Décidément la Tunisie n'en finit
pas de plonger dans une spirale intolérante, menaçante pour ses minorités et
qui ne ressemble pas à l'image que nous voulons en conserver, malgré tant de déceptions
depuis près de deux ans ...
Je vous avais parlé (lire sur
ce lien) du pillage et du saccage déjà constaté dans la grande synagogue
Beth El de Sfax, à l'été 2011 juste après le Ramadan. Pour mémoire, ce
splendide lieu de culte, inauguré à la veille de l'indépendance en 1955, avait
été entièrement restauré en 2008 : des associations d'originaires y
organisaient des pèlerinages jusqu'en 2010, date à laquelle fut aussi restaurée
une synagogue plus petite mais elle restée fermée, nommée "Edmond
Azria". Seuls vivraient encore dans la ville une trentaine de juifs,
presque tous très âgés et qui n'ont donc pas la force de surveiller ces
bâtiments ou de porter plainte en cas de dégradations.
Des visiteurs originaires de Sfax et venus d'Israël, alertés des derniers saccages par des Musulmans amis, ont pu constater tout dernièrement que ces deux synagogues avaient fait l'objet de nouveaux actes de vandalisme, ceux-là clairement antisémites - ceux de 2011 l'étaient aussi puisque, comme on s'en souvient, des Sefer Torah avaient été dérobés et des plaques funéraires en argent volées ; mais il n'y avait pas eu alors de revendications affichées.
J'ai reçu donc de ces visiteurs cette
série de photographies, véritable reportage à diffuser et alors que la presse
tunisienne ignore complètement ce qui s'est passé.
Ci-dessus, dans la synagogue Beth El, le Hekhal grand ouvert, portes saccagées avec les
boitiers de Sefer Torah vidés des parchemins sacrés, probablement volés
Dans la même
synagogue, le sol jonché de petits cailloux ayant servi à bombarder (de
l'intérieur) les vitraux, régulièrement brisés par des "visiteurs"
malveillants
Il existe aussi des photographies - hélas de mauvaise qualité
et que je n'ai pas reprises - de troncs ouverts et vidés de leur contenu, la
crapulerie rejoignant alors l'acte antisémite ; ainsi que de la plaque en marbre noir en l'honneur de Rabbi Meir Baal Haness, brisée par ces vandales.
Mais c'est se rendant dans la petite synagogue Edmond Azria
que nos pèlerins venus d'Israël ont fait les constats les plus choquants.
Sur le portail, on
distingue clairement une étoile de David et une inscription en arabe : le
slogan "Filistin hourra" ("Palestine libre"), associant
donc directement la cause palestinienne à une profanation raciste
Enfin, et ce spectacle déchire le cœur, livres des prières jetés au
sol au milieu de débris divers, comme une manifestation ultime du mépris des
responsables du saccage pour la religion de leurs compatriotes juifs
Certes, beaucoup de Tunisiens et
nous n'en doutons pas, seront indignés et éprouveront de la honte en découvrant
ces photos. Mais hélas, sur place, force est de constater que, totalement
indifférents aux informations qui leur ont été données, les policiers ont
refusé de faire un constat ou de protéger, même après coup, ces lieux de culte.
Au delà de leur propre
démotivation, au delà de la désorganisation des forces de l'ordre dans le pays,
il est de la responsabilité première des Autorités du pays de garantir la
protection de chaque religion, fut-elle extrêmement minoritaire : et
clairement, le gouvernement Ennahda ne remplit pas ses responsabilités.
Jean Corcos