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23 août 2009

Le procès de Lubna Ahmed Hussein suscite colère et émotion en Tunisie

La journaliste soudanaise Lubna Ahmed Hussein

Le procès de la journaliste soudanaise Lubna Ahmed Hussein suscite colère et inquiétude chez de nombreux Tunisiens, qui craignent d'y voir le signe d'une montée de l'extrémisme religieux au Maghreb. Étudiants, journalistes et citoyens de la rue font part de leur inquiétude après la condamnation de Hussein, qui risque quarante coups de fouet si elle est reconnue coupable d'avoir porté des pantalons et d'avoir ainsi "offensé la décence publique" aux termes du Code pénal soudanais. Elle avait été arrêtée le 3 juillet dernier dans un restaurant de Khartoum en compagnie de dix-huit autres femmes, après que la police fut arrivée et eut vérifié la manière dont elles étaient habillées.

Le procès de la cette journaliste, Lubna, pose le cas de chaque femme arabe. Elle n'est qu'un exemple, parmi des milliers de femmes qui souffrent de discrimination et de violence dans les sociétés arabes qui les empêchent d'exercer leurs droits les plus fondamentaux. Les milieux laïcs sont choqués par l'idée de punir une fille ou une femme parce qu'elle porte des pantalons, ou par l'idée d'interférer dans les libertés personnelles. Des textes religieux dominent encore la vie publique et politique dans les sociétés arabes. C’est un désastre réel de voir une telle situation se produire au XXIe siècle. La perception que les droits des femmes sont en jeu, et que ce procès est lié à l'extrémisme religieux dans la région continue d'alimenter les conversations à Tunis. Cette affaire en dit long sur les extrémistes et les réactionnaires au Soudan qui ne respectent ni les droits de la femme, ni sa condition. Cette affaire s'est transformée en une affaire d'opinion publique en Tunisie et a attiré beaucoup de sympathisants, hommes et femmes, et des militantes des droits des femmes, en particulier parce que cette journaliste travaille comme journaliste pour les Nations Unies.

Le tribunal islamique soudanais a décidé, mardi 4 août, d'ajourner le procès au 7 septembre prochain. Ce report, le second de ce genre, intervient après que l'avocate de l'accusée eut déposé une demande devant le tribunal expliquant que sa cliente bénéficiait de l'immunité diplomatique du fait de son travail auprès de la mission des Nations Unies au Soudan.
Sur FaceBook, Lubna Hussein a mis en ligne une lettre à ses supporters, où elle précise que son objectif est de susciter le scandale, afin de dénoncer l’insupportable réalité qu’endurent les Soudanaises, en raison du code pénal du pays (voir en lien). Elle écrit : « Je vous suis très reconnaissante, et je voudrais que vous sachiez combien je suis heureuse de votre solidarité. J’espère que [mon cas] fera connaître la clause 152 du code pénal saoudien « (1)

Selon Salah Zghidi, membre fondateur de l'Association pour la défense de la laïcité en Tunisie, cette affaire confirme "l'arriérisme" qui, selon lui, caractérise les "obscurantistes" où qu'ils se trouvent.
« Je ne crois pas que cette condamnation soit uniquement due au fait du port du pantalon ; selon ce que [Hussein] a déclaré dans un entretien avec une chaîne de télévision arabe, elle tient aussi à ses écrits en tant que journaliste, » a explique la journaliste Douaja Eweidni.
Il ne faut pas oublier aussi que les [accusations] pour lesquelles Lubna Hussein est jugée ne sont pas liées aux seuls motifs religieux. Le travail de Lubna pour la mission des Nations Unies, qui a récemment approuvé le procès du Président soudanais devant le Tribunal pénal international, a aussi un lien avec cette affaire.

Toutefois, selon un rapport de CNN diffusé il a quelques jours, Lubna Hussein aurait délibérément démissionné de son poste au sein du service des médias de la mission onusienne, renonçant ainsi à son immunité pour se porter partie civile et répondre de ses accusations.

Ftouh Souhail,
Tunis