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19 décembre 2006

Roschdy Zem, quelqu'un de bien



Petite mise à jour postée le 24 juin 2009

Les visiteurs arrivant sur cet article étant - très probablement - des antisémites ayant fait une recherche du type « Roschdy Zem juif », je leur conseille d’aller directement sur un « post » récent où j’analyse ce qui a pu les conduire à se poser anxieusement une telle question ... peut-être seront-ils curieux de lire comment j’analyse la sauce blanche qui leur sert de cervelle ?
Aller sur ce lien

Mais bien sûr, il n’est pas inutile de lire l’article ci-dessous ... pour ceux qui ont un peu de curiosité ; ou qui ne sont pas vraiment des minus haineux !

J’avais découvert Roschdy Zem il y a déjà plusieurs années dans "Vivre au Paradis", un film d’une rare sincérité de Bourlem Guerdjou (1999). A voir comme un documentaire (il a d’ailleurs été tourné en noir et blanc), cette œuvre méconnue du grand public retraçait une période sombre de l’histoire contemporaine qui ne fait honneur ni à la France, ni à l’Algérie : comment au début des années 60, des centaines de milliers d’immigrés algériens vivant dans des conditions lamentables (l’action se déroule dans le bidonville de Nanterre, rasé depuis) ont connu à la fois les soubresauts de la fin de la guerre d’indépendance, et l’espoir vite déçu de retourner sur la terre natale - le jeune état ne faisant rien pour encourager, au contraire, le retour d’une population très pauvre et souvent mal vue car majoritairement kabyle. Dans ce film Roschdy Zem jouait avec beaucoup de vérité le rôle d’un « anti-héros », de la catégorie qui constitue toujours la majorité et que l’histoire officielle ne retient jamais : soucieux d’abord de faire vivre sa famille et de la loger, neutre par rapport à la lutte d’indépendance d’un peuple qui n’était plus vraiment le sien, refusant « l’impôt révolutionnaire » du F.L.N (dont l’évocation sans fard fait honneur au metteur en scène), mais ne s’engageant pas non plus du côté des Algériens pro français qui allaient payer un lourd tribu pendant le conflit ... C’est ainsi que j’ai découvert, au travers d’un personnage de cinéma, l’ambition de cet acteur original qui ne joue jamais les « Arabes de service » - trop méchants ou trop gentils.

On lira sa biographie sur "allociné". Fils d’immigré marocains, né à Gennevilliers, sa trajectoire personnelle l’a conduit a être un acteur français très complet, s’adaptant à des rôles dépassant les « partitions ethniques ». J’ai été ensuite très agréablement surpris de le voir jouer ... le rôle d’un père de famille israélien dans le très beau « Vas, vis et deviens » de Radu Mihaileanu (2005) - lire la fiche sur "Comme au cinéma". Je rappelle rapidement l’histoire : dans l’Ethiopie ravagée par la guerre civile et alors qu’Israël organise le sauvetage de ses « enfants noirs oubliés », une mère chrétienne pousse son fils à se déclarer juif pour le sauver de la famine et de la mort. L'enfant arrive en Terre Sainte. Il grandit avec la peur qu'on découvre son double secret et mensonge : ni juif, ni orphelin, seulement noir. Il découvrira l'amour, la judaïté et la culture occidentale, mais aussi le racisme et la guerre dans les Territoires occupés. Roschdy Zem a accepté de tourner le film en Israël à un moment où ce pays était particulièrement diabolisé en France, et c’était bien réconfortant de voir un « beur » dans un rôle si inattendu !

Plus près de nous, il vient de recevoir - avec ses camarades Djamel Debbouze, Sami Naceri et Sami Bouajila - un prix d’interprétation collectif au dernier festival de Cannes pour le film « Indigènes » qui a connu un très grand succès (lire la fiche du film).

Mais c’est à nouveau à propos des Juifs que Roschdy Zem vient de faire preuve d’un grand courage, à une période où - disons le sans langue de bois - la pire propagande antisémite vient du monde arabe. Pour son premier film, il a choisi de nous parler d’amour, et pas de n’importe lequel puisqu’il raconte l’histoire d’un couple réunissant une Juive (Cécile De France) et un Musulman (lui-même) : « Mauvaise foi » (dont les affiches ont inondé Paris ces derniers jours) raconte une histoire vraie, puisque lui-même vit en couple avec une jeune femme juive ! Je ne l’ai pas encore vu, mais Bernard Koch en dit beaucoup de bien sur Diasporablog et je vous invite à lire son article. Là-dessus, et même si l’histoire a une « Happy End » dans le film de Roschdy Zem, les histoires de couples mixtes finissent aussi souvent mal, et vous pourrez lire (ou relire) à ce sujet l’article que j’avais consacré au début de l’année à un autre beau film, celui-là très peu médiatisé, "La petite Jérusalem" de Karin Albou.

Jean Corcos