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30 mars 2017

Ils ont parlé de l'Iran à mon émission


 

En haut à gauche Ardavan Amir Aslani, à droite Abnousse Shalmani
Au milieu, François Heisbourg
 En bas Firouz Nadji Ghazvini

Comme je l'écrivais il y a deux ans en clôturant mon "mois de la Syrie", impossible de finir un nouveau "voyage en Orient" sans revenir à mon émission, dont le blog est d'abord le support et le prolongement.

J'ai donc examiné la liste complète des numéros de "Rencontre", dont le nombre atteint maintenant le nouveau cap de 400 : 21 émissions depuis mai 1997 ont concerné directement l'Iran. Cela représente environ 5% du total, un chiffre honorable, surtout si on considère que je n'ai pas comptabilisé les numéros ayant évoqué le Liban, pays où - Hezbollah oblige - la République Islamique est devenu un presque parrain. Mais cela représente aussi une moyenne de une par an, ce qui n'est pas suffisant vu la richesse du dossier !

En fait, en examinant d'un peu plus près ces émissions, j'arrive à distinguer plusieurs époques, plus ou moins riches en rendez-vous selon l'importance apparente qu'avait l'Iran dans le paysage du Moyen-Orient.

- Il y a eu une seule émission jusqu'en 2004, consacrée au sort de la minorité juive : plusieurs juifs iraniens étaient jugés pour espionnage en faveur d'Israël, et ils risquaient la peine de mort. Intitulée "Des Musulmans au secours des Juifs d'Iran" et diffusée en juin 2000, elle m'aura permis de faire entendre sur nos ondes des messages de solidarité de Khadija Khali, alors responsable associative, et de feu Mouloud Aounit, président du MRAP.

- Je fis au début des années 2000 la connaissance de Kavéh Mohseni, militant pro-monarchie en exil à Paris, et surtout éditeur du site "Iran-Resist", longtemps en lien permanent sur mon blog. "Le peuple iranien contre le régime des Mollahs" (février 2004) ; "L'Iran et la bombe, le dessous des cartes" (février 2006) ; "Que cherche la République Islamique d'Iran ?" (septembre 2007) ; et enfin "Que se passe-t-il en Iran ?" (juillet 2009), cela représente donc un total conséquent d'entretiens ; mais pourtant cela fera huit ans que je ne l'ai plus reçu. Pourquoi ? Disons - alors même que le "complotisme" n'est devenu un sujet de préoccupation que tout dernièrement - que justement je trouvais qu'il proposait trop souvent de telles théories, décrédibilisant les oppositions qui ne lui plaisaient pas, et ne voyant dans les jeux des grandes puissances - et même s'il y a une part de vérité - que des manipulations. Autre invité reçu deux fois, Houchang Nahavandi, ancien ministre iranien ("Chute et mort du Shah", mars 2005 et "Où va l'Iran ?", octobre 2006). Là encore, des révélations intéressantes, l'expression d'une rancune compréhensible contre l'abandon des Occidentaux lors de la révolution de 1979 ; mais avec le temps, un décalage avec les problématiques d'aujourd'hui.

- Le grand retour de l'Iran sur la scène géopolitique du Moyen-Orient était intervenu entre temps, à la faveur d'une série d'évènements : l'invasion américaine en Irak, le renversement de Saddam Hussein étant une bénédiction pour la puissance chiite voisine ; la deuxième guerre du Liban à l'été 2006, qui aura été peut-être, par Hezbollah interposé, le premier épisode de la guerre avec Israël ; l'élection de Mahmoud Ahmadinejad comme Président de la République Islamique et ses déclarations incendiaires à l'attention de l'Etat juif et des Occidentaux ; et puis, bien sûr, les révélations sur le programme nucléaire iranien et la longue crise qui en est suivie. Tout ceci explique un nombre particulièrement important d'émissions entre 2007 et 2010.

- En ce qui concerne l'affrontement de plus en plus évident entre pays arabes sunnites et l'Iran chiite, j'ai eu sur mon plateau Laurence Louër, chercheuse au CERI Sciences Po. Son livre "Chiisme et politique au Moyen-Orient", est un modèle de sérieux et d'objectivité. J'ai également reçu, sur le thème "Israël, les Arabes et l'Iran", Chawki Freiha, lui même franco-libanais, maronite, et fin observateur des clivages dans son pays natal. Mais je reste parfaitement conscient qu'il faudra revenir en profondeur sur ce sujet !

- La peur et l'indignation face aux propos génocidaires de Mahmoud Ahmadinejad ont inspiré la tenue d'un colloque à Sciences Po en décembre 2006, où 17 intellectuels ont lancé "un appel à la fermeté". Pour en parler, et évoquer des pressions possibles, je recevais le mois suivant Monique Atlan et Fabrice Chiche sur le thème "Que peut faire l'Europe face à la République d'Iran ?" : les sanctions ont pris fin, on le sait, suite à l'accord sur le nucléaire de juillet 2015 ; et l'avenir nous dira qui a gagné, au final, ce bras de fer.

