Celles et ceux qui me font la
gentillesse de me suivre, au moins de temps en temps, à la fois sur ce blog et
sur Facebook l’ont sûrement remarqué : je traite presque toujours l’actualité
avec plus de recul ici, réservant au réseau social mes sentiments « à
chaud » ; et encore, j’y suis moins réactif et passionnel que beaucoup !
La semaine dernière a été marquée
par la question des migrants, avec : l’odyssée de « l’Aquarius » ;
les premières décisions du nouveau gouvernement italien contre l’immigration ;
et – cela a choqué à juste titre énormément de gens – la mesure féroce des
autorités américaines, emprisonnant des immigrés mexicains clandestins ayant des enfants,
ces derniers étant séparés de force de leur famille. Sur ce sujet, lire
ceci .
Or, les réactions – ou non
réactions – à cette actualité enfoncent un coin entre les opinions en Israël et
dans la Diaspora, élargissant un fossé déjà trop large entre les deux piliers
du peuple juif. Cette situation m’inquiète, et je voulais partager ici des
réflexions déjà exposées sur ma page Facebook.
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Quelques mots d'explication d’abord sur la
divergence entre Israël et la Diaspora, qui risque de se développer de plus en
plus. En résumé : pour de nombreuses raisons, des gouvernements populistes et
élus, en particulier, pour contrer l'immigration, sont au pouvoir en Europe
comme aux Etats-Unis ; ils se montrent très favorables à Israël, en tout cas à
un moment où le gouvernement israélien le plus à Droite de son histoire est
plutôt mal vu par beaucoup de ses alliés occidentaux, en tout cas certainement
au niveau de leurs opinions publiques. L'opinion israélienne s'en réjouit, mais
en même temps ces mêmes gouvernements étrangers prennent des décisions qui
horrifient les opinions dans le monde entier ; et, en particulier, les
responsables des communautés juives qui restent attachées à certaines valeurs.
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Aux USA et face à la décision révoltante des
Autorités, les communautés juives américaines se mobilisent. Et la condamnation
de l'administration Trump est presque unanime, y compris dans les rangs des
Républicains. Lire
sur ce lien .
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Autre pays, autre gouvernement populiste.
Autant on peut comprendre la crainte de nos amis italiens d'être submergés par
la vague migratoire - le pays a accueilli sans aide européenne près de 600.000
migrants - autant certaines mesures sont abjectes, comme le
"recensement" des Roms, boucs-émissaires permanents, et qui rappelle
de bien mauvais souvenirs à la communauté juive. Mais le ministre de
l'Intérieur Matteo Salvini, responsable de cette politique-là, s'est manifesté
par des déclarations très favorables à Israël dans ses premières semaines de
fonction ! Voir
cet article .
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Sur toute cette actualité, pas de critique à
attendre de notre blogosphère juive française binaire et ossifiée : pour elle,
seul compte le soutien à ce gouvernement israélien, quoi qu’il fasse et quels
que soient les gouvernements qui le manifestent ; et vous pouvez compter
sur leurs sites pour ne pas en parler. En face, et quelles que soient les
menaces qui pèsent sur Israël - écrasement à coups de missiles par la
République Islamique d'Iran, terrorisme du Hamas et d'autres - vous pouvez
compter, pour ignorer ces autres sujets, sur la plupart des médias français,
présentant le Moyen-Orient comme une sorte de Disneyland qui serait gâché par
les deux seuls « vilains » répertoriés par tous les experts, Trump et
Netanyahou.
En résumé, les personnes de ma
sensibilité sont bien malheureuses : lisez la presse française, et vous
aurez la peinture de Donald Trump en monstre absolu, tout ce qu’il décide étant
détestable par définition, y compris des choses qui nous paraissent
raisonnables (en particulier, sa politique de fermeté vis-à-vis de l’Iran) ;
mais lisez la plupart des médias communautaires, et vous ne verrez jamais la
moindre dénonciation de ce qu’il fait, y compris le pire !
Plus grave encore, dans la
mesure où l’opinion israélienne est plutôt largement pro Likoud et pro Trump,
et où notre opinion publique communautaire se situe en majorité sur cette ligne-là,
une fracture profonde risque de séparer d’un côté les Français juifs et les Israéliens,
et de l’autre le reste de la Diaspora, à commencer par la puissante communauté
américaine.
J.C