Bataillon féminin kurde en Syrie
Nous allons reparler dimanche
prochain, à la fois des Kurdes et de la Syrie, puisque j’ai intitulé cette
émission : « Kurdes de Syrie, une guerre sans fin ». Mon invité
sera Allan Kaval. C’est un journaliste free-lance, qui a travaillé surtout sur
les politiques intérieures et extérieures de la Turquie et de l’Iran, et il a
été le correspondant du journal « Le Monde » à Erbil, capitale du
Kurdistan irakien. Autant dire qu’il est particulièrement connaisseur du monde
kurde, et il a séjourné aussi dans les zones contrôlées par leur armée en
Syrie. J’ai eu le plaisir de l’entendre à l’Institut Français des Relations
Internationales, et j’ai apprécié son regard que j’ai trouvé lucide sur cette
minorité, qui a connu peut-être un excès de gloire après un excès de mépris. En
effet, le peuple kurde a été très longtemps ignoré, à la fois par nos
gouvernements et par nos médias. Lorsque l’Etat islamique est apparu, courant
2014, leurs combattants les Peshmergas, ont été pendant un moment la seule
force au sol à leur résister sur le terrain, et tout le monde se souvient de la
résistance héroïque de Kobané, en Syrie près de la frontière turque : mais
que s’est-il passé depuis ? J’espère que cette interview permettra
d’éclairer nos auditeurs.
Parmi les questions que
je poserai à Allan Kaval :
-
Quel est le
nombre total de Kurdes en Syrie et où vivent-ils ? D’après ce qu’on peut lire,
la population du « Rojava » - ce qui veut dire en kurde
« l’Ouest » - est de 2 millions d’habitants, c’est la zone autonome
effectivement dominée par le parti autonomiste PYD : où se situe cette
région ? Et ses habitants sont-ils majoritairement kurdes ?
-
Quelle
était et qu’est devenue l’idéologie du parti, le PYD, qui encadre les
populations du Rojava : est-ce que c’est un calque du PKK, donc un parti
marxiste-léniniste ? Ou alors, a-t-il aujourd’hui toutes les vertus
démocratiques qui expliquent l’empathie actuelle des médias envers cette force
politique : tolérance envers les minorités, égalité hommes-femmes, autogestion,
etc.
-
Lors
du colloque à l’IFRI évoqué en introduction, vous nous avez dit que la
direction kurde du Rojava devait gérer maintenant trois contradictions :
pourriez-vous en dire plus à nos auditeurs ?
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Il
y a des rivalités de clans et des divergences idéologiques dans le peuple kurde.
En gros, on a l’impression que seul le PKK, né en Turquie et fortement implanté
dans la Diaspora en Europe, domine ses partis frères en Syrie et en Iran, mais
pas en Irak : est-ce exact ?
-
Que
s’est-il passé à Afrine, l’enclave la plus à l’Ouest des zones kurdes, tout
près de la frontière Nord ? On le sait, l’armée turque a envahi cette zone,
fait le siège de la localité pendant près de deux mois entre janvier et fin
mars. Qui a aidé sur place les Kurdes, qui ont quand même résisté pendant
longtemps ? Comment ont réagi les Russes, qui contrôlaient le secteur
depuis la chute d’Alep ? Et y a-t-il eu vraiment « épuration
ethnique » et « massacres » comme on l’a lu ?
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Que
va faire maintenant la Turquie ? Leurs dirigeants ont répété, à plusieurs
reprises, que l’objectif était l’enclave de Manbij, 100 kilomètres plus à
l’Est. Or là sont présents des centaines de conseillers militaires américains
aux côtés des Kurdes : Erdogan prendra-t-il ce risque-là ?
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Deux
coalitions s’affrontent indirectement en Syrie : « l’axe
chiite », armé par la Russie et qui comprend le régime syrien, les troupes
iraniennes, le Hezbollah et diverses milices chiites d’un côté ; le camp
occidental de l’autre, avec en gros les Kurdes soutenus par des troupes
spéciales des différents pays occidentaux. Le « verrou » kurde a empêché
qu’il y ait une véritable « autoroute » iranienne à travers la Syrie.
Que feront les Kurdes si les Occidentaux abandonnent le terrain ?
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On
a vécu une escalade très forte entre Israël et l’Iran ces dernières semaines,
la République Islamique essayant de s’installer militairement pour menacer par
ses missiles l’Etat hébreu, et ce dernier ayant fait des frappes préventives.
Ayant globalement gagné contre les rebelles, le régime syrien ne peut-il pas
souhaiter, dans le fond, le départ des Iraniens ?
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Il
y a eu neuf millions de personnes réfugiées en dehors du pays ou
déplacées d’une zone à l’autre : maintenant que la « Syrie
utile » a été reconquise, pourquoi ne reviennent-ils pas ?
La situation en Syrie devient terriblement
compliquée, et l’avenir des Kurdes bien incertain : soyez nombreux au
rendez-vous !
J.C