- Sur le sujet du nucléaire iranien, justement, je pense vous avoir proposé une série d'émissions, en abordant en profondeur les points techniques et en interrogeant les meilleurs spécialistes du sujet : en avril 2007, "L'Iran, la bombe et la démission des nations", titre du livre de la regrettée Thérèse Delpech, Directeur des Affaires Stratégiques au Commissariat à l’Energie Atomique ; en novembre de la même année, "Iran, le choix des armes", titre de l'ouvrage de François Heisbourg, Président du prestigieux « International Institute for Strategic Studies » de Londres. Autre expert réputé de la prolifération nucléaire, Bruno Tertrais, aujourd'hui Directeur adjoint de la Fondation pour la Recherche Stratégique, reçu en janvier 2010 sur le thème, assez angoissant je l'avoue, "Iran, la bombe en 2010 ?".

- Au delà du risque d'apocalypse atomique, la possibilité d'une guerre conventionnelle entre Israël et la République Islamique est aussi une réalité. Cela a été évoqué dans deux émissions, "Peut-on éviter une guerre avec l'Iran ?" en novembre 2012 avec Stéphane Juffa, le Directeur du site israélien d'information "Metula News Agency" ; et "Daech, Iran, le Moyen-Orient de tous les dangers", en mai 2015 et à nouveau avec Bruno Tertrais.

- En parfait contraste avec ces thèmes tout à fait angoissants, les deux émissions que j'ai consacrées au livre "Iran et Israël, Juifs et Perses", dont j'ai reçu l'auteur Ardavan Amir Aslani, avocat international d'origine iranienne, en novembre et décembre 2013. Etrange ouvrage en vérité, qui je dois l'avouer, m'a convaincu à moitié. Oui, les deux peuples ont partagé des moments marquants dans leur Histoire, et j'ai eu plaisir à évoquer dans ce dossier Esther et Assuérus ; oui, il y a eu une - bien discrète - alliance entre le Shah d'Iran et l'Etat juif. Mais il y a eu aussi des pages sombres de persécutions ; mais surtout, c'était bien réducteur que d'imaginer deux camps à la tête de la République Islamique, "les méchants" autour d'Ahmadinejad, et les autres, "les gentils" ; et j'espère que ces "mois de l'Iran" vous l'auront largement démontré.

- Évoquons pour finir quatre émissions, qui au delà de la politique internationale auront évoqué un autre Iran, celui d'une population à ne pas confondre avec ses dirigeants, et qui souffre de l'oppression imposée par le régime. Sous le titre "Une enfance brisée au pays des Ayatollahs", j'ai eu le plaisir de recevoir en novembre 2009 Firouz Nadji Ghazvini, auteur d'un petit roman bouleversant, "Le Trèfle bleu". En juin 2014, nous avons aussi évoqué un regard d'enfant grandissant après la révolution islamique, mais ce fut celui d'une fillette révoltée et qui l'est restée, Abnousse Shalmani, auteur d'une autobiographie détonante, "Khomeiny, Sade et moi". Il a aussi été question en septembre 2010 de la persécution des Bahai's en Iran, avec Sophie Ménard, porte parole de cette communauté en France. Et nous avons parlé à nouveau des Bahai's en mai 2016, mais aussi plus largement de la situation après l'élection de Rouhani avec Hamdam Nadafi, d'origine iranienne et elle aussi membre de cette communauté.

Merci à tous les lecteurs qui ont été présents à quelques uns de ces rendez-vous radiophoniques, en espérant faire encore de belles émissions sur l'Iran !

J.C

29 mars 2017

Le pays des potences



C'est l'une des faces les plus noires de la République Islamique. Un des sujets, aussi, sur lesquels nos grands médias partagent une grande complaisance : la peine de mort y est appliquée à des centaines de condamnés chaque année ; le nombre d'exécutions a littéralement explosé sous la présidence du "modéré" Rouhani ; et elles ont ceci de particulièrement macabre qu'elles sont faites en public, dans des centres villes, et en regroupant parfois plusieurs personnes en même temps ; c'est pourquoi, hélas, on retrouve sur la Toile un grand nombre de photos et même de vidéos.

En Iran, le meurtre, le viol, le vol à main armée, le trafic de drogue et l'adultère sont passibles de la peine de mort. Extrait de l'article Wikipedia consacré au sujet (mais hélas non remis à jour depuis 2013) :
"En violation probable de l’article 6.2 du Pacte international sur les droits civils et politiques (qui dit que la peine de mort est réservée aux « crimes les plus graves »), le code pénal iranien sanctionne de la peine de mort divers comportements, considérés comme des délits en droit iranien :

-         l'adultère, sous diverses circonstances définies dans le code pénal ;

-      la sodomie (définie comme une relation sexuelle entre deux hommes dans le code pénal iranien), active et passive, lorsqu'elle est consentante ;

-         le lesbianisme, à la troisième récidive ;

-         la consommation d’alcool, après récidive (art. 179) ;

-         le vol à main armée (art. 185) ;

-         le blasphème envers les personnages importants de l'islam, sous certaines conditions."

Toujours dans le même article de Wikipedia, on apprend que l'Iran est le grand pays comptabilisant le plus d'exécutions par habitant, la minuscule Gambie en Afrique ayant la première place.


