Le désespoir envahit les
Alevis face à la recrudescence de l'islamisation de la Turquie. Sous leur
étiquette de pays "laïc", le gouvernement mène une guerre de
propagande, à l'encontre de la laïcité, avec comme seul objectif d'instaurer un
nouveau modèle idéologique, "une race, une religion, une langue"
La Fédération de l'union des
Alévis de France (FUAF) fait partie de la dynamique croissante du mouvement Alévi
en Europe représenté par notre Confédération Européenne qui regroupe plus d'un
million d'adhérents dans 14 pays différents. Ainsi les 200 000 Alévis de tout
l'hexagone, de Bordeaux à Strasbourg, se battent pour la liberté d'expression
et de croyance de leurs proches. En effet, près de 25 millions d'Alévis vivent
en Turquie. Ils ont même fait appel à la Cour Européenne des Droits de l'Homme
pour demander la suppression des cours obligatoires religieux chez les enfants
et la suppression de la mention religieuse sur la carte d'identité. La justice
turque a délibérément ignoré la décision du 9 octobre 2007 de la Cour
Européenne des Droits de l'Homme donnant raison à un plaignant alévi.
Malgré notre combat acharné
et une résistance continue, la Turquie continue d'appliquer une politique
d'ignorance, d'injustice et avance progressivement vers une guerre civile par
le biais d'une politique d'assimilation et de neutralisation par l'oppression.
L'Anatolie, terre des richesses et des cultures, se transforme sous nos yeux en
un lieu de haine et d'obscurantisme.
Le responsable du
gouvernement des affaires religieuses et du culte a refusé toutes les
propositions avancées par les Alévis jusqu'à ce jour. Ainsi nos doléances
telles que la prise en considération des besoins d'autres religions dans les
projets de cette structure ont été rejetées. Le rôle de cet organisme, qui se
nourrit de l'impôt de l'ensemble de la population, est de financer les besoins
des structures islamiques tels que les imams, les cours religieux et les
mosquées. Nos demandes concernant la suppression des cours religieux
obligatoires dans le secondaire ou la reconnaissance et la construction de nos
lieux de cultes "cemevi"
ont malheureusement été en vain.
L'atteinte des libertés
fondamentales ne s'arrête pas là. La Turquie démontre une ferme volonté de
créer des mosquées dans les universités, d'instaurer l'éducation religieuse
dans le primaire et même d'interdire l'avortement.
Que dire de la libération des
coupables de l'incendie de Sivas sous le prétexte d'expiration du délai de
prescription ? Doit-on encore, au XXIe siècle être brûlé vif pour que l'Europe
voie la réalité en face ? Nous, les Alévis, peuple pacifiste et humaniste,
demandons votre soutien afin d'éviter l'irréparable.
Erdal
Kilickaya, président de la FUAF
Le Monde, le 30
juillet 2012