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19 juin 2011

La Turquie sombre dans l’islamisme : Victoire écrasante de l’AKP


Les élections législatives en Turquie  se sont passées sans surprise  ce dimanche 12 juin 2011.
Le parti issu de la mouvance islamiste du Premier ministre Recep Tayyip Erdogan a remporté une victoire écrasante les législatives en Turquie, assurant une troisième législature consécutive, après dépouillement de la quasi-totalité des bulletins. Après comptage de 94% des voix, le Parti de la justice et du développement (AKP) de M. Erdogan, au pouvoir depuis 2002, a remporté 50,4% des voix, selon la chaîne d'information CNN-Türk. Le Parti de la justice et du développement (AKP) du Premier ministre Recep Tayyip Erdogan, au pouvoir depuis 2002, assure ainsi  largement  la majorité absolue au Parlement de 550 sièges. Vient en deuxième position le Parti républicain du peuple (CHP, social-démocrate), principale force d'opposition avec 25,8% des voix, suivie des nationalistes du MHP (Parti de l'action nationaliste) avec 13,2%.

A la lumière de ceci le parti islamo conservateur au pouvoir issu de la mouvance islamiste pourra former seul un gouvernement. C’est surtout depuis que les Turcs ont élus ce parti  islamiste que beaucoup de choses ont changé dans ce pays. En 2002, un parti islamiste, l’AKP de Recep Tayip Erdogan, arrive au pouvoir en Turquie. L'AKP a nommé des fonctionnaires religieux à des postes importants dans les ministères de l’éducation, de la justice et des affaires sociales. En août 2010 le conseilleur du Premier ministre turc a déclaré qu'il envisageait d'épouser une quatrième femme. Sa nomination a toutefois été approuvée au sein du gouvernement. En octobre 2010 Un haut magistrat tire la sonnette d'alarme :  le procureur général turc Abdurrahman Yalcinkaya a mis en garde contre la levée de l'interdiction du voile à l'université, estimant que cela "ouvrirait une brèche dans le principe de laïcité en fondant un arrangement public légal sur des bases religieuses".

Le Parti Républicain du Peuple (CHP), d’opposition, soupçonne, quant à lui, que l’AKP veuille exploiter les sentiments religieux pour gagner les élections. L'AKP a imaginé, en effet, une théorie du complot, qu'il a appelée Ergenekon, dans le but d'arrêter environ 200 opposants au parti, parmi lesquels des officiers de l'armée, sous l'accusation de complot visant à renverser le gouvernement élu. Le gouvernement islamo conservateur a foncièrement réussi à annihiler de facto l'influence de l'armée turque en tant que protectrice de la démocratie laïque. Le 22 février 2010, la justice turque a arrêté une centaine d’officiers de haut rang. Ce coup de filet sans précédent a mis un point final à la guerre que mène l'état-major laïciste contre le gouvernement islamiste du Premier ministre Recep Tayyip Erdogan depuis l'arrivée au pouvoir de celui-ci.
En septembre 2010 le gouvernement  islamiste d’Erdogan a fait passer  des amendements modifiant la Constitution de 1982. En faisant ces amendements, Erdogan a  surtout  voulu en finir avec l’héritage de Mustapha Kemal.

L’AKP a abandonné l’alliance turco-israélo-américaine contre une intégration dans une un clan pro musulman, pro palestinien et antisioniste. Le Parti d’Erdogan a amorcé un retour massif vers l'Islam, voire l'islamisme. Il  réussi à renforcer les relations  de son pays au sein du Moyen Orient, plutôt qu'avec l'Occident, notamment auprès de deux  voisins, l'Iran et la Syrie.
Le rapprochement entre la Turquie et les pays de l’axe du Mal, et les tensions dans les relations entre Ankara et Jérusalem  ont déjà provoqué des effets collatéraux préoccupants au sein de la communauté juive turque. Les Juifs de Turquie s'inquiètent des conséquences éventuelles sur leur communauté après cette  nouvelle victoire  des islamistes aux législatives en Turquie L’atmosphère est déjà  très tendue et pleine d’hostilité, et certains slogans visaient les juifs et non pas seulement l’état israélien. Plus de 10.000 Turcs ont défilé  le mois dernier le long de l'avenue Istiklal, la principale artère commerçante d'Istanbul aux cris de "Maudit soit Israël!" et "Israël, assassin!", agitant des drapeaux palestiniens et des flambeaux, pour commémorer l'assaut contre le Mavi Marmara, l'an dernier. Cette atmosphère hostile trouve confirmation dans la violence des commentaires et de l’attitude du premier ministre Erdogan, qui alimentent l’hostilité envers Israël.

