Batterie "Dôme d'acier" dans le Sud d'Israël
Que de métaphores métallurgiques pour évoquer un évènement majeur survenu pendant ma pause sur le blog ! Il s'agit, vous l'avez compris, d'évoquer la grave tension à Gaza et dans le Sud d'Israël et qui a failli provoquer un embrasement généralisé.
"Dôme d'acier", c'est le système anti-missile contre les Grads, Kassams et autre roquettes à courte portée (quelques dizaines de kilomètres), de conception et de fabrication totalement israélienne : il a connu son baptême du feu, on le sait, en fin de semaine dernière, lorsque 8 missiles ont été interceptés alors qu'ils allaient s'abattre sur des zones d'habitation des grandes villes du Sud (Beersheba, Ashdod, Ashkelon) ; génie du système, les missiles intercepteurs "Tamir" ne sont lancés que contre les roquettes potentiellement dangereuses, le radar associé et une informatique de pointe analysant toutes les trajectoires - y compris celles des "entrants" non dangereux. Événement historique, c'était la première fois dans l'histoire militaire qu'une telle interception était réussie.
"Plomb fondu", c'est l'opération militaire contre Gaza entre décembre 2008 et fin janvier 2009, opération qui a été un succès tactique - puisque les bombardements massifs du Hamas avaient ensuite quasiment cessé pendant plus de deux ans ; mais un échec politique, dans la mesure où le Califat islamique de Gaza avait non seulement réussi à s'accrocher au pouvoir, mais à manipuler l'opinion publique mondiale contre Israël, grâce à des opérations médiatiques sponsorisées soit par l'ONU (la commission d'enquête Goldstone), soit par la Turquie (la fameuse affaire de "la flottille"). Illustration implacable des "guerres asymétriques", de simples images de télévisions viennent à chaque opération faire oublier qu'elles sont défensives ; et souligner une inégalité "du faible au fort", censée lier les mains à l'état juif et le condamner à mourir à petit feu ... En bref, Israël pouvait se lancer dans un "plomb fondu numéro deux", mais cela aurait été fort coûteux en vies humaines et en dommages politiques.
"Infos laminées", c'est le voile de silence qui aura recouvert ces évènements : faites le test de taper sur "Google", "Dôme d'acier + "Le Monde" (ou + "Le Figaro") : vous tomberez sur des articles anciens, aucune dépêche n'ayant titré sur l'évènement et sur ces profondes répercussions militaro-stratégiques. Certes, en remontant dans les archives de la presse nationale, on pourrait retrouver une évocation de ce qui s'est passé, mais manifestement - et sans faire preuve de délire de la persécution - on peut dire que ce genre d'évènement agace les grandes rédactions, comme toute réalisation positive de l’État juif. Lesquelles se sont montrées tellement bavardes dans le passé, pour nous raconter qu'avec ce genre d'armements le Hezbollah et le Hamas étaient devenus imbattables !
Alors, privilège de l'âge, ceci me fait penser à d'autres évènements, vieux de presque quarante ans ... La guerre du Kippour (octobre 1973) avait réservé bien des mauvaises surprises à Israël, la première étant les missiles anti-aériens de fabrication soviétique qui allaient mettre au tapis plus de cent de ses appareils. Le temps de mettre au point diverses contre-mesures embarquées, et l'aviation de Tsahal allait réaliser un quasiment "sans fautes" lors de la guerre du Liban en 1982, tenant en échec les batteries syriennes. Seulement déjà - et comme c'est étrange, n'est-ce pas ? - la majorité des reportages firent une impasse totale sur le succès israélien, se montrant d'autant moins bavards qu'ils avaient été lyriques en racontant ses déboires neuf ans plus tôt !
Bien sûr - et mes lecteurs et auditeurs fidèles le savent bien - je m'efforce, aussi, de toujours rester lucide et réservé : on l'aura lu dans la presse israélienne, le pays n'est pas encore couvert par des batteries anti-missiles. Il en faudrait treize pour protéger à la fois le Nord, le Sud, et les bases stratégiques à proximité des frontières. Il faudra au moins un an et demi pour que leur nombre passe de deux à quatre, mais le Hezbollah, surtout, peut-être tenté de déclencher une pluie de missiles AVANT, alors qu'il en a des dizaines de milliers en réserve.
Tout peut donc arriver, même le pire, mais ce succès est quand même à la fois merveilleux et inespéré, et invite au moins à l'espérance. J'ai eu le grand bonheur de faire une très belle émission avec Michel Gurfinkiel dimanche dernier. Dans la conclusion de son dernier ouvrage ("Israël peut-il survivre ?", Editons Hugo et Cie), il écrit : "On a toujours sous-estimé la résilience d'Israël. J'ai conservé dans un tiroir les plus beaux contre-sens commis à ce sujet par mes confrères et par les politiques d'ici et d'ailleurs pendant près de quarante ans : livres, articles, documents télévisuels (...)".
Jean Corcos
Jean Corcos