Hier était organisée Place de la Bastille à Paris une
marche contre le terrorisme à l’appel d’un collectif d’associations musulmanes,
à l’initiative de l’imam de la mosquée de Drancy, Hassen Chalgoumi. Un
précédent appel en faveur d’une marche silencieuse avait été lancé pour le
dimanche 15 avril, marche finalement reportée officiellement en raison du trop
grand nombre de meetings politiques dans la capitale.
Enfin réunis, tous entendaient hier défendre un Islam
de France, condamner le terrorisme mais aussi protester contre ce qu’ils
qualifient d’acharnement des médias contre leur communauté doublé d’un
acharnement des politiques; mais aussi contre la récupération politique faite
par certains musulmans dont Abderhamane Dahmane, à l’initiative du soi-disant
appel des 700 mosquées.
« Stop au fanatisme ! Ce ne sont pas eux qui
nous représentent. Je lance un appel aux candidats, pour le respect de notre
religion, mais aussi pour la fin de l’ingérence étrangère dans notre religion,
pour la formation des imams, pour un islam de France » lance Hassen Chalgoumi. Pour lui,
il doit y avoir un échange avec la République : « Nous, on condamne le
terrorisme, mais en retour, on aimerait que le racisme soit dénoncé dans notre
société. Les mosquées qui brûlent, les tags d’injure à Aulnay sous Bois, les
« vous êtes tous des Mohammed Merah », non ça n’est pas possible non
plus. »
Dans la petite centaine de personnes, des chrétiens
coptes, mais aussi un représentant du monde juif, Sami Gozlan, du Conseil de la
communauté juive de Seine Saint Denis : « Je suis très heureux
d’être là aujourd’hui alors qu’à quelques mètres de notre synagogue se tenait
il y a quelques semaines le Congrès de l’UOIF. La plupart des musulmans de
France est très modérée mais ces populations ont peur de s’engager, elles sont
souvent immigrées, mais à partir d’aujourd’hui les choses vont changer. » Effectivement,
hormis les leaders associatifs, difficile d’engager la discussion avec les
simples membres, comme ces jeunes femmes pakistanaises habillées de noir,
membres de l’association Mivah Ul Quran : « Nous sommes venues
dire que l’islam est une religion de paix. On est là que pour la
religion. »
« Ce
type de manifestation est de nature à nous rapprocher. Certaines organisations
politiques se servent de clichées qui font du soutien à la Palestine un axe politique,
comme à Toulouse, ou au Blanc Mesnil. Mais ici tout ça est mis de côté. » continue Sami Gozlan. Plane
évidemment sur cette marche le souvenir des actes de Mohammed Merah. Et si Sami
Gozlan est là aujourd’hui, c’est bien parce qu’il approuve l’action de l’imam
de Drancy : « Il est très clair dans sa condamnation de l’islam
radical. »
Le vote musulman en question
Même si tous se défendent d’interpeller les candidats
pendant le second tour de la présidentielle, la politique n’est pas très loin,
notamment lorsqu’on les interroge sur la question d’un éventuel vote musulman.
« Il n’y a pas de vote musulman »
voilà ce que dit Fatima Belarabi, présidente de l’association des femmes
marocaines à l’étranger, tout en ajoutant : « Les français
qui vivent au Maroc ont voté à 36% pour Sarkozy ! » Plus loin,
Majid Touhami, vice-président du Conseil des musulmans de Montreuil, me confie
: « On va faire la différence nous ! » Et quand on
lui demande à l’avantage de qui il entend faire la différence, il répond,
dans un sourire : « Contre le Pen. » Et puis il
ajoute : « Plus de 60% des musulmans ont voté pour Mélenchon
chez nous » Un score établi selon un chiffrage dans certains
bureaux de vote du XVIIIe, du XIXe, de Montreuil et de Bagnolet.
Alors quand on les interroge sur l’action de M. Dahmane, tous vocifèrent contre lui : « Il n’est jamais venu nous voir, on l’a interpellé à plusieurs reprises, mais c’est une blague cet homme ! Il connaît pas nos problèmes, maintenant qu’il a été viré, il revient vers nous… » nous confie Majid Touhami. « Mais qu’il l’avance, qu’il l’avance sa liste ! Son action est indigne, la religion, c’est intime, il faut avancer, pas régresser ! L’appel au vote oui c’est un devoir, mais sans donner de consigne. » continue Fatima Belarabi. Même l’imam de Drancy est sceptique : « Qui a le pouvoir de mobiliser 700 mosquées ? Quand il a voulu lancer l’étoile verte pour les musulmans, ils étaient quatre !. » – en référence à l’appel lancé par M. Dahmane l’an dernier aux musulmans à porter une étoile verte, pour dénoncer la stigmatisation dont ils étaient victimes.
Alors quand on les interroge sur l’action de M. Dahmane, tous vocifèrent contre lui : « Il n’est jamais venu nous voir, on l’a interpellé à plusieurs reprises, mais c’est une blague cet homme ! Il connaît pas nos problèmes, maintenant qu’il a été viré, il revient vers nous… » nous confie Majid Touhami. « Mais qu’il l’avance, qu’il l’avance sa liste ! Son action est indigne, la religion, c’est intime, il faut avancer, pas régresser ! L’appel au vote oui c’est un devoir, mais sans donner de consigne. » continue Fatima Belarabi. Même l’imam de Drancy est sceptique : « Qui a le pouvoir de mobiliser 700 mosquées ? Quand il a voulu lancer l’étoile verte pour les musulmans, ils étaient quatre !. » – en référence à l’appel lancé par M. Dahmane l’an dernier aux musulmans à porter une étoile verte, pour dénoncer la stigmatisation dont ils étaient victimes.
Une citoyenneté de quartier
« On est loin des institutions représentatives,
CFCM, Mosquée de Paris mais ils vivent dans une bulle…c’est une coquille
vide. » nous confie
Majid Touhami. « Nous, on défend une citoyenneté de quartier » explique
Alexandre Vigne, catholique, fondateur de l’association CIEUX, Comité
interreligieux pour une Ethique universelle et contre la xénophobie. « Les
lieux de culte au niveau local y contribuent. Quand il n’y a pas de dialogue
entre toutes les religions, c’est là qu’il y a un problème. »
ajoute-t-il. Et Sami Gozlan d’ajouter : « Je suis invité dans les
mosquées, je prends la parole devant les fidèles. On se voit fréquemment avec
tous les imams de la Confédération des imams de France, c’est tout à fait
chaleureux, et sincère. On se soutient. »
« On se soutient » : cette
marche, elle est celle d’associations de Seine Saint Denis, habitués à
travailler ensemble dans des quartiers difficiles, habituées à s’ouvrir. Le
résultat d’expériences locales qui pourraient peut-être à terme porter ses
fruits au niveau national. Tous entendent en tout cas incarner un nouveau
visage de l’Islam, soucieux de s’inscrire dans le strict cadre de la laïcité,
et capable de se mobiliser.
Blog "Crise de foi"
Le blog de Virginie Riva
30 avril 2012