Notre émission de dimanche prochain sera particulièrement émouvante. D'abord, parce que nous allons évoquer les assassinats de l'année dernière à Toulouse et Montauban, et le carnage de l'école Ozar Hatorah, où pour la première fois depuis la Libération on a tué en France des enfants juifs. Mais émouvante, surtout, parce que je recevrai sur mon plateau la maman d'une des victimes de Mohamed Merah, Madame Latifa Ibn Ziaten. Merci à elle d'avoir accepté de parler sur les ondes de notre station, merci surtout pour tout ce qu'elle a eu le courage et la volonté de faire depuis ce drame affreux qui a frappé sa famille. Le dimanche 11 mars 2012, 8 jours avant d'attaquer une école juive, celui qui n'avait pas encore pas de nom, pas de visage pour le public, tendait un piège mortel à son fils et assassinait sa première victime, Imad Ibn Ziaten, parachutiste de 30 ans ; après lui, deux autres jeunes parachutistes seront assassinés, Abel Chennouf, catholique d'origine algérienne et Mohamed Legouad, musulman d'origine algérienne ; un quatrième parachutiste, Loïc Liber, 28 ans, en réchappera mais restera paralysé à vie ; et puis ce fut le massacre de Toulouse, Jonathan Sandler, ses enfants Aryeh et Gabriel, et puis la fille du Directeur de l'Ecole, Myriam Monsonégo. L'ignoble assassin a tout filmé, tout conservé pour ces meurtres qui ont brisé des familles juives, chrétienne et musulmanes. On sait qu'il a crié "Allah Akhbar" aux moments où il tuait : or, précisément parce que Latifa Ibn Ziaten n'accepte pas de voir ainsi profané le nom de Dieu, parce qu'elle est horrifiée par cet usage terroriste de l'islam, elle qui est croyante et pratiquante a décidé de se battre. Nous allons parler de son livre "Mort pour la France - Mohamed Merah a tué mon fils", édité aux éditions Flammarion, nous allons parler de l'assassinat d'Imad, mais aussi de son histoire, celle d'une immigrée marocaine qui a force de travail et de sacrifice a réussi une intégration parfaite, et à élever cinq enfants ; et nous parlerons, aussi et surtout en deuxième partie de la fondation qu'elle a créé et de son combat "pour qu'il n'y ait plus jamais de Mohamed Merah".
Parmi les questions que je
poserai à Latifa Ibn Ziaten :
-
Le premier chapitre de votre livre fourmille
d'anecdotes : on voit d'abord comment vous qui non seulement ne parlait pas le
Français, mais qui était complètement analphabète, avez tout appris grâce au centre
social de votre mairie ; on voit que vous avez exercé les métiers les plus
divers, employée de magasin, cuisinière dans une cantine scolaire, vous avez
même fait les marchés. Et puis on découvre des voisins gentils, et on a l'impression
que vous n'avez pas été confrontée au racisme, or ce n'est pas ce que disent
les jeunes des Cités : comment l'expliquez-vous ? Les choses ont-elles changé ?
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Vous donnez plein de détails sur l'éducation
à la fois pleine d'affection et très stricte que vous avez donné à vos enfants
; la question de l'identité est très importante parce qu'on voit, aujourd'hui,
de nombreux jeunes musulmans se sentir déracinés, à la fois pas français et
pas maghrébins comme leurs parents : comment avez-vous réussi à ce que vos
enfants assument parfaitement leur double culture ?
- On ne saura jamais pourquoi votre fils et les
autres militaires ont été choisis précisément pour ces assassinats ; c'est
clair que c'était la France qui était visée ;; on sait parfaitement que Merah
était un jeune voyou radicalisé en prison, ayant fait des voyages plus que
suspects au Pakistan et en Afghanistan, il a voulu tuer des soldats français
parce que selon lui, ces soldats tuaient des Musulmans ; triste ironie, votre
fils dont vous reproduisez les états de service, n'a jamais combattu en
Afghanistan ; belle réponse aussi à son délire le présentant comme un
"traitre à l'islam", il est enterré dans le village de M'dik, au
Maroc, et vous racontez la foule immense qui vous a accompagnée là-bas, alors même
que le Roi vous a réconfortée et soutenue depuis ce meurtre. Mais il y a eu
d'autres échos, sinistres, venus d'un pays voisin, l'Algérie : une certaine
presse, répand l'idée d'un "complot", des services secrets français,
pourquoi pas du Mossad ; l'avocate algérienne de la famille a porté plainte
pour, je la cite, "l'assassinat de Merah" : comment leur répondre ?
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Il y a eu une confrontation encore plus
terrible que celle des rumeurs, et des attaque sur Internet - vous avez même
été menacée récemment par une jeune fille de 17 ans, qui est sous surveillance.
Vous racontez, au début du livre, comment vous avez été dans le quartier des
Izards, à Toulouse, là où habitait l'assassin de votre fils, et comment vous
avez été bouleversée d'entendre un jeune qui ne vous connaissait pas vous dire
: "Madame, Merah c'est un martyr, un héros de l'Islam, il a mis la France
entière à genoux" : cela vous a donné l'idée et l'envie de lutter contre
cette haine par la fondation Imad Ibn Ziaten: en pratique, qu'avez-vous déjà
fait pour faire passer un message d'amour à ces jeunes, pleins de haine ?
Une émission vraiment particulière, et que j'espère vous
serez vraiment nombreux à suivre dimanche prochain !
J.C