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04 juin 2017

La main d'Erdogan dans les urnes de France : 68 candidats du PEJ aux législatives



Qui souhaite « la création d'un organe communautaire chargé de surveiller le processus législatif » ? Qui veut combattre « le positionnement libertin de la société française pour pouvoir revenir à la cellule familiale traditionnelle » ? Qui ne tarit pas d'éloges sur le régime d'Ankara et d'invectives contre les derniers opposants à Recep Tayyip Erdogan ? C'est le Parti égalité justice (PEJ), fondé en 2015 à Strasbourg et qui présente 68 candidats aux législatives dans toute la France.
De Valenciennes à Marseille, cette drôle d'officine investit barbus et voilées en réclamant la refonte de la loi de 1905 sur la séparation de l'Eglise et de l'Etat au nom des « accommodements raisonnables concernant les musulmans ». Une tarte à la crème par les temps qui courent. Mais hautement toxique. Les responsables de cet intéressant groupuscule fustigent « un petit lobby influent d'homosexuels », faute sans doute de ne pouvoir encore les fouetter en accord avec la charia qui devrait dicter l'agenda de leurs candidats. Autant dire que la pêche aux voix du PEJ se pratique en eaux très troubles, islamistes et turco-compatibles.

Strasbourg a été transformé en "laboratoire politique de l'AKP"

En 2015, déjà, lors des élections départementales, le nouveau parti avait inscrit « le communautarisme comme une priorité ». Il se drapait dans le voile innocent de la « lutte contre l'islamophobie », un concept dont on sait ce que Marianne pense ! Sa bête noire était l'ex-jeune adjointe au maire de Strasbourg, Mine Günbay : chargée des droits des femmes, elle dénonçait sans peur et sans relâche la métamorphose de la ville en « laboratoire politique de l'AKP » (le parti d'Erdogan). Strasbourg où Erdogan est venu faire son show électoral en octobre 2015 en toute légalité ! Effectivement, le Parti égalité justice est étroitement lié au Conseil pour la justice, l'égalité et la paix (Cojep), une ONG internationale qui constitue, partout où elle s'implante, le relais de l'AKP.
Forte de 600 000 membres en France, la communauté turque est l'objet de toutes les convoitises. D'où le cri d'alarme lancé par le Parti communiste, le seul jusqu'ici à s'émouvoir de l'émergence du PEJ. « Par l' intermédiaire du Parti égalité justice, le président Erdogan entend peser sur les élections législatives françaises afin de créer des groupes de pression pour relayer sa politique dictatoriale qui écrase les libertés et les droits humains dans son propre pays », s'insurge le PC, qui appelle le ministère de l'Intérieur à diligenter une enquête « pour défaire cette manœuvre contre la démocratie et la République ». A bon entendeur…

Martine Gozlan
Marianne, 19 mai 2017