Décidément, l'actualité du
monde musulman vient régulièrement bousculer les programmations que l'on
aimerait préparer à l'avance ...
Bien sûr, ce modeste blog
n'est pas un journal. Mais il est des circonstances qu'on ne peut ignorer : si
la barbarie djihadiste est rentrée, pour un long moment et depuis quelques
décennies dans le "paysage" de nos vies - j'y reviendrai plus loin -,
la France dans ses profondeurs a été pendant longtemps comme anesthésiée, se
réveillant de temps en temps lorsque la terreur frappe de façon spectaculaire
comme le 11 septembre 2001 pour être aussitôt oubliée. Or cette fois-ci le choc
a été immense, même s'il y a eu une seule victime, même si cela ne s'est pas passé
en France mais en Algérie : les conditions atroces de l'assassinat d'Hervé
Gourdel, enlevé, menacé de mort puis assassiné bestialement comme plusieurs
occidentaux avant lui - égorgé puis décapité devant une caméra - ont glacé
d'effroi nos compatriotes ; tout le monde a compris qu'il avait été tué non pas
pour ce qu'il avait fait mais pour ce qu'il était, un Français, et il faut
rendre hommage à François Hollande de l'avoir dit du haut de la tribune de
l'ONU ; tué donc dans cette même "logique" de quasi génocideurs, qui
tuent toute incarnation de "l'autre", le Sunnite ne leur faisant pas
allégeance, le Chiite, le Kurde, le Yézidi, et bien entendu le Chrétien ; tué
comme une première victime symbolique de cette guerre que la France a eu le
courage de rejoindre (la première parmi les autres nations européennes, mais
les autres suivent petit à petit), contre le "Califat islamique" qui,
en vérité, l'avait déjà déclaré à tous les pays civilisés avec ses rêves fous de conquête du monde.
Normalement, un article
"in memoriam" rend hommage à une personne disparue, mais qu'ajouter à
ce que plusieurs articles ont dit à propos de ce guide de montagne réputé,
certainement idéaliste, courageux et si éloigné de la géopolitique de notre
époque, puisque ne craignant pas d'aller dans une Kabylie pourtant infiltré par
des maquis islamistes depuis un moment ? Disons donc que j'associe à son
souvenir toutes les victimes, déjà innombrables du terrorisme, victimes passées
et hélas à venir, car il y en aura beaucoup en France et ailleurs.
Figure symbolique de
"l'acte I" de cette guerre, Hervé Gourdel aura au moins suscité la
première manifestation de Musulmans contre la folie djihadiste vendredi
dernier, devant la Grande Mosquée de Paris (lire
ici) ; une réaction que l'on regrette de ne pas avoir vécu au moment de
l'assassinat, également atroce, de l'école Ozar HaTorah à Toulouse le 19 mars
2012 ; et qui hélas, par son ampleur, n'a pas du tout égalé les foules venues
manifester en soutien au Hamas dans les rues de Paris et en Province, il y à
peine deux mois : première raison, donc, de ne pas être amnésique.
Mais il y a aussi une autre
raison de ne pas jouer aux amnésiques : comment oublier que le premier attentat
purement islamistes contre la France a eu lieu il y a près de 31 ans, quand des
dizaines de parachutistes français de la "Force multinationale de maintien
de la paix" furent tués d'un coup par une attaque kamikaze - déjà - du
Hezbolllah ? Comment oublier les attentats des années 1980 dans les rues de
Paris et les premières prises d'otages, quand l'Iran voulait contraindre notre
pays à cesser son soutien à l'Irak, à l'époque "allié fréquentable" ?
Puis ceux suscités par la guerre civile en Algérie dans les années 1990 ? Comment
oublier les attentats également d'origine arabe, mais cette fois directement
réalisés par des terroristes palestiniens, devant la Synagogue de la rue
Copernic en 1980 puis deux ans plus tard rue des Rosiers ? En vérité, notre
opinion publique a systématiquement refoulé l'horreur du terrorisme alors même
que de nombreux Français en avaient été les victimes. Elle se réveille avec
cette guerre contre le Daesh, et alors que cette fois la terreur risque de
devenir incontrôlable sur notre propre territoire, avec le retour de centaines
de djihadistes fanatiques de Syrie ou d'Irak.
Je reprendrai donc les prochains jours des articles vous parlant de uniquement de cette guerre là, à l'exception de la présentation de ma prochaine émission, demain lundi. Et en publiant aussi
un peu plus tard - et hélas - un papier personnel sur les nouveaux délires complotistes
suscités par la mort du malheureux Hervé Gourdel.
Jean Corcos