Exhumation de corps trouvés dans un charnier en Irak, source : http://www.massgraves.info/
Saddam Hussein sera jugé le 19 octobre prochain, dans son premier procès pour « crime contre l’humanité ». Espérons que cela rafraîchira la mémoire du grand public français, qui - quels que soient les critiques justifiées vis-à-vis de l’intervention américaine ou de sa gestion des affaires irakiennes - semble regretter la fin du régime baasiste. Les auditeurs de "Rencontre" ont pu entendre de nombreux invités critiquer tout à fait librement la politique de Georges W. Bush, mais j'ai aussi régulièrement veillé à un rappel du passé monstrueux de Saddam. Un ouvrage collectif de référence, donnant la compilation de ses crimes vient de paraître ("Le livre noir de Saddam Hussein", Oh ! Editions) : je ne peux que conseiller à tous les amnésiques de le lire d’urgence !
La mémoire est en effet volatile lorsqu’elle ne s’abreuve qu’aux reportages des journaux télévisés du 20 heures. Une journée ordinaire en Irak, ce sont aujourd’hui des attentats-suicide en série, et les commentateurs s’attardent alors sur l’impuissance du tout jeune gouvernement à rétablir la sécurité. Constat exact, mais qui manque singulièrement d’empathie pour un nouveau pouvoir issu d’élections démocratiques - et qui doit résister au terrorisme islamiste d’Abou Moussab Al-Zarkaoui, lieutenant de Ben Laden. Constat aussi bien méprisant pour les milliers de victimes civiles : on oublie facilement que ces attentats sont d’abord des assassinats de masse particulièrement abjects et racistes, puisqu’en sont victimes en majorité non les troupes d’occupation, mais les populations chiites ou kurdes martyrisées par le régime précédent. Constat hypocrite, enfin : car si ces victimes là sont visibles, si le terrorisme subversif tue au grand jour en jouant des médias comme de marionnettes faisant sa publicité, le terrorisme d’état, lui, tue en silence lorsqu’il tient dans ses griffes un pays où toute presse libre est interdite et où les médias étrangers ne peuvent venir. Saddam Hussein et son régime fasciste sont responsables de l’assassinat de centaines de milliers d’irakiens, mais à l’époque ils sont morts en silence, souvent enlevés à leur famille, emprisonnés puis exécutés un jour dans le plus grand secret.
On a retrouvé après sa chute quelques dizaines de sites où reposent des milliers de restes humains, et le malheureux Irak n’a pas encore fait le bilan de trente ans d’un des plus cruels totalitarismes de l’Histoire. Mais de cela, les télévisions ont très peu parlé. Un clic sur le site "massgraves"info (charniers) vous permettra de découvrir des photos qui donnent la chair de poule. Vous pourrez enfin lire ici un article sur le sujet publié dès le mois de mai 2003 dans le journal « Le Monde ».
J.C