Michel Abitbol
Retour à l'Histoire pour le
prochain numéro de "Rencontre", et j'aurai le plaisir de recevoir un
historien de grande qualité, Michel Abitbol. Il est né à Casablanca, et c'est
un orientaliste spécialisé dans l'étude des relations entre Juifs et Arabes.
Son parcours l'a conduit du Maghreb à la France en passant par Israël,
puisqu'il est professeur émérite à l'Université Hébraïque de Jérusalem, après
une longue carrière de chercheur. Enseignant, il l'a aussi été en France, notamment
à l'Ecole Pratique des Hautes Etudes et à l'Ecole des Hautes Etudes en Sciences
Sociales ; ses ouvrages et ses articles se comptent par dizaines. Ce n'est pas
la première fois que je le reçois dans mon émission, mais ma dernière interview
date un peu, c'était en 2000, et nous avions parlé de son livre remarquable "Le passé d'une discorde : Juifs et
Arabes depuis le VIIe siècle"
(Editions Perrin). Par delà l'Histoire contemporaine et l'exil plus ou moins
forcé de presque toutes les Diasporas du monde musulman, il y a dans son
travail universitaire un fil d'Ariane, celui d'un homme engagé qui n'a jamais
considéré ce divorce comme étant définitif. Il était donc naturel que sa
trajectoire rencontre celle du Projet Aladin, à la fois association et
programme culturel visant à une meilleure connaissance réciproque du passé
partagé par les Juifs et les Musulmans. Nous avons déjà consacré deux émissions
aux actions d'Aladin, la première avec Serge Klarsfeld en 2010, qui nous a
parlé des conférences données sur la Shoah dans plusieurs pays arabes ; et la
seconde, en 2013, avec sa directrice Anne-Marie Revcolevschi, pour présenter les
premières universités d'été judéo-musulmanes. Et dimanche prochain, Michel
Abitbol va nous parler d'une nouvelle réalisation du projet Aladin, puisqu'on
va évoquer les premiers ouvrages d'une collection intitulée "Histoire
partagée", dont l'éditeur est Tallandier.
Parmi les questions que je
poserai à Michel Abitbol :
-
Quelles sont les actions menées en France par
le projet Aladin dans le domaine universitaire ? On sait que les enjeux de Mémoire
sont devenus source de concurrence et de polémiques, comment êtes vous
intervenus ?
-
L'Histoire a été certes partagée, mais la
mémoire ne l'est pas vraiment. Quand on parle à des Juifs originaires d'Afrique
du Nord, on se rend compte qu'il y a une large palette de représentations du
passé, de la plus rose à la plus noire Pour les populations du Maghreb, et à
l'exception du Maroc, le passé juif est soit nié, soit oublié : si on ajoute à
cela l'influence souvent désastreuse d'Internet, comment faire partager une
réalité par définition complexe ?
-
En ce qui concerne cette collection de
livres, quels pays ont été traités, quels sont les auteurs choisis ? Qui a
veillé à l'objectivité éditoriale, de manière a être lu et accepté aussi bien
côté juif que côté arabe ? Et quels sont les autres livres programmés ?
-
Le Maroc est un cas unique dans le monde
arabe, puisque "l'apport hébraïque" est reconnu dans le préambule de
la nouvelle constitution du Royaume qui date de 2011. L'auteur du livre
"Juifs et Musulmans au Maroc", Mohamed Kenbib, fait des recherches
sur le sujet depuis 30 ans. Est-ce qu'on a pas tendance à enjoliver ce passé ?
Et est-ce que ce livre arrive à répondre à une question simple : comment se
fait-il qu'il ne reste, 70 après, que 3.000 Juifs sur les 250.000 qui y
vivaient il y a 70 ans ?
-
Le cas de l'Algérie est radicalement
différent dans la mesure où le divorce apparait total, et pour des raisons bien
connues : assimilation complète des Juifs à la France après le Décret Crémieux
; élimination des populations non musulmanes après l'indépendance ; et idéologie
du régime depuis 1962. Lucette Valensi a écrit l'histoire de cette communauté
disparue : quel a été l'accueil des universitaires algériens ?
-
Le sujet sans doutes le plus polémique et le
plus explosif c'est celui du livre "les Juifs et Musulmans en Palestine et
en Israël des origines à nos jours" ; il a été écrit par un professeur de
l'Université Hébraïque de Jérusalem, Amnon Cohen. Quelles ont été les archives
qu'il a exploité pour apporter un regard neuf sur cette histoire ?
Soyez nombreux au rendez-vous !
J.C