(photo A.P)
Les journaux nous ont appris la disparition, d’une crise cardiaque, de Georges Habash, le 26 janvier dernier
Mais qui se souvient encore de Georges Habash ? Figure marquante du terrorisme palestinien alors que j’avais une vingtaine d’années, son nom n’évoque sûrement pas grand-chose pour les jeunes Internautes, passionnément engagés dans un camp ou l’autre de cet interminable conflit ... La mémoire française semble l’avoir particulièrement effacé, si l'on en juge par l’absence d’article en son honneur sur l’édition française de Wikipedia. L’édition anglaise, au contraire, a mis en ligne une biographie assez complète, associée, naturellement, à un long article sur le "Front Populaire pour la Libération de la Palestine" dont il fut à la fois le cofondateur et le leader jusqu’en 2000 - après avoir perdu, et depuis longtemps, de sa superbe à la fois pour des raisons de santé et parce que l’Histoire avait marginalisé son courant : révolutionnaire « marxiste-léniniste », soutenu en sous-main par le KGB de la défunte URSS, ayant à son programme le renversement de tous les régimes arabes pro-occidentaux (on se souviendra par exemple de la révolution manquée de septembre 1970 en Jordanie), cet ancien dirigeant du « Front du Refus », hostile aux accords d’Oslo, aura connu l’amertume de se voir dépassé par les islamistes du Hamas et du Djihad islamique, devenus les vrais « révolutionnaires » au yeux des nouvelles générations de Palestine, et du monde musulman en général.
Cinq commentaires, que l’on n’aura pas beaucoup lus dans les articles consacrés à sa disparition :
1. Né dans une riche famille grecque orthodoxe de Lydda (aujourd’hui Lod, en Israël), il incarnait l’antisionisme farouche de l’ensemble de la société palestinienne, et en premier lieu des Chrétiens qui, plus riches et mieux éduqués, avaient les meilleures positions du temps du mandat britannique ; un point à souligner, alors que l’on réduit aujourd’hui le conflit à une guerre de religions : le refus arabe d’Israël est d’abord nationaliste, même si les références à l’islam ont contribué, dès l’origine, à radicaliser le conflit.
2. Théoricien révolutionnaire « marxiste-léniniste », on n’aura guère connu Georges Habash se faire le praticien d’une société nouvelle : c’est, vous répondra-t-on, que les malheureux Palestiniens n’avaient pas d’État à gérer. Mais le mouvement sioniste a-t-il attendu l’indépendance d’Israël pour fonder des Kibboutz ou des coopératives ouvrières - à l’époque où il était, majoritairement, d’obédience socialiste ? Ses slogans « révolutionnaires » n’auront été que des mots, rien que des mots pour Habash comme pour hélas la presque totalité des leaders palestiniens, la priorité étant toujours portée à la destruction « de l’autre ».
3. Amnésiques ou ignorants, des journalistes nous auront inlassablement seriné au cours des dernières années la rengaine du « pauvre kamikaze désespéré qui tue en se suicidant, par désespoir » ... L’utilisation de ce « mode opératoire » par tous les terroristes islamistes de la Planète aura, depuis et largement, décrédibilisé leurs propos. Mais c’était aussi oublier que l’arme terroriste a été le choix fait, dès le début, par tous les mouvements combattant au nom de la cause palestinienne, des plus « laïcs » aux plus religieux. En lisant l’article consacré au FPLP, vous découvrirez la longue litanie d’attaques contre des civils, détournements d’avions, mitraillages d’aéroports ou d’ambassades - sans oublier l’explosion en vol d’un avion de la Swissair en route pour Tel Aviv, en février 1970 - attentat que cette « glorieuse figure de la résistance palestinienne » avait ouvertement revendiqué à l’époque !
4. Justement, il faut aussi retenir que ce terrorisme là, qui aurait pu être terriblement dévastateur - la stratégie du FPLP étant d’isoler complètement Israël, en coupant ses liaisons aériennes avec le monde extérieur - a été un échec complet : non pas que les dangers du terrorisme algérien aient disparu, ils se sont même étendus au monde entier depuis le 11 septembre. Mais des contre-mesures ont été trouvées, la surveillance adaptée, bref l’État juif et les Démocraties qui le soutiennent ont su, presque parfaitement, trouver les parades. Idem aujourd’hui pour les kamikazes islamistes avec la « barrière de sécurité » (1) ; idem demain avec le « bouclier anti-missiles » en cours de développement, pour répondre aux bombardements de « kassams » et autres « katiouchot ». Chroniqueurs de l’instantané et du sensationnel (le terrain choisi par les terroristes), les médias ne prennent guère le temps de s’attarder sur les victoires silencieuses, comme celle d’Israël contre Georges Habash.
5. Enfin (cela on aura pu le lire sur des sites ou blogs juifs), la décision de l’Autorité Palestinienne de décréter un deuil national de trois jours après sa mort a quelque chose de profondément choquant - comme la messe dite en l’honneur d’un ex-terroriste dans une Église d’Amman, alors même (comme on l’aura rappelé plus haut) qu’il avait tenté de renverser la monarchie hachémite au début des années 70 ! En voyant de tels hommages, les Israéliens ne peuvent guère se faire d’illusions sur les « modérés » avec lesquels, soit ils sont en Paix (la Jordanie voisine), soit ils négocient (Mahmoud Abbas).
Jean Corcos
(1) : C'est justement parce que cette barrière était restée inachevée au Sud d'Hébron que les deux terroristes de l'attentat de Dimona, lundi dernier, ont pu s'infiltrer par cette faille ...