèce et de la Bulgarie qui lui permettent d’utiliser leur espace aérien  pour l’entrainement de ses pilotes.
- Ensuite, s’il n’en assurait plus la maintenance, le matériel militaire, principalement les  drones qu’il a vendus à Ankara deviendrait parfaitement inoffensif.
- Le lobby pro-israélien pourrait pousser le Congrès américain à exiger d’Ankara la reconnaissance du génocide arménien.
- Jérusalem pourrait s’engager aux côtés des Kurdes contre lesquels la Turquie mène une guerre sans merci.
- Enfin l’arrêt total du tourisme israélien ne saurait être une bonne nouvelle pour son économie. 
Ce qui amène à penser que malgré ses rodomontades et ses imprécations, Recyp Erdogan ne désire ni une rupture totale ni une guerre avec Israël, sans être prêt  pour autant à modifier son comportement actuel 

André Nahum
Judaïques FM le 5 octobre 2011

17 octobre 2011

Nessma TV (suite) : l'onde de choc


Je vous parlais mardi dernier des manifestations qui avaient suivi la diffusion du film "Persépolis" sur la chaîne de télévision privée tunisienne, "Nessma TV" (voir en libellé). L'onde de choc ne faisait que commencer, car clairement et à quelques jours maintenant des premières élections libres, les salafistes ont décidé de montrer leur force dans la rue - en attendant pire encore ?

Revenons à ce qui a, officiellement, provoqué le courroux islamiste : n'avouant pas que ce qui les fâchait était la critique du régime iranien, ils ont pris prétexte d'un passage du film où Dieu est représenté sous la forme d'un vieillard ... or la représentation d'Allah est sacrilège dans l'islam, ce qui a poussé des fanatiques presque au meurtre, en envoyant des cocktails Molotov sur le domicile de Nabil Karoui, PDG de Nessma TV - lire ici.
On pourra voir sur ce lien le passage du dessin animé qui a mis le feu aux poudres !

Les manifestants ont cette fois tenté de marcher vers la résidence du Premier Ministre : voir la brève vidéo diffusée par l'AFP ... mais, ce que les médias à nouveau n'ont pas reporté - on devrait dire "refusent systématiquement de reporter" - ce sont les slogans antisémites, dont on trouvera une preuve sonore ci-dessous : sur la vidéo que j'ai reprise, on pourra suivre la manifestation anti-Nessma TV à Sousse ; on entend clairement la foule hurler le chant antisémite : « Khaybar Khaybar ya Yahūd, jaysh Muḥammad saya’ūd (خيبر خيبر يايهود جيش محمد سيعود). Traduction : »Khaybar, Khaybar ô Juifs, l’armée de Mahomet reviendra. »
La Bataille de Khaybar ou Khaïbar (arabe : خيبر ) a opposé, lors de la septième année de l’Hégire (628-629), Mahomet et ses fidèles aux Juifs vivant dans l’oasis de Khaybar. Les Juifs vaincus furent réduits au servage. Ils se rendirent et durent payer une rançon à Mahomet et donner toutes leurs terres à des musulmans.

J.C

16 octobre 2011

Les réfugiés palestiniens, otages de la diplomatie : Charles Meyer sera mon invité le 23 octobre


Manifestantes palestiniennes pour le "droit au retour"
Photo tirée du site antisioniste "The International Solidarity Movement"

Nous retrouverons dimanche prochain Charles Meyer pour continuer de parler de son livre "Les réfugiés palestiniens, otages de la diplomatie", publié aux éditions Hermann. Ce dossier des réfugiés est au cœur de tout règlement du conflit israélo-arabe, même si, comme je l'ai déjà dit, il est incroyablement laissé de côté par les médias et les responsables politiques. Or il faut, que cela nous plaise ou pas, voir les choses en face et ne pas se bercer d'illusions. Les Palestiniens ont obtenu de la communauté internationale depuis une vingtaine d'année pratiquement tout ce qu'ils ont demandé, que ce soit la reconnaissance de l'O.L.P comme partenaire des négociations malgré son passé terroriste, les accords d'Oslo qui ont obligé Israël à négocier l'avenir des territoires occupés en 1967, et le principe d'un état indépendant reconnu par toute la communauté internationale y compris les derniers gouvernements israéliens. Ils peuvent se dire donc qu'ils vont tout obtenir, et il suffisait d'entendre Mahmoud Abbas lors de son déjà célèbre discours à l'ONU du 23 septembre dernier, il suffisait aussi d'avoir l'oreille assez fine pour entendre tout ce que nous disent sans arrêt leurs responsables et leurs médias : le refus de reconnaitre Israël comme état nation du peuple juif signifie, en filigrane, le "retour" en Israël de 4,8 millions des leurs, pratiquement tous des descendants de ceux qui ont fui en 1948 donc des faux réfugiés ; ils ont construit leur identité nationale autour de ce projet, et il y n'y a aucune possibilité pour qu'ils y renoncent, sauf improbable pression internationale ou arabe. Alors il faut comprendre pourquoi on en est arrivé là, quelle est la responsabilité de l'ONU et de son agence, l'UNRWA. Il faut aussi connaitre à fond ce qu'ont été les résolutions internationales, démonter ce que la propagande antisioniste radicale va asséner avec la complicité de trop de médias. Il faut enfin voir quelles solutions on peut opposer à ce suicide programmé de l'état juif.

Parmi les questions que je poserai à Charles Meyer :

- Est-ce que vous pensez que pour les Palestiniens, comme l’avait dit Yasser Arafat en 2001 après son rejet des propositions Clinton, « Hak el-Awda moukades », « le droit au retour est sacré », autrement dit qu'il ne peut y avoir le moindre compromis ? Ou alors, comme le disent certains commentateurs, pensez-vous qu'il ne s’agit que de placer la barre des négociations très haut, de manière à tout obtenir sur le reste, Jérusalem en particulier ?
- Vous parlez dans votre livre des camps de réfugiés de Cisjordanie : on découvre qu’ils ne sont pas bien traités, car l’Autorité Palestinienne a refusé de les intégrer dans ses programmes de développement, laissant toute la responsabilité des camps à l’UNRWA, agence de l’ONU pour les réfugiés de Palestine : pourriez-vous donner des exemples concrets à nos auditeurs de cette gestion discriminatoire ?
- Vous racontez comment l’UNRWA a été créé en décembre 1949, et comment les états arabes ont refusé que ce soit l’office des Nations Unis pour les réfugiés, le HCR, qui traite ces personnes déplacées comme les dizaines de millions d’autres qu’a connus le Monde depuis 60 ans : en quoi les objectifs, le cadre juridique et surtout la définition du mot « réfugié » sont-ils différents dans le cas des Palestiniens ?
- L’Autorité Palestinienne, relayée par tous les réseaux de propagande antisionistes radicaux, prétend s’appuyer sur la légalité internationale en disant que « le droit au retour » est réclamé par la Charte des Nations Unies, et par une décision spécifique, la résolution 194 de l’Assemblée Générale de l’ONU : y a-t-il, pour d’autres conflits, des précédents à cette exigence de « retour » ? Que dit précisément la résolution 194 ? Quel est son statut juridique ? Et que disent, à propos des réfugiés, les résolutions du Conseil de Sécurité et les différents traités de Paix signés avec les états arabes ?
- Sans donc ce "droit au retour" qui signifierait la mort d'Israël, quelles pistes pour en finir avec le drame des réfugiés palestiniens ?

Rarement une de mes émissions aura été consacré à un sujet aussi grave et incontournable : j'espère donc que vous serez très nombreux à l'écoute !

J.C