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08 août 2011

"Pour Nawaf Salam" : un édito courageux dans la presse de Beyrouth !

Il n’y a pas de répression en Syrie et les droits de l’homme sont un label commercial brandi par l’Occident.

Écouter ces mots et partir d’abord d’un grand rire, beau et bienvenu. Les prises de position de Michel Aoun sont désormais tellement au-delà du réel, tellement impensables et incongrues que cela frôle le chef-d’œuvre : un perpétuel yoyo entre le délicieusement comique et l’extrêmement tragique. Lorsque l’ânerie politique atteint un degré pareil, une telle maîtrise, lorsqu’elle est aussi farouchement élevée au rang d’art de (sur)vivre, elle ne peut qu’être saluée. Sauf que très vite, la réalité explose. Nue. Le chef du CPL est un négationniste – d’un négationnisme bien archivé par/dans les oubliettes de l’histoire : un négationnisme purement milicien.
Que Michel Aoun en arrive là n’a malheureusement plus rien d’étonnant. Le vieux général est prisonnier de tout : de lui-même ; de ses contradictions ; des ravages de sa mégalomanie : sa baabdatite mortelle ; du Hezbollah, qui l’habille et le déshabille comme une poupée qui dit toujours oui ; de son antiharirisme carabiné... Mais que ses lieutenants, ces Boudu plus ou moins intelligents qu’il était jusqu’à peu encore possible de sauver, même in extremis, des eaux saumâtres dans lesquelles se noie allègrement un Courant patriotique libre qui n’a jamais aussi mal porté son nom, que ces Alain Aoun, Ghassan Moukheiber (aussi courageux, voire téméraire, soit-il parfois), ces Nehmetallah Abi Nasr, Chakib Cortbawi, Farid el-Khazen ou même Ibrahim Kanaan en soient réduits à se taire, ou cautionner, ou défendre ces dérives inouïes : c’est stupéfiant. Le gang des Assad et la barbarie à visage inhumain du régime syrien en ont rêvé. Les aounistes le font. Gratuitement.
Le Hezbollah, quelle que soit l’intensité de ses tendances suicidaires et, naturellement, le Baas et ce PSNS qui n’en finit plus de transformer Hamra en une microbanlieue sud, jouent leur survie politique. Soit. Mais les hommes du général ? Ils savent comme tout le monde que le changement est inéluctable en Syrie, que dans un mois ou dans un an, la dictature sera dynamitée. Comment traiteront-ils alors avec les futurs dirigeants de ce voisin très encombrant par définition que le peuple syrien aura élus, intelligemment ou pas mais avec beaucoup de soin ? Que diront-ils, ces hommes, à ces familles décimées par mille et un crimes contre l’humanité, par un implacable génocide ? Que diront-ils aux gens de Hama ? De Deraa ? De Homs ? De Deir ez-Zor ? Que diront-ils bientôt aux Aleppins et aux Damascènes ? Qu’ils ont eu peur du Hezbollah ? Qu’ils se sont trompés ? Qu’ils étaient prêts à tous les sacrifices pour mettre un Michel (Aoun) à la place d’un Michel (Sleiman) ? Qu’ils souffrent tous d’une naïveté implacable qui les a obligés de croire à la thèse du complot américano-sioniste ? Que diront-ils ? Qu’ils avaient raison, puisque les Russes Medvedev et Poutine, le Chinois Hu Jintao, l’Indien Manmohan Singh, la Brésilienne Dilma Rousseff et le Sud-Africain Jacob Zuma pensaient comme eux ?
Que diront aussi Michel Sleiman et, surtout, Nagib Mikati, qui ont exigé de cet homme d’honneur qu’est l’ambassadeur libanais au Palais de Verre, Nawaf Salam, de se dissocier de la déclaration présidentielle, un pet de fourmi mais un premier pas tout de même, votée hier à l’unanimité à l’ONU pour condamner l’usage de la force en Syrie ?
Rien. Ils ne diront probablement rien. Sauf qu’un jour, un tribunal, physiquement ou moralement, immanquablement les jugera, pour négationnisme ou pour cent et une complicités. Qu’ils soient avachis sur un lit d’hôpital ou pas.

Ziyad Makhoul
L'Orient Le Jour, 4 août 2011

P.-S. : il est atterrant de voir que les Ali Kanso et autres Nicolas Fattouche et consorts n’ont toujours rien compris aux médias libanais. Que même la cire rouge ne peut museler. Fraîchement parachuté dans son bureau du préhistorique ministère de l’Information, le pourtant prometteur Walid Daouk joue déjà rien moins que sa crédibilité. Et pas que politique.

Nota de Jean Corcos :
J'ai particulièrement apprécié cette attaque au vitriol du Général Aoun, ex-héros de la résistance libanaise devenu un des complices les plus abjectes du régime de tueurs de Damas : pour mieux connaitre son parti, le C.P.L, et apprécier sa haine anti-israélienne qui n'a rient d'étonnant, je conseille de visiter leur site à l'adresse http://rplfrance.org/