Cette
année, coïncidence des calendriers juif et civil, nous fêtons
dans la même semaine le soixante cinquième anniversaire de la naissance
de l’Etat d’ Israël et nous commémorons le soixante dixième anniversaire de la
révolte du Ghetto de Varsovie. Le 19 avril 1943, les derniers juifs du ghetto
organisent le premier soulèvement dans une ville occupée par les nazis: il ne
s’agissait pas pour eux de survivre ou de vaincre, mais de mourir les armes à
la main. Ils n’avaient pas de formation militaire, leur armement était
dérisoire, ils ont pourtant réussi à résister
pendant près d’un mois à des troupes aguerries et lourdement armées.
Ils vont écrire ces jours là une page de gloire. Le14 mai 1948, Chaïm Weismann proclame
l’Etat d’Israël. Cinq années seulement séparent ces deux dates, qui nous
remplissent de fierté mais l’une est empreinte de tristesse, l’autre d’une joie
profonde, car avec la renaissance de l’Etat d’Israël, l’histoire des Juifs ne sera
plus une longue litanie d’expulsions et de persécutions. L’histoire juive ne
sera plus, comme l’écrivait Haïm Hazaz dans sa nouvelle « le
sermon », une suite ininterrompue de persécutions et de Kiddoush Ha-Shem,
de sanctification du Nom.
Israël
a soixante cinq ans : que de chemin parcouru, depuis sa création, dans un environnement qui demeure hostile, dans
un climat, ponctué par des guerres qu’Israël a gagnées, par un terrorisme qui
semble jugulé mais qui n’a pas totalement disparu. Israël a réussi le tour de
force d’intégrer des millions d’immigrés en provenance des pays arabes et de
l’ex URSS tout en développant la recherche scientifique, la recherche médicale,
la High Tech. On le surnomme « la nation
start up » : Israël a plus d’entreprises cotées au NASDAQ, la
Bourse mondiale des sociétés de haute technologie, que toute l’Europe réunie.
Il fait aussi une très belle percée dans le monde des arts : ses
écrivains, ses artistes, ses musiciens y
creusent leurs sillons. Il est devenu aussi une puissance militaire, sans doute
la plus importante de la région et certains le lui reprochent. Ils feignent
d’oublier que planent toujours sur lui des menaces existentielles, celle du
nucléaire iranien, celles de l’extrémisme islamique qui se renforce dans un
Moyen Orient de plus en plus instable. Israël est aussi en butte à des
tentatives de dé légitimation, qui se font jour en France et en Europe de la
part de certaines associations. Elles invoquent
le plus souvent, pour justifier leur action, la défense des Droits de
l’Homme, qui en Israël seraient bafoués. Israël ne peut les combattre avec
des armes. Il nous revient, à nous, de les dénoncer, de démontrer leur
hypocrisie : elles ne se
préoccupent pas ou si peu de ce qui se passe dans le reste du Moyen Orient, à Gaza, sous
la dictature du Hamas, dans les pays arabes où les Chrétiens sont victimes de persécutions, et bien sur en
Syrie où les massacres continuent.
Les
Israéliens, lors des dernières élections législatives, ont voté pour le changement.
Ils ont permis l’entrée à la Knesset d’une nouvelle génération de députés, des
jeunes, dont, pour la plupart, ce sera le premier mandat. Les grands gagnants de ces
élections Lapid et Bennett ont imposé à Benyamin Netanyahou - qui reste
néanmoins Premier ministre -, une nouvelle coalition, dont les religieux
orthodoxes sont exclus. A l’exception de Tsipi Livni, très minoritaire au sein
de cette coalition et dans une moindre
mesure du parti travailliste resté dans l’opposition, les nouveaux dirigeants d’Israël n’ont pas évoqué le problème
palestinien au cours de leur campagne électorale. Ils se sont focalisés sur les
problèmes intérieurs de la société israélienne. On avait pu, déjà, constater
cette marginalisation du conflit israélo palestinien lors des grandes manifestations de juillet
2011. Les organisateurs s’étaient bien gardés de faire le lien entre les
difficultés économiques des couches moyennes et la part importante du budget
consacré aux implantations et à leur protection. Il semblerait que les Palestiniens
aient disparu du champ visuel des israéliens et avec eux, le problème de la
cohabitation sur le territoire de la Palestine mandataire. Il n’y a quasiment
plus d’attentat, c’est heureux, il ne faudrait pas oublier, quand même, l’importance
du rôle joué par l’Autorité Palestinienne
dans leur quasi disparition. Mais ce calme peut être trompeur, on ne répètera
pas assez que le statu quo, l’absence de perspectives nationales offertes au
peuple palestinien sont dangereux pour Israël, à plus ou moins long terme.
Soixante
cinq ans, c’est l’anniversaire d’Israël, tous nos vœux l’accompagnent pour plus
de progrès encore et pour que s’accomplisse cette prédiction de Shimon Peres, « pour son soixante dixième anniversaire, Israël sera en paix avec ses
voisins. »
Gérard Akoun
Judaïques
FM, 18 avril 2013