Dimanche prochain, nous
allons parler d'un nouveau livre, "A
la recherche d'un islam de France", publié aux Editions L'Harmattan, et j'aurai
le plaisir de recevoir son auteur, Gérard Fellous. Gérard Fellous a été très longtemps
journaliste dans différents médias, et cela se sent dans cet ouvrage car il a
su chercher et trouver une impressionnante documentation. Mais, surtout, il a
été pendant plus de vingt ans le Secrétaire général de la Commission nationale
consultative des droits de l'homme ; et à ce titre, il a suivi de très près les
problèmes sociétaux posés à la République, et en particulier ceux qui touchent
à la symbiose entre les religions et la société civile, avec bien sûr les
enjeux et menaces pour la laïcité. L'émergence de la religion musulmane,
devenue en quelques décennies la deuxième de France, et les relations entre l'islam et la République
ont suscité un nombre infini de prises de position, décisions alternativement de
la Droite et de la Gauche, rapports, enquêtes, bref un empilement de données au
fil des années et une situation mouvante sur laquelle il était temps de faire
un point. Son livre le fait, longuement puisqu'il représente près de 450 pages
pour les deux tomes réunis ; mais il venait à point nommé alors que le
précédent état de lieux "Les musulmans en France" de Bernard Godard
et Sylvie Taussig" date de 2007, et que, bien sûr il s'est passé beaucoup
de choses depuis. Nous allons donc
parler dimanche prochain du premier tome de cet ouvrage, sous-titré "le
profil de la deuxième religion, méconnue des Français" ; et puis, dans la
prochaine émission on évoquera les relations, souvent compliquées, de l'islam
de France avec l'Etat laïc.
Parmi les questions que je
poserai à Gérard Fellous :
-
En ce qui concerne les chiffres, on est un
peu perdus : la démographe Michèle Tribalat parle de 4 millions de Musulmans en
2008, soit environ 6% en pourcentage, chiffre repris par des enquêtes en 2011.
Mais alors pourquoi le Recteur Boubakeur, réclamant la construction de 2000
mosquées en deux ans au rassemblement de l'UOIF en avril 2015, a-t-il parlé de
"7 millions de Musulmans" ? Comment appréhender ces populations,
alors qu'il est interdit en France de faire des statistiques ethniques ou
religieuses ? Est ce que cette impression d'expansion démographique, n'est pas
liée à une pyramide des âges est très différente pour les Musulmans que pour le
reste de la population, et à une immigration continue ?
-
Pour 78 % des Musulmans, leur religion occupe
une place importante dans leur vie, alors que ce n'est le cas que pour 24 % des
Catholiques. Par ailleurs, vous donnez un certain nombre d'indicateurs qui
montrent que, depuis 25 ans, la religiosité chez les Musulmans a augmenté :
est-ce que c'est un phénomène national, ou plutôt concentré dans certains
quartiers et cités ? Est-ce que cela correspond à un vrai renouveau de la
pratique religieuse ou plutôt à une affirmation identitaire, de causes diverses
? Et enfin, cela concerne-t-il les Femmes comme les Hommes ?
-
Le nombre de lieux de culte musulmans a
doublé en 20 ans, il y en a maintenant environ 2300, la majorité n'étant pas
d'ailleurs des Mosquées à proprement parler avec une grande surface et une
architecture visible. Comment les financer ? Connait-on le pourcentage de fonds
venus de l'Etranger, et en particulier de pays dont l'idéologie est peu
compatible avec les valeurs de notre République, comme le Qatar ou l'Arabie
Saoudite ? Et enfin pourquoi les Français musulmans n'arrivent-ils pas à
financer eux-mêmes leur culte, comme le font les Juifs par exemple ?
- Vous consacrez près de 50 pages aux mouvances
musulmanes les plus éloignées des valeurs de notre République : vous partez de
l'UOIF pour parler, au final, des centaines de jeunes partis faire le Djihad en
Syrie. Est-ce que, d'après vous, les "agendas politiques" des proches
des Frères Musulmans et des djihadistes sont les mêmes et ne diffèrent que par
leur stratégie ? Ensuite, en ce qui concerne le Salafisme, on sait que le
nombre de lieux de culte qu'ils contrôlent a doublé ces dernière années : sont-ils
tous des antichambres de la violence ?
-
Votre livre s'achève par l'évocation d'un
certain nombre d'intellectuels musulmans ou d'associations qui se sont exprimés,
ces dernières années, en faveur d'une réforme théologique, et d'une nécessaire
adaptation au contexte français de la laïcité : Abdenour Bidar, le regretté
Abdelwahab Meddeb, Ghaleb Bencheikh, Malek Chebbel et d'autres. Mais quelle est
leur réelle influence ?
Une discussion qui promet
d'être passionnante ... soyez nombreux au rendez-vous !
J.C