Il faisait un temps merveilleux hier, sur Paris comme sur presque toute la France. Un ciel tellement bleu, une luminosité tellement exceptionnelle que l’on pouvait distinguer dans ses moindres détails le décor de cette journée historique que nous étions en train de vivre ...
... Et la première chose que l’on pouvait remarquer était la foule incroyable des électeurs se pressant à l’entrée des bureaux de votes, essentiellement des écoles sur Paris. Rien qu’en la voyant et en se souvenant du caractère artificiel des 16,8 % de Le Pen en 2002 (qui devait beaucoup aux 28 % d’abstentions, blancs et nuls cette année là), on devinait déjà le premier résultat de la soirée : le recul de la menace d’extrême droite. Son score aujourd’hui (10,5 %) est beaucoup plus faible que celui que prévoyaient les instituts de sondage : c’est d’ailleurs le seul échec que l’on puisse leur imputer ; les résultats pour Sarkozy (plus de 31 %) et Royal (25,8 %), se situant en « fourchette haute » de leurs prévisions - le score de Sarko étant accentué par le tassement de Le Pen à qui il a pris un bon million de voix ; et Bayrou à 18,5 % retombant, à peu près, sur ce qui était prévu (ce qui, par ailleurs constitue pour lui un succès indéniable, car son électorat était, toujours d’après les sondages, le moins assuré de son vote). Petite parenthèse : j’ai fait partie des internautes privilégiés ayant pu accéder vers 19 heures au site du journal suisse « Le Temps » qui donnait les premiers sondages « sortie des urnes » ; résultats conformes aux échos reçus d’amis engagés fortement, l’un au P.S et l’autre à l’U.M.P - quelle chance, à nouveau, de ne pas faire partie des « hémiplégiques de la pensée », dans mes lectures comme dans mes fréquentations !
J’ai donc eu tort en ce qui concerne mes craintes pour le Front National (relire mon post du 7 avril), mais j’ai rarement été aussi heureux de me ridiculiser dans un pronostic ... et on a souvent raison de sonner le tocsin. Il n’aura donc servi à rien pour le vieux leader de l’extrême droite de lancer les attaques les plus basses et les plus sournoises contre Nicolas Sarkozy (la dernière reprenant à son compte des rumeurs de caniveau sur son épouse Cécilia, que l’on a vue voter en compagnie de son mari et de ses deux filles hier à Neuilly) ; de promettre une amnistie générale sur les points de permis retirés ; ou même de draguer en banlieue les électeurs d’origine immigrée ! On apprend, par ailleurs, que parmi les rares « personnalités » étant venues faire un tour à la triste soirée du premier tour du Front National, se trouvait un ex-humoriste condamné pour antisémitisme : imaginer la tête que doit tirer Dieudonné ce matin va ensoleiller encore plus ce printemps exceptionnel !
Journée historique, aussi, par le taux de participation extraordinaire de 85 % qui montre que les Français ont conservé foi et espoir en leurs institutions républicaines : foi et espoir conservés ou découverts, car les jeunes électeurs et nouveaux inscrits sont venus voter en masse ; et ils n’ont pas plébiscité les extrémistes, de gauche (moins de 10 % au total pour les 6 « nains », Besancenot tirant relativement son épingle du jeu), ou de droite avec le Front National. Ce sont donc plus des trois quart des Français qui n’ont pas voté pour les extrêmes, surreprésentées il y a cinq ans lorsque les partis « traditionnels » leur faisaient l’« offre » vieillie ou usée de Jospin ou Chirac. Je m’en réjouis, d’abord comme citoyen révulsé par les slogans simplistes, démagogues et manichéens de tous les extrémismes. Et puis (et pourquoi avoir la moindre gêne à le dire ?), parce que l’antisémitisme se recrute maintenant à la fois à l’extrême droite et à l’extrême gauche : et, comme pour l’écrasante majorité des Juifs de France, voir mordre la poussière à la fois le grand ami des Mollahs iraniens et José Bové, l’agitateur alter mondialiste « qui à une autre époque aurait attaqué des magasins juifs » (dixit à mon micro Alexandre Adler) constitue déjà pour moi un immense soulagement !
Soulagement aussi quand j’apprends que les jeunes musulmans des banlieues ont voté, très majoritairement, pour la candidate du Parti Socialiste : preuve que, comme pour leurs compatriotes, le « vote utile » a fonctionné et que « l’intégration républicaine » a bien fonctionné. Mais crainte - en pointillé, et pour l’avenir - que, comme cela est déjà le cas dans des pays voisins (en Belgique, aux Pays Bas ou en Allemagne), une polarisation ne se fasse entre un grand parti de gauche « métissé » et un grand parti de droite « de Blancs ». Si le premier parti jouait alors, par démagogie ou par clientélisme électoral, la carte des frontières ouvertes et d’une immigration non maîtrisée, la France risquerait d’être complètement coupée en deux. Rêvons donc quelques minutes, le beau temps s’y prête ... Si Sarkozy est élu, il donnera des signaux forts « aux minorités visibles » en faisant plusieurs nominations symboliques à la tête de l’État. Et si Royal est élue, elle donnera un signal fort « aux Blancs » en ne faisant pas régulariser (comme le fit son ami Zapatero) des centaines de milliers de sans-papiers !
P.S : le blog a connu une fréquentation record ces derniers jours, plus de 150 visites par jour depuis une semaine, plus de 200 hier ... hélas, hélas, plus de la moitié viennent de recherches peu sympathiques, mais cela j’en ai déjà parlé dans mon post du 19 avril, pour ceux qui ne l’auraient pas encore lu !