Nicolas Tenzer
Avec une actualité française très
lourde depuis six mois maintenant, les affaires internationales sont presque
totalement oubliées par nos chaines de télévision. C’est le cas, en
particulier, de l’affreuse guerre civile qui continue en Syrie depuis huit ans.
Peu d’experts sont invités à en parler, beaucoup nous disent maintenant que le
régime Assad a définitivement gagné, et que l’on a eu tort de soutenir
l’opposition. J’aurai le grand plaisir de recevoir la semaine prochaine Nicolas
Tenzer, un intellectuel et universitaire qui lui, a le courage d’aller à
contre-courant de cette ligne. Pour le présenter rapidement, il a d’abord eu
une formation brillante – Ecole Normale Supérieure, Sciences Po Paris, Maitrise
d’Histoire, Ecole Nationale d’Administration – ce qui l’a conduit à faire une triple carrière :
d’abord administrative, en particulier dans des cabinets ministériels ;
académique, avec des missions pour l’Union Européenne, et des cours donnés dans
des Grandes Ecoles et dans des Universités Etrangères ; et enfin, il
dirige un Think Tank qu’il a fondé, le « Centre d’Etudes et de Réflexion
pour l’Action Politique », CERAP. Il a donc une vision globale des
évènements internationaux, ce qui certainement intéressera nos auditeurs.
Parmi les questions que je
poserai à Nicolas Tenzer :
-
Quel est aujourd’hui le bilan humain de la
guerre en Syrie ? Et est-ce qu’on peut dire que, après avoir reconquis peu
à peu pratiquement tout le territoire dit « utile » - d’abord Homs et
Hama, puis Alep, puis la Ghouta dans la banlieue de Damas, puis Deraa dans la
zone frontalière du Golan – le régime a déjà gagné ?
-
Le dernier réduit de la rébellion est celui
d’Idlib, au Nord-Ouest du pays. Dans un article publié par le site « The
conversation » le 17 mars, vous notez que les yeux se détournent de la
tragédie qui peut maintenant arriver là-bas. Là-bas vivent encore trois
millions d’habitants : que se passe-t-il actuellement ? Que risqueront
les civils quand l’armée d’Assad arrivera ? Et la milice islamiste qui
contrôle largement cette zone n’est-elle pas aussi responsable
d’exactions ?
-
Vous vous engagez totalement aux côtés de
l’opposition syrienne et malheureusement votre position devient minoritaire
ici. On a l’impression que, en l’espace de quelques années, le soutien au
régime Assad qui se limitait en 2011 à l’extrême-droite et aux complotistes
pro-Poutine s’est répandu presque partout : pourquoi, à votre avis ?
-
Concernant la politique israélienne au cours de
cette guerre civile, on sait qu’il y a eu une aide humanitaire avec des
nombreux blessés accueillis et soignés. Mais le principal souci reste
l’implantation iranienne, on sait qu’il y a eu des centaines de raids aériens,
Netanyahou utilisant ses bonnes relations avec Poutine pour éviter des
incidents avec l’armée russe ; qu’en pensez-vous ?
-
Se pose aussi la question de la reconstruction
du pays, maintenant que les zones les plus peuplées ne sont plus des terrains
d’affrontement. Plusieurs villes sont à moitié détruites, on chiffre à 400
milliards de dollars le coût gigantesque de leur reconstruction, or ni les
Etats-Unis, ni l’Europe ne veulent s’engager car ce serait entériner la
victoire du régime. En même temps, Assad a quasiment fait un nettoyage ethnique
avec les millions d’opposants potentiels qui ont fui : les laissera-t-il
revenir ? Que faire dans ces conditions ?
-
La Russie vous inquiète, pas seulement au
Moyen-Orient. Dans un article publié dans le « Huffington Post » le 4
mars, vous dite qu’il faut lever « l’opposition classique entre une Europe
fondée sur le droit et l’Europe puissance ». Et vous dites aussi qu’il
faut désigner l’ennemi, la Russie de Poutine qui représente « un danger systémique
majeur » : sur quoi vous fondez-vous pour dire cela ?
Un invité de qualité, un sujet géopolitique
majeur : soyez nombreux à l’écoute !
J.C