Habib Kazdaghli
C'est une émission un peu particulière que je vais vous proposer dimanche prochain, parce que nous allons à nouveau parler de la vague de révolutions dans le monde arabe, mais nous le ferons avec une personnalité qui l'a vécue il y a quelques mois, et qui est engagée politiquement. Émission particulière, aussi parce que nous aurons notre invité au téléphone depuis Tunis, ce sera le professeur Habib Kazdaghli : ce n'est pas la première fois que j'aurais le plaisir de l'avoir dans cette émission, je l'avais reçu à deux reprises il y a plusieurs années, déjà, mais nous ne parlions pas du tout de politique tunisienne - sujet tabou sous le régime Ben Ali quand on était un opposant, ce qui était son cas -, mais du passé juif du pays. Il est en effet universitaire, professeur à l'Université de Tunis Manouba, et spécialiste de l'histoire des minorités. Membre actif de la "Société d'Histoire des Juifs de Tunisie", il est particulièrement sensible à la prospérité et à la sécurité de la minuscule communauté qui est là-bas, et nous avons eu beaucoup d'inquiétudes à propos d'incidents, plus ou moins graves, qui ont été enregistrés depuis la révolution. Nous en parlerons bien sûr au cours de cette émission, mais nous allons surtout essayer de comprendre ce qui s'est passé depuis le 14 janvier, jour de la fuite du Président Ben Ali.
Parmi les questions que je poserai à Habib Kazdaghli :
- Avez-vous été surpris d'abord par la chute, tellement rapide de l'ancien régime, et ensuite par cette vague révolutionnaire qu'a initiée le peuple tunisien dans tout le monde arabe ? On avait toujours eu l'image d'un peuple paisible, n'aimant pas les troubles, or c'est vous qui avez donné en quelque sorte du courage aux peuples égyptien, puis libyen et beaucoup d'autres pour se soulever : comment l'expliquer ?
- Nous voici maintenant avec un Président de la République par intérim, M. Fouad Mebazaa âgé de 77 ans et un Premier Ministre de 84 ans, M. Béji Caïd Essebsi : pensez-vous qu'avec l'instabilité que connait le pays depuis deux mois et demi, avec la crise économique, - due en particulier à l'arrêt du tourisme -, ils seront capables de mener le pays jusqu'aux élections ? Question connexe : tous les témoignages disent qu'il y a une insécurité dans beaucoup d'endroits, associée à une quasi disparition de la police : comment l'expliquez-vous ?
- A propos de la mouvance islamiste on a entendu des informations assez contradictoires : d'un côté, Rasheed Ghannouchi le leader du parti Ennahda est revenu à Tunis, accueilli à l'aéroport par des milliers de partisans, et on dit que dans beaucoup de mosquées, des imams font maintenant des prêches enflammés, contre l'Occident et la laïcité ; d'un autre côté, Ghannouchi fait des déclarations apaisantes, et il dit qu'il ne postulera aux élections présidentielles : est-ce que ce n'est pas "reculer pour mieux sauter" ?
- Quelles ont été les réactions de votre parti (le mouvement "Ettajdid"), et de la société tunisienne après la manifestation antisémite devant la Grande Synagogue de Tunis ? Vous avez participé au voyage à Auschwitz du 1e février dernier, qui a réuni des personnalités de plusieurs pays dont de nombreux Musulmans. Or malheureusement, l'agitateur Dieudonné - qui vient à nouveau d'être condamné pour antisémitisme, et qui avait reçu à son spectacle le célèbre négationniste Faurisson - a fait salle comble à Tunis il y a quelques jours. Et dans une interview sur la chaîne de télévision "Mosaiquefm", il a insulté Dominique Strauss Kahn, en le traitant de "candidat de Wall Street, sioniste et raciste" : qu'en pensez-vous ?
Une interview passionnante, que j'espère beaucoup de Tunisiens ou originaires de Tunisie suivront dimanche prochain ... ainsi que de nombreux autres !
J.C
J.C