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04 janvier 2018

Jérusalem, les snipers et moi

Jérusalem divisée : le "no man's land" entre les deux secteurs de la ville, au niveau de la porte de Jaffa. Photo prise en 1964

J’imagine que certains lecteurs fidèles se sont étonnés de ne pas me lire à propos de Jérusalem, depuis ce mercredi 6 décembre où Donald Trump a fait sa fameuse déclaration, reconnaissant officiellement que la ville était bien la capitale d’Israël – une réalité depuis près de 70 ans mais en énervant beaucoup -, et disant qu’il transfèrerait plus tard l’ambassade américaine – quand, au fait ?


Il y a plusieurs raisons à cela : mon blog n’est pas un journal devant parler de tout et tout le temps ; on a déjà été saturé de nouvelles, analyses et points de vue, dans la presse et en particulier dans les médias communautaires ; mais il y aussi une autre raison qui me fait hésiter, alors que je m’étais promis de synthétiser mes idées dans un petit article.
Concernant Jérusalem, je pense en effet à une autre image : celle des « snipers » postés sur les hauteurs de la vieille ville, occupée par la Jordanie de 1949 à 1967 ( lire sur ce lien ), et qui faisaient de temps en temps des « cartons » rendant la vie difficile dans la partie ouest de la ville. Mais pour moi, les « snipers » ce seraient les lecteurs excités ; et j’y pense en voyant les commentaires furieux et les accusations gratuites qui pleuvent, côté juif comme côté musulman, dès qu’on essaie d’exposer des idées originales. Pourquoi « prendre des balles perdues » ? Sur les blogs francophones du « Times of Israël », j’ai recensé ainsi bien des commentateurs, jamais présents pour apprécier un article mais toujours là pour tirer à vue !

Quelques éléments quand même qui me semblent indiscutable, à propos d’une nouvelle partition de la ville qui parait souhaitée par une grande majorité de la communauté internationale.  

L’idée d’un « partage équitable » de la ville entre deux Etats coexistant en paix - position française et partagée par la majorité de l’Union Européenne, avec des exceptions apparues lors du vote à l’assemblée générale de l’ONU le 21 décembre - parait raisonnable pour des « tiers », neutres et n’ayant pas notre sensibilité juive sur la question. Or, il n’est pas inutile de rappeler ce que la Jordanie avait fait de l’accord de cesser le feu signé en 1949, voir ici : interdiction d’accès aux lieux saints du Judaïsme, saccage de synagogues et de cimetières … il y a de quoi raisonnablement se méfier. Et qui contrôlerait le respect des nouveaux accords ? Avec quelles forces de sécurité ? Et encore, à l’époque la Jordanie était un pays « raisonnable », allié des Occidentaux etc. Tandis que demain, côté palestinien, la prise de pouvoir immédiate par le Hamas ou l’un de ses clones serait tout à fait possible.

Ensuite, oui ce dernier vote de l’ONU, précédé par des résolutions - proclamées souvent avec virulence - par les représentants des autres « grandes religions », musulmans comme chrétiens, ont mis en évidence la solitude d’Israël et maintenant des États-Unis ; mais il convient aussi de garder la tête froide. L’Assemblée Générale de l’ONU a condamné la décision américaine, mais finalement en des termes relativement « soft », et surtout avec une majorité moins écrasante qu’on aurait pu le craindre. Pour rappel, entre les « non », les « abstentions » et ceux qui n’étaient même pas là pour voter, un tiers des États membres ont refusé de soutenir la résolution. Lire cette excellente analyse des votes sur le "Times of Israël" .

Ces réalités étant brièvement rappelées, j’ai trouvé insupportables les accusations concernant Emmanuel Macron et venant de mes ami(e)s de la Communauté : « coup de couteau dans le dos » ; « collabo » ; « lèche babouches » ; « antisémite ». « Notre » extrême droite impose ses éléments de langage à beaucoup, et c’est aussi insupportable qu’injuste. Pour rappel, des pays très proches d’Israël par leurs liens aussi bien économiques que militaires (Royaume-Uni, Allemagne, Italie) ont voté comme la France ; et, très prudent, le Président français a refusé, et de reprendre le rôle de médiateur des États-Unis, maintenant refusé par Mahmoud Abbas, et de reconnaitre un État palestinien tant qu’il n’y aura pas d’accord de paix.

Voilà ce que je voulais vous dire. Une annonce pour finir : mon émission traite rarement d’Israël et de son conflit avec les Palestiniens, mais on parlera de Jérusalem dans un numéro de « Rencontre » qui sera diffusé le 28 janvier : soyez nombreux à l’écoute !

J.C