Said Aïdi
Nous allons revenir dimanche
prochain à l'actualité, une actualité brûlante puisqu'il s'agit de la Tunisie
et que dans ce pays, la situation est le moins que l'on puisse dire, instable.
Mais ce sera aussi une émission particulière pour deux raisons, d'abord parce
que nous aurons notre invité au bout du fil depuis Tunis ; et ensuite en raison
de sa qualité exceptionnelle, car c'est un acteur de la politique tunisienne,
et une personnalité de l'opposition au gouvernement Ennahda, il s'agit de Said
Aïdi. Said Aïdi est né à Tunis en 1961, il a fait ses études supérieures en France, des
très brillantes études puisqu'il a intégré l'Ecole Polytechnique en 1982 ; il a
eu ensuite eu une carrière dans l'informatique, comme créateur d'entreprise
puis comme directeur général ; puis est venue la révolution dans son pays en
janvier 2011, et là il a fait partie des cadres de haut niveau qui ont été dans
les deux gouvernements de transition, comme Ministre de la Formation
professionnelle et de l'Emploi. Puis il y a eu les élections le 23 octobre 2011,
la victoire d'Ennahda et de ses deux alliés laïcs, l'opposition a été laminée
mais, fidèle à ses convictions il l'a rejointe et, depuis l'année dernière il
fait partie du comité exécutif d'une nouvelle formation, "Al Joumhouri",
le Parti Républicain. Mes auditeurs fidèles savent les liens qui m'attachent à
la Tunisie, mon pays natal, et combien j'ai toujours été convaincu que ce pays
avait tous les atouts pour devenir vraiment la première vraie démocratie du
monde arabe. Ce que nous voyons depuis plus d'un an, cette violence inconnue
dans le pays et dont tout les médias ont parlé avec l'assassinat de l'opposant
Chokri Belaïd, tout cela nous bouleverse, c'est pourquoi j'ai intitulé cette
émission : "Tunisie, impasse politique ou espérance démocratique ?". Et
nous comptons vraiment sur ses analyses pour éclairer la situation.
Il est tout à fait exceptionnel d'avoir un responsable
politique d'un pays arabe dans notre série ... c'est pourquoi j'espère que vous
serez particulièrement nombreux à l'écoute !
J.C
Parmi les questions que je
poserai à Said Aïdi :
-
A propos de l'assassinat de Chokri Belaïd : où
en est-on de l'enquête ? La police a arrêté le 25 février un membre du commando
qui l'a exécuté par balles à El Menzah, mais le principal tueur serait en
fuite. On a dit qu'ils appartenaient à une milice tolérée par le pouvoir, la
"Ligue de Protection de la Révolution", qui a déjà assassiné un membre
du parti "Nida Tounes" il y a quelques mois ; saura-t-on un jour la
vérité, et comment ? Vous-même avez été victime d'une agression violente, à la
Casbah de Tunis le 4 décembre, pourriez-vous en parler à notre antenne ?
-
On a eu l'impression que cet assassinat a
causé une sorte d'électrochoc dans la société tunisienne, les obsèques de
Chokri Belaïd ont été suivies par une foule considérable, et il y a eu une
journée de grève générale ce que l'on n'avait pas vu depuis des décennies ;
mais, surtout, on a eu l'impression que le parti Ennahda vivait lui aussi une
crise, puisque le Premier Ministre Hamadi Jebali a proposé un gouvernement de
transition ; son parti n'a pas suivi et résultat, il a démissionné. Pensez-vous
vraiment qu'il y a, à l'intérieur d'Ennahda, des modérés qui pourraient
rejoindre l'opposition, autrement dit des "islamistes modérés" ; et que
pensez-vous du nouveau Premier Ministre désigné, Ali Laârayedh, qui était Ministre de
l'Intérieur et de son bilan, en termes de sécurité nationale ?
-
Quelle est actuellement la position des
Américains ? Tout le monde a compris que, de Tunis au Caire en passant par
Tripoli et demain Damas, finalement les Etats-Unis ont intégré une prise de
pouvoir par les "Frères Musulmans", avec le soutien financier des
Emirats du Golfe : est-ce que pour la Tunisie, ce basculement dans la violence,
ce qu'ils ont subi aussi avec l'attaque de leur ambassade - laissée sans
protection policière - par les Salafistes au mois de septembre, les a fait évoluer ?
-
On a largement analysé les causes de l'échec
de l'opposition en octobre 2011, et surtout l'éparpillement des voix avec des
dizaines de formations politiques qui ont gaspillé les suffrages. Aujourd'hui,
il y a trois "blocs", votre parti, les Républicains d'Al Jamhouri ;
le parti Nida Tounes de l'ancien Premier Ministre Beji Caïd Essebsi ; et la
gauche modérée du rassemblement "El Massar". Sont-ils arrivés à un
accord électoral ? Et à part l'opposition aux Islamistes, pour quel programme ?
-
Il est
impossible sur cette antenne de ne pas évoquer les inquiétudes de la petite
minorité juive tunisienne, qui se trouve bien plus inquiète que sous Ben Ali : citons,
parmi les évènements récents, les cris de "mort aux Juifs" scandés à
l'aéroport de Tunis Carthage lors de la visite du Premier Ministre du Hamas en
janvier 2012 ; la proposition d'un député Ennahda d'interdire la vente de
terrains aux Juifs dans l'île de Djerba ; les propos d'un imam d'une mosquée de
Radès demandant à ses fidèles de prier pour que les Juifs soient stériles ; et les
images lamentables qui nous parviennent de profanations de cimetières ou de
synagogues : est-ce une campagne d'intimidation délibérée, et comment la
combattre ?
J.C