Saoudiennes dans une boutique de lingerie (photo AFP)
La marque canadienne de lingerie La Vie en Rose, pariant sur le fait que les goûts des femmes arabes pour les sous-vêtements confortables et sexy ne diffèrent pas de ceux des Occidentales, connaît un succès impressionnant dans plusieurs pays musulmans, y compris en Arabie saoudite.
Sous leur
stricte abaya, les clientes de La Vie en Rose en Arabie Saoudite, au Koweït ou
aux Emirats Arabes Unis portent la même lingerie que les Canadiennes ou les
Françaises, froufrous sexy compris.
"La
seule différence notable concerne les chemises de nuit, plus longues pour le
monde arabe, au dessous du genou", indique le vice-président de la société
canadienne chargé des activités internationales, Luc Poirier.
Aujourd'hui,
10% environ du chiffre d'affaires de La Vie en Rose (de 150 millions de dollars
pour l'ensemble des ventes) est réalisé dans neuf pays musulmans: Arabie
Saoudite, Emirats, Liban, Koweït, Jordanie, Algérie, Egypte, Maroc et
Kazakhstan.
Et dans deux
ou trois ans il y aura autant de points de vente à l'international qu'au
Canada, prédit M. Poirier.
Aujourd'hui,
La Vie en Rose compte 55 points de vente franchisés à l'étranger, dont 29 en
Arabie saoudite, contre 150 boutiques au Canada.
Quand, il y
a six ans, trouvant les possibilités de croissance au Canada épuisées et celles
aux Etats-Unis médiocres, les patrons de la société ont regardé vers
l'étranger, une consultante leur a parlé de l'Arabie Saoudite et les a dirigés
vers le groupe Al Hokair, qui est devenu leur partenaire dans le royaume.
L'Arabie
saoudite semble un marché difficile pour la lingerie féminine: la tradition
religieuse interdit toute exposition de corps féminin au regard, la publicité
est impensable. Pis, dans les magasins, le personnel est exclusivement masculin
et il n'existe pas de cabines d'essayage.
Mais les
choses commencent à changer, se réjouit M. Poirier. Les Saoudiennes pourront
non seulement voter, mais aussi, depuis l'été dernier, leur accès au monde du
travail commence à s'améliorer ce qui devrait faciliter l'embauche de
vendeuses.
Et on voit
déjà d'autres signes encourageants: jusqu'à présent, on ne pouvait pas vendre
de maillots de bain. Or, à la saison prochaine, à la demande des partenaires locaux,
des maillots seront disponibles à titre d'essai dans certains magasins.
Malgré les
difficultés, les clientes saoudiennes sont "très au fait de la mode",
relève l'homme d'affaires. A La Vie en Rose les gammes changent à chaque
saison, soit deux fois par an.
Dessinés à
Montréal, fabriqués en Chine, en Inde, au Bangladesh ou au Vietnam, les
produits destinés à l'exportation ne passent pas par le Canada mais
atterrissent directement dans un centre de distribution dans la zone franche de
Jebel Ali, près de Dubaï.
L'expansion
continue: les prochains pays à voir La Vie en Rose pourraient être la Tunisie
et la Corée du Sud.
Pas
intimidée par la concurrence de géants tels que Victoria's Secret, Aubade ou
Triumph, la société canadienne ne rencontre qu'un obstacle de temps en temps,
lié à son nom: dans certains pays, tel le Mexique, la marque Vie en Rose est
réservée, en raison notamment de la chanson d'Edith Piaf et du film sur elle
portant le même titre, sorti en 2007. Des problèmes analogues ont surgi dans un
pays scandinave.
"Mais
nous avons des droits réservés dans 140 pays", relève Luc Poirier.
Source :
"Le Nouvel Observateur", 19 décembre 2012