Anouar Kbibech
Dimanche prochain, nous
aurons une émission marquante en raison de la qualité de notre invité, Anouar
Kbibech. Il est actuellement un des Vice Présidents du Conseil Français du
Culte Musulman, mais surtout il doit succéder au mois de juin prochain au
Président actuel, le Recteur de la Grande Mosquée de Paris Dalil Boubakeur.
Quelques mots de présentation. C'est un natif de Meknès, au Maroc. Sa carrière
a été à la fois celle d'un cadre supérieur de l'industrie, et celle d'un
gestionnaire du culte musulman. Il est entré en 1983 à l'Ecole Nationale des
Ponts et Chaussée, et il est actuellement directeur des Systèmes d'Information
chez un important opérateur des télécommunications. Il préside le
"Rassemblement des Musulmans de France", cette association fédère
environ 550 mosquées en France, dont les fidèles sont en grande majorité des
originaires du Maroc. J'ai intitulé cette émission "l'Islam de France face
aux défis d'aujourd'hui". Première catégorie de défis, ceux de
l'organisation du culte musulman dont il va devenir bientôt le représentant
auprès des Autorités : deuxième religion de France, l'Islam doit s'affirmer
dans la République tout en respectant le cadre de la laïcité ; répondre aux
besoins des fidèles, tout en rassurant une majorité de Français qui voient
avec inquiétude sa montée en puissance ; surmonter ses propres divisions
historiques : bref c'est déjà un grand challenge qu'il va devoir relever et
nous en parlerons en première partie d'émission. Mais il y a bien sûr
l'actualité, le terrorisme djihadiste qui a tué à Paris il y a quelques
semaines, ces massacres commis au nom de l'Islam par des fanatiques, ici comme
dans le monde entier, et qui nous interpellent tous : comment combattre la
radicalisation ? Y a-t-il une danger de choc en retour ? Comment éviter qu'un
mur d'incompréhension sépare Juifs et Musulmans ? Nous aborderons ces questions
en deuxième partie d'émission.
Parmi les questions que je
poserai à Anouar Kbibech :
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Lors de sa dernière conférence de presse, le
Président de la République a été assez dur vis à vis du CFCM, en disant que
cette instance n’a «pas la capacité suffisante de faire prévaloir un certain
nombre de règles, de principes, partout sur le territoire». La première
question qu'on se pose est celle de la représentativité : lors des élections de
juin 2013, 2664 votants, ont permis
d’élire les Elus au Conseil d’Administration du CFCM ainsi que les instances
des Conseils Régionaux du Culte Musulman. Force est de constater que ces
délégués ne représentaient que 901 mosquées affiliées aux différentes
fédérations nationales, or il y a au total environ 2.300 lieux de culte musulman
: qui représente les autres ?
-
Dans la même conférence de presse, le Président
François Hollande a cité la formation des imams comme chantier urgent. Il
semble bien que dans beaucoup de lieux de cultes, il n'y ait pas d'imams
permanents, et que donc on risque d'avoir des prédicateurs
"auto-proclamés" et itinérants, avec le risque bien sûr de propagande
salafiste. Or on leur demande beaucoup de qualifications pour un salaire très
modeste, et cela limite les vocations. Quelles solutions envisagez-vous, alors
qu'il y a très peu d'instituts de formation en France - trois au total ? Et
peut-on imaginer, rapidement, un diplôme qualifiant pour les Imams ?
-
A propos de la représentativité des
Institutions de l'Islam de France. D'abord à propos de l'UOIF, qui s'est
retirée du CFCM en 2013, est-ce que vous pensez que c'était préférable ou au
contraire qu'il faudrait que son réseau d'environ 150 mosquées soit représenté
? Ensuite, par rapport à la Fédération des associations islamiques d'Afrique,
des Comores et des Antilles - et alors que l'islam africain en France représente
peut-être la moitié de la population musulmane -, jugez-vous normal qu'ils
soient sous-représentés dans votre direction ? Et enfin à propos de l'Imam
Chalghoumi et de sa "conférence des Imams", il n'est pas intégré au
CFCM : est-ce de son fait ou alors est-ce une exclusion et pourquoi ?
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A propos du combat contre le Daesh. Il y a eu
au mois de septembre la déclaration commune de dix grandes associations
représentant le culte musulman en France - y compris d'ailleurs l'UOIF - , condamnant de façon absolue les atrocités
que commettent les djihadistes du soit disant "Califat islamique" ;
il y a eu de très nombreux communiqués après les attentats en France, dont ceux
du RMF que vous présidez et qui étaient particulièrement clairs. Et pourtant,
cela n'empêche pas des milliers de jeunes Français musulmans d'être partis en
Syrie ou d'envisager de partir, voire même de basculer dans le terrorisme en
France même comme on l'a vu: quels sont les chantiers lancés par le CFCM contre
la radicalisation ?
J.C