Tayyip Erdogan avait levé le voile sur son changement de stratégie dès 2004 en qualifiant Israël «d’Etat terroriste» quand il avait éliminé le Cheikh Yassine. Il avait invité à Ankara en février 2006 le chef du Hamas Khaled Mashaal avec les honneurs réservés aux personnalités et enfin avait traité Shimon Pérès «d’expert en assassinat» à la conférence de Davos de janvier 2009. En Octobre 2009  le Premier ministre Erdogan a tenu des propos incendiaires, accusant Israël d’avoir « lancé des bombes au phosphore sur des enfants innocents dans la bande de Gaza ». Ce dernier a en effet porté des accusations très graves contre Tsahal, n’hésitant pas à affirmer qu’il avait commis des « crimes de guerre » pendant l’opération Plomb Durci. Erdogan a  rallumé un feu en soufflant dans tout le Moyen Orient : visite en Iran, en Syrie, soutien au Hamas et Hezbollah. En janvier 2011 le Premier ministre turc Recep Tayyip Erdogan a déclaré que son pays soutient le Hamas : «Nous soutenons le Hamas quand il à raison, parce que le mouvement Hamas est un mouvement de résistance. Le Hamas n’est pas un mouvement terroriste. Ces gens là défendent la terre. C’est un groupe politique qui a remporté les élections » à déclaré Erdogan  le 12 janvier 2011 sur Al Jazira.(…) Erdogan a aussi  exhorté Tony Blair à inclure le Hamas dans le processus de paix.

Le régime islamique turc de Erdogan a minutieusement planifié et concrétisé, en mai 2010, avec les dirigeants du mouvement terroriste palestinien Hamas, depuis la zone chypriote occupée par l’armée turque, une flottille du jihad. Neuf terroristes  avaient été tuées lors de l'opération commando israélienne contre ces militants pro-palestiniens pseudo pacifistes à bord de la première flottille pour Gaza. Dans la flottille II  en route  pour Gaza, fin juin 2011,  il y’aura aussi  un bon nombre d’extrémistes turcs membres de l’association humanitaire à tendance islamiste connue par son sigle IHH. Par cette  nouvelle opération, la Turquie veut encore assurer son leadership sous l'égide de l'idéologie panislamiste et jihadiste. D'où le soutien et le relais apporté par le gouvernement turc AKP aux relais de l'Iran dans la région : Syrie, Hezbollah, Hamas. La Turquie a voulu organiser sa nouvelle mise sous tutelle du Proche-Orient.

Selon le quotidien koweïtien as-Siyassa,  du 11 juin 2010, le Premier ministre turc, Recep Tayyip Erdogan, a adressé il y a quelques jours une invitation officielle en Turquie au secrétaire général du Hezbollah, Hassan Nasrallah. Le quotidien affirme que l'initiative du chef du gouvernement turc a été prise à la demande du président du bureau politique du Hamas, Khaled Mechaal. De même source, on indique que la visite de Nasrallah à Ankara ne serait possible que si les gardiens de la révolution iranienne assurent la protection du chef du Hezbollah durant son séjour en Turquie ainsi que durant son déplacement.

La politique turque du Premier ministre Recep Tayyip Erdogan n’est pas si étrange que ça, elle s’inscrit dans la ligne de celle de l’Iran, la Syrie dont l’objectif est de créer un bloc islamo/dominant Ces derniers mois, alors que les observateurs note une dangereuse radicalisation du gouvernement, le gouvernement d’Ankara , un haut responsable turc proche du Premier ministre Recep Tayyip Erdogan, a confirmé le 15 avril dernier  qu'une représentation diplomatique des Talibans allait bientôt être établie à Istanbul !

Tous ces éléments ne peuvent pas nous rassure des conséquences  régionales de cette victoire des islamistes  turcs  aux élections législatives alors qu’en Tunisie,  par exemple,  le mouvement  islamique d’Ennahda (Parti de la Renaissance) qui se dit proche de l'AKP, le parti islamo-conservateur turc, se frotte aussi les mains pour prendre les commandes de l’Etat le 23 octobre prochain , lors des premières élections de l'après-Ben Ali.
  
Ftouh Souhail,
Tunis le 14 mars 2011

Nota de Jean Corcos
On connait l'engagement vigoureux de Souhail Ftouh contre l'islam radical, et je comprends parfaitement que ce jeune Tunisien s'inquiète de la contagion dans son pays, alors même que les partis islamistes justifient partout leur "modération" en disant, justement, que l'AKP est leur modèle ! Sur le plan géostratégique, par ailleurs, il est clair que le grand vainqueur des élections de dimanche dernier n'est pas un ami d'Israël, et que ce ne sont pas de bonnes nouvelles pour Jérusalem.
Mais on connait aussi mon souci de rigueur et mon esprit de nuance ... et je ne peux pas ne pas compléter ce long article par quelques "bémols" :
1) A propos de la "flottille numéro deux", on vient d'apprendre que le "Mavi Marmara" ne reprendrait pas la mer, et le gouvernement turc fait tout pour éviter une nouvelle aventure.
2) A propos du rapprochement avec la Syrie, force est de constater que Erdogan a condamné les "atrocités" de la répression menée par le régime, se démarquant ainsi clairement de l'Iran qui soutient le clan Assad par tous les moyens.
3) Enfin à propos du vote des Turcs, deux remarques : tout d'abord l'AKP n'a pas obtenu la majorité des deux tiers qui lui aurait permis de modifier la Constitution ; ensuite, ce soutien populaire est aussi - et peut-être surtout - le fruit d'une excellente situation économique, à l'actif de ce parti et même s'il nous inquiète par ailleurs.