Quelle chance devait être pour la
région ce printemps arabe au parfum de jasmin !
Les vieux dictateurs et les moins
vieux, les Ben Ali, les Moubarak, les Ghaddafi, chassés par des jeunes
idéalistes, avides de liberté, de justice sociale, de paix, quelle victoire
pour la démocratie ! Ces foules immenses sur la place Tahrir au Caire et
l’Avenue Bourguiba à Tunis portaient en elles une immense espérance. Un nouveau
Moyen-Orient et un nouveau Maghreb allaient surgir, débarrassés de la
corruption, du népotisme, de la mainmise policière grâce à ces manifestants
dont le courage et l’enthousiasme forçaient notre admiration ! Ils ont vaincu.
Ils se sont libérés tout seuls, sans armes, sans aucune aide extérieure. L’avenir
était à eux !
Du moins le croyaient-ils !
C‘était compter sans les
Islamistes, tapis en embuscade en attendant leur heure. Et cette heure n’a pas
tardé à arriver. Dieu est le plus grand ! Mieux structurés, mieux organisés,
ils ont réussi à s’imposer par les urnes. Par un processus des plus
démocratiques, Ennahda à Tunis, les « Frères Musulmans » au Caire, se sont
emparés du pouvoir.
Quelle revanche sur ceux qui les
ont combattus depuis 50 ans, depuis Nasser ! Comme toujours les
révolutionnaires, les vrais, les purs, se sont fait voler leur
révolution.
Pas seulement par Ennahda et les
Frères Musulmans qui officiellement se revendiquent d’un islamisme
modéré, mais aussi par des Salafistes bien plus extrémistes. Des gens qui
réclament l’application de la Charia dans toute sa rigueur..
Ils sont anti-occidentaux,
anti-juifs, antichrétiens, anti-alcools, anti-arts, anti-musique et veulent
priver les femmes des acquis dont elles bénéficiaient sous les régimes
précédents pour les faire revenir au Moyen-âge. Tout prétexte leur est bon pour
créer des troubles et plonger dans l’embarras les gouvernements en place, même
s’ils sont eux-mêmes islamistes comme en Tunisie et en Égypte.
Cet Islam ultra-radical vole de
succès en succès et multiplie ses conquêtes, non seulement au
Moyen-Orient et au Maghreb mais aussi en Europe et en Afrique
Subsaharienne où Al-Qaida vient de s’offrir un état dans la moitié nord
du Mali. Et le mouvement n’est pas près de s’arrêter. Au contraire.
Face à cette offensive qui ne vise
rien moins que de recréer le Califat, des voix encore peu nombreuses il est
vrai, s’élèvent, surtout en Tunisie. Des femmes et des hommes, des
intellectuels, des écrivains, tels l’algérien Boualem Samsal, des peintres,
n’hésitent pas à braver les interdits qu’on veut leur imposer et les
menaces de mort, pour s’exprimer librement. Ils risquent gros et ils le
savent.
Saluons leur courage et tenons
les par la main.
André Nahum
Judaïques FM, le 27 juin 2012