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Un particulier met en place un fonds de soutien pour les femmes en niqab verbalisées dans la rue. Il compte ainsi payer toutes leurs contraventions de 150 euros.
Le projet de loi destiné à interdire le port du voile intégral doit être adopté mardi par les députés. Le texte devra ensuite être examiné par le Sénat en septembre prochain. Même si un délai de six mois doit être consacré à la médiation et à l'explication du texte, les amendes, d'un montant de 150 euros, pourront commencer à tomber à partir du mois de septembre pour toute personne portant un niqab dans l'espace public, et à fortiori dans la rue.
Dans ce contexte, un ancien candidat malheureuxà la candidature à l'élection présidentielle de 2007 (ndlr : faute de parrainages suffisants, il avait dû abandonner), Rachid Nekkaz, annonce la création d'un fonds pour financer toutes les amendes des femmes verbalisées pour ce motif dans la rue. Sa position se rapproche de l'avis du Conseil d'Etat, qui s'est en effet prononcé défavorablement au mois de mai, à titre consultatif, estimant qu'une interdiction générale serait «exposée à de fortes incertitudes constitutionnelles et conventionnelles».
Patron d'une agence immobilière, Rachid Nekkaz adhère au Parti socialiste depuis fin 2009. Pour l'instant, le parti ne commente pas son initiative.
Lefigaro.fr : Comment avez-vous procédé pour créer ce fonds ?
Rachid Nekkaz : J'ai créé l'association «Touche pas à ma Constitution». Avec ma femme, nous avons tout simplement ouvert un compte sur lequel nous avons déjà viré la somme de 200.000 euros. D'ici au mois de septembre, il y aura un million d'euros de disponible pour les femmes sanctionnées pour avoir porté le niqab dans la rue. Pour réunir cette somme, je vends des biens immobiliers dont je suis propriétaire en banlieue parisienne. Et par ailleurs, je reçois beaucoup de contributions de la part de particuliers. En 24 heures, depuis la parution d'une dépêche Agence France Presse, j'ai eu 36.000 euros de fonds supplémentaires. J'insiste, je ne suis soutenu par aucune organisation et les fonds que je reçois ne proviennent que de particuliers.
En pratique, comment allez-vous aider ces femmes ?
Nous avons relayé l'information sur tous les sites de soutien à leur cause pour qu'elles soient au courant de notre démarche. Elles n'auront ensuite qu'à nous envoyer leur amende et, comme cela n'est pas encore interdit, nous enverrons un chèque à leur place. Toutes les amendes qui nous seront envoyées pour ces cas précis, seront intégralement payées.
Votre soutien s'arrête aux femmes qui portent le niqab dans la rue. Pourquoi ?
Je suis favorable à l'interdiction du port du voile intégral dans les lieux publics mais je considère, à l'image du Conseil d'Etat, que l'interdire dans la rue est une violation des principes constitutionnels. Notre objectif est donc de lutter contre ce que j'appelle la «délinquance présidentielle» qui consiste à imposer des principes illégitimes. Nous empêcherons donc la mise en application de cette loi anticonstitutionnelle. Dans une démocratie, la liberté, c'est sacré.
Qu'est-ce qui motive votre combat ?
Je suis un homme de convictions. Et je pense réellement que le principe de verbaliser le port du niqab dans la rue est la porte ouverte à toutes les interdictions. Après ce sera la kippa, puis pourquoi pas la soutane, ou les homosexuels qui seront stigmatisés…
Avez-vous reçu des soutiens ?
Nous avons envoyé des fax aux 36.000 maires de France. Pour l'heure, 1.342 nous ont apporté leur soutien. Sur ce total, plus de 750 sont au Parti socialiste, les autres sont sans étiquette, ou bien divers droite. On espère que notre initiative sera de plus en plus connue et reconnue.
Charlotte Menegaux
Le Figaro, 12 juillet 2010