Mina Mangal, militante féministe assassinée
L'ex-journaliste et militante des droits des femmes
Mina Mangal a été assassinée, samedi, à Kaboul, alors qu'elle se rendait à son
travail au Parlement. Sa mort provoque l'indignation des activistes féministes
du pays.
Deux individus armés ont tué de neuf balles Mina
Mangal, ancienne journaliste de télévision et conseillère auprès du Parlement afghan,
samedi 11 mai, dans les rues de Kaboul.
Mina Mangal, qui a notamment travaillé pour la chaîne
de télévision Ariana News, a été tuée près de son domicile dans l'est de la
capitale afghane, a précisé le porte-parole de la police Basir Mujahid. Lorsque
le drame a eu lieu, elle se rendait à son travail de conseillère de la
commission des affaires culturelles du Parlement.
On
ignore le mobile du meurtre et celui-ci n'a pas été revendiqué. Cependant, un
autre porte-parole de la police de Kaboul, Ferdous Farahmarz, évoque une
dispute familiale.
Des
hommages sur les réseaux sociaux
L’annonce
du meurtre a provoqué l’indignation parmi les collègues de Mina Mangal ainsi
que des militantes des droits des femmes. Plusieurs messages de colère et de
tristesse ont fleuri sur les réseaux sociaux. Une de ses collègues, la députée
Shagufa Noorzai, a déclaré que sa mort faisait partie d'une série inquiétante
de féminicides dans les rues de Kaboul.
"#Farkhunda
a été brûlée vive, #BabyMahsa a été kidnappée, violée et tuée, #BibiAyesha a eu
son nez coupé, des femmes sont lapidées et aujourd'hui #MinaMangal a été
atteinte de neuf coups de feu. Tous ces crimes ont eu lieu en journée et dans
la zone verte de la capitale #Kaboul. #Cessezdetuerlesfemmes", a tweeté la
parlementaire
#Farkhunda
was burned to death, #BabyMahsa
was kidnapped, raped & killed, #BibiAyesha
nose was cut, Women got stoned and today #MinaMangal
shoot 9 times. All these crimes took place mainly during the day & mainly
in the green zone capital city of #Kabul.
#StopKillingWomen
pic.twitter.com/shVU7bpolZ
Shagufa Noorzai (@Shagufa_Noorzai) 11
mai 2019
La célèbre activiste féministe Wazhma Frogh s’est
fendue d’un post sur Twitter où elle explique que la journaliste s’était
récemment plainte de menaces et qu’elle s’estimait en danger : "À cause de
la perte de cette belle âme, je ne peux plus arrêter mes larmes. Elle avait une
voix forte et elle l'élevait pour son peuple. Dans ce statut Facebook, elle
disait qu'elle était menacée et qu'elle avait confiance en Allah, qu'une femme
forte ne doit pas avoir peur de la mort. Repose en paix Mina Mangal",
a-t-elle écrit.
Can’t stop my tears at the loss
of this beautiful soul. She had a loud voice, & actively raising voice for
her people. In this Facebook status she says she’s threatened & she says she
she trusts her Allah & that a strong woman isn’t scared of death. RIP Mina
Mangal pic.twitter.com/plsoYJlPlA
"Dans
un pays où, en tant que journaliste, ma vie est en danger, je ne veux pas que
le gouvernement se montre reconnaissant pour notre travail mais qu'il se
concentre sur les moyens de nous protéger", a déclaré sur Facebook Zalma
Kharooty, journaliste à Lemar TV, chaîne pour laquelle Mina Mangal avait
également travaillé.
Inquiétude sur le retour des Talibans au gouvernement
Ce
meurtre intervient alors que la question du droit des femmes est au centre des préoccupations en
Afghanistan car les États-Unis ont prévu de se retirer prochainement du pays.
Ils ont entamé l'été dernier des discussions directes avec les Taliban, qu'ils avaient
chassé du pouvoir en 2001.
Le
retour des insurgés à la tête du pays pourrait signifier un retour en arrière
pour la condition de la femme dans le pays. Durant leur règne de 1996 à 2001,
les Taliban empêchaient les filles d'aller à l'école, ils exécutaient les
femmes sur de vagues soupçons d'adultère et ils interdisaient une presse libre,
la musique et bien d'autres libertés fondamentales.
Aujourd'hui
encore, l'Afghanistan reste le second pays au monde où il est le plus dangereux
d'être une femme, selon le classement 2018 de la fondation Thomson Reuters.
Les Afghanes souffrent d'un accès extrêmement limité à l'emploi, à la propriété
ainsi qu'aux soins médicaux. Elles sont les victimes à la fois du conflit qui
ravage leur pays et de violences domestiques.
Selon l'organisation Reporters sans frontières (RSF),
l'Afghanistan est aussi le pays le plus dangereux pour exercer la profession de
journaliste. Soixante reporters et employés de médias ont été tués depuis
l'invasion américaine de 2001. Dix-huit d'entre eux ont été tués au cours de la
seule année 2018.
Romain Houeix,
France 24.com, 13 mai 2019
Avec Reuters