Ce condamné courageux fait le "V" de la victoire juste avant sa pendaison. D'après cette source il a été exécuté en public pour "guerre contre Dieu", accusation réservée aux prisonniers politiques, aux protestataires, aux manifestants.

Sur un site consacré à la peine de mort dans le monde, cette page consacrée à l'Iran. On y apprend en particulier deux choses importantes :
-         Le nombre d'exécutions a approché le millier en 2015.
-         Les grands médias, si friands de reportages sur les "couloirs de la mort" aux Etats-Unis et - plus rarement - sur les exécutions en Chine, n'en parlent pratiquement pas ; mais les principaux pays démocratiques ainsi que l'ONU condamnent l'Iran dans les cas les plus odieux.



Une photo de pendaison collective publiée par l'agence iranienne Mehr

Dans cet article publié dans "L'Obs" , le cas d'un adolescent homosexuel pendu, âgé de 17 ans au moment des faits qui lui étaient reprochés.

Dans cet autre article, le cas de deux opposants politiques de la minorité arabe du pays, pendus il y a trois ans : il s'agit à nouveau d'un meurtre purement politique.

J.C

28 mars 2017

Marjane Satrapi, quand l'Iran est une B.D

Affiche du film

Impossible d'approcher de la fin de ce "voyage" en Iran sans évoquer Marjane Satrapi.

Après quelques modestes articles consacrés d'autres facettes de la culture - cinéma, peinture, architecture, gastronomie - on va ainsi parler d'un art bien original, presque jamais associé au monde musulman : la bande dessinée. Un art porté avec tellement de talent par une jeune femme prénommée Marjane, née en 1969 et dont le vrai nom à l'état civil est Marjane Ebrahimi.

Marjane Satrapi est sans doutes l'artiste iranienne la plus célèbre, d'abord bien sûr comme auteur de B.D (à la fois scénariste et dessinatrice) ; mais aussi comme peintre ; et enfin comme réalisatrice, car elle a adapté pour le cinéma  "Persépolis", sa célèbre œuvre autobiographique, puis "Poulet aux prunes", son deuxième album.

Sa première bande dessinée, on le sait, raconte en quatre tomes sa vie de jeune iranienne, vivant les soubresauts de la Révolution Islamique à l'âge de dix ans ; née dans une famille très engagée politiquement à gauche - son oncle, figure locale du parti communiste fut fusillé - elle fut envoyée par ses parents au lycée français de Vienne ;  avant de retourner à Téhéran, d'y suivre des études à l'école des beaux arts, puis de partir cette fois définitivement pour la France en 1994. Et c'est dans notre pays qu'elle se révéla.

Marjane Satrapi a su, avec talent, dessiner son "double" qui traverse sa B.D au fil des ans,  jugez en plutôt ici !


Vous trouverez sur ce lien une excellente présentation de "Persépolis".

J'y ai sélectionné une planche et une image, reproduites ci-dessous : pouvoir rire des corbeaux de Téhéran est un plaisir dont on ne se lasse pas.
 

Enfin, je vous propose de voir la bande annonce de son premier film.

J.C

 

27 mars 2017

Cet Iran que l'on ne veut plus voir



Dans mon article publié ici le 7 février, je tentais d'expliquer l'extraordinaire mansuétude des grands médias vis à vis de la République Islamique d'Iran. Cela concerne de nombreux domaines, mais il est particulièrement choquant de constater que l'on ne souligne presque jamais le triste état des Droits de l'Homme dans ce pays.
Est-ce à dire que l'on manque d'informations ? Absolument pas, et la série de liens que j'ai enregistrés ci-dessous prouve bien qu'il suffit de se documenter un peu pour le savoir. Simplement, les grands médias ont un pouvoir manipulateur simple à mettre en œuvre : ne pas regrouper certains faits, pour ne pas leur donner plus de force ; et les traiter sans les commenter, en les noyant dans un flux de nouvelles qu'il est bien difficile, ensuite, de pouvoir enregistrer.

Puisse ce modeste article aider un peu mes lecteurs en leur donnant une petite synthèse sur "Cet Iran que l'on ne veut plus voir".

1. Un rapport de l'ONU dénonce les violations des Droits de l'Homme en Iran : lien ici

2. La dessinatrice et militante féministe Iranienne Atena Farghadani condamnée à une peine de 14 années d’emprisonnement : lien ici

3. Un scientifique iranien, enseignant dans une université belge et arrêté lors d'une visite à sa famille, condamné à mort pour soi disant "espionnage" : lien ici

4. Le parlement iranien approuve une loi qui permet aux hommes de se marier avec leur fille adoptive dès qu’elle a atteint l’âge de 13 ans : lien ici

5. L'Iran condamne une femme à 6 ans de prison pour avoir écrit le récit d'une lapidation : lien ici

6. Interdiction de jouer pour un orchestre comprenant des femmes : lien ici

7. L'Iran dévoile une machine pour amputer les voleurs : lien ici

8. Coupes de cheveux "sataniques" interdites aux hommes : lien ici

Bonne lecture de tout cela !

J.C