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30 novembre 2007

Algérie : "Message d'accueil antisémite pour Sarkozy", un article du "Figaro" qui a fait du bruit !

Mohamed-Cherif Abbès, Ministre algérien des Anciens Combattants
(crédit photo AFP)

Ce blog - comme mon émission - essaie de rendre compte, régulièrement, des tentatives d’établir des passerelles entre Juifs et Musulmans, des gestes de bonne volonté des uns et des autres, et ce afin de ne pas insulter l’avenir ... et sans non plus se bercer d’illusions sur l’avenir proche, mais cela aussi mes lecteurs et auditeurs le savent bien. Raison de plus pour ne pas ignorer ici les propos antisémites scandaleux d’un officiel d’un pays arabe, ministre de surcroît : d'autant plus que - enfin ! - on en a largement parlé dans notre pays.
Petit extrait, d'abord, de l’article de Thierry Oberlé publié dans "Le Figaro" mercredi 28 novembre :

Le ton monte à Alger à quelques jours de la visite d’État de Nicolas Sarkozy, prévue du 3 au 5 décembre. Dans un entretien accordé lundi à El Khabar, le principal quotidien du pays, le ministre des Anciens Combattants algériens, Mohammed Cherif Abbès, accuse à mots à peine couverts le président français d’être un agent à la solde d’Israël.
"Vous connaissez les origines du président français et ceux qui l’ont amené au pouvoir", avance-t-il. Avant de s’interroger : "Saviez-vous que les autorités israéliennes avaient mis en circulation un timbre à l’effigie de Sarkozy, en pleine campagne électorale ?" Il ajoute : "Pourquoi Bernard Kouchner, une personnalité de gauche, a décidé de sauter le pas (en entrant au gouvernement) ? Cela ne s’est pas fait pour des croyances personnelles. C’était le résultat d’un mouvement qui reflète l’avis des véritables architectes de l’arrivée de Sarkozy au pouvoir, le lobby juif qui a le monopole de l’industrie en France."

L’article du "Figaro" (lire sur ce lien tant qu'il est actif) mentionne également les explications embarrassées de Mohamed Cherif Abbès, ainsi que les réactions (fort diverses) des partis politiques algériens : dans le climat de déliquescence qui caractérise la fin de règne de Bouteflika, on voit donc resurgir les vieux démons antisémites - vieux démons en vérité, et cela me rappelle ma dernière interview avec l’historien Benjamin Stora à propos de son livre "Juifs d’Algérie, les trois exils" : de manière encore plus nette que dans son ouvrage, il avait convenu que, oui, depuis l’origine du mouvement national algérien il y a eu en son sein une mouvance clairement antisémite, et cela dès les années trente et quarante ... une haine donc ancienne, recuite, sans aucune mauvaise conscience et qui permet des décennies plus tard de tels dérapages !

Le CRIF, pour sa part, a fermement réagi et j’ai plaisir à reproduire ci-dessous son communiqué :

Paris, 28 nov 2007 (AFP) - Le Conseil représentatif des institutions juives de France (Crif) s'est dit mercredi "écoeuré par les propos grossièrement antisémites" tenus par le ministre algérien des Anciens combattants, Mohamed-Cherif Abbès, et attend un "démenti sans ambiguité des autorités algériennes". Dans un communiqué diffusé mercredi, le Crif indique avoir "pris connaissance avec accablement" de ses propos. Le ministre algérien, dans des déclarations publiées par le journal El Khabar, a évoqué les "origines" du président Sarkozy, "attribuant son arrivée au pouvoir à l'action d'un lobby juif et s'est insurgé contre la venue du chanteur Enrico Macias (qui a renoncé à accompagner Nicolas Sarkozy, ndlr) en Algérie", rappelle le Crif. "De tels propos fomentent la haine envers les Juifs et visent à retarder toute tentative de réconciliation entre la France et l'Algérie", ajoute-t-il. Le Crif "attend un démenti sans ambiguité des autorités algériennes" et indique que "pour sa part, il ne renoncera pas à continuer d'approfondir le dialogue avec le monde musulman". Le président Sarkozy se rendra en Algérie en visite d'Etat du 3 au 5 décembre. Le chanteur pied-noir Enrico Macias devait l'accompagner mais a fait savoir qu'il renonçait à faire partie du voyage, estimant qu'il n'était pas le bienvenu dans le pays.

Mais cette réaction n'a pas été la seule, et bien heureusement la communauté juive ne s'est pas trouvée isolée dans cette affaire ...

Réactions du Parti Socialiste
Dans un communiqué, le socialiste Jean-Christophe Cambadélis demande de son côté l'annulation du voyage présidentiel. "Il est peu probable que le Général de Gaulle, François Mitterrand, voire Jacques Chirac eut passé outre de telles déclarations qui portent atteintes à l'autorité de la France", souligne le député parisien. A ses yeux, "la France ne peut accepter que l'on fixe sa conduite, ses délégations et sa ligne de conduite".
Sur RTL, le président du groupe socialiste à l'Assemblée nationale, Jean-Marc Ayrault, a estimé que Nicolas Sarkozy ne pouvait "pas aller à Alger sans obtenir avant des excuses". "Il ne faut pas laisser passer ce genre de choses", a-t-il fait valoir jeudi matin.
(Source : journal "Le Monde")

Réactions diverses
La Ligue des droits de l'Homme (LDH) s'est dite "scandalisée" par ces déclarations qui "témoignent de la résurgence des préjugés antisémites les plus nauséabonds" et "doivent être immédiatement désavoués".Le Mouvement contre le racisme et pour l'amitié entre les peuples (Mrap) a évoqué des propos "tout aussi inacceptables qu'irresponsables".Le président de la Ligue internationale contre le racisme et l'antisémitisme (Licra), Patrick Gaubert, député au Parlement européen, a affirmé qu'il n'était "pas surpris par ces déclarations à connotation antisémite" ajoutant que "l'Etat algérien et ses représentants sont coutumiers de ce genre de déclarations".Le président de la commission des Affaires étrangères de l'Assemblée nationale, Axel Poniatowski (UMP), a qualifié ces propos de "purement inqualifiables". "C'est à la fois grotesque, inutilement blessant, totalement déplacé et extrêmement grossier", a estimé le Député. "D'ici la visite de M. Sarkozy en Algérie, il nous faut des explications", a-t-il ajouté.
(Source : journal en ligne « 20 minutes »)

Enfin, "last but not least", lors de l’entretien télévisée qu’il a accordé hier soir à Arlette Chabot et Patrick Poivre d’Arvor - grands mercis à nos deux chaînes télévisées pour avoir soulevé ce sujet d’actualité, ce n’est pas tous les jours que la haine anti-juive venue du monde arabe est portée à la connaissance du grand public - Nicolas Sarkozy a évoqué son entretien téléphonique avec Abdelaziz Bouteflika ; et les explications (assez molles, sur le fond) de l’Algérie officielle, qui prend ses distances avec les propos de son ministre. "L'incident est clos" donc, pour notre Président.

J.C