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28 février 2012

"Lavage qui rit", par Chaimae Bouazzaoui


Des destructeurs agissent pour laver les cerveaux des Tunisiens. On dirait que ces temps ont donné le sourire à des acteurs connus et /ou anonymes afin qu’ils dévient le grand chemin souhaité par les révolutionnaires.

L'ambiance devient floue en Tunisie : Ainsi ce Cheikh égyptien qui a souvent réclamé l'excision des jeunes filles, ce qui est tout à fait horrible. Après l’affaire scandaleuse des mères célibataires, l’histoire des salafistes à la faculté des lettres de la Manouba, et l’Émirat salafiste de Sejnane qui ont rempli des espaces dans la presse, une autre affaire plus importante a gagné le terrain rien que pour laver la matière grise : celle de l’excision des jeunes filles tunisiennes. Cela fait rire… mais vu plus en profondeur, cela appelle à un moment de réflexion.

Les propos controversés du prédicateur radical Wajdi Ghanim lors de sa visite en Tunisie incitant inexorablement à l’instauration de la charia et sa justification de l’excision des femmes ont déclenché un tollé dans la société civile. Certaines personnes veulent la grignoter, provoquant heureusement des réactions, notamment celles provenant d'une partie de la presse devenue enfin libre après le 13 janvier. Quoi de plus «sauvage » que de traumatiser la nature, de la choquer et de la briser. Plusieurs filles ont été malheureusement excisées suite à sa venue, selon deux professeurs d'éducation islamique. Le problème est donc à la fois déontologique et de mentalité. Ce n’est pas la religion qui est en est la cause mais c’est essentiellement la « mauvaise interprétation ».
Cette pratique n’a rien à voir avec la culture et les traditions tunisiennes. En outre une pareille mutilation ne doit pas prendre les devants par rapport au développement durable sur lequel la République devra mettre l’accent.

Le grand retard justifié par les chiffres menaçants en matière économico-sociale tire désormais la sonnette d’alarme. C’est à la presse de changer les comportements.

Combattre cette pratique, par le biais des médias, et qui porte atteinte à l'intégrité physique et psychique de la femme s’avère un projet sérieux. Comment peut-on permettre à cet énergumène de faire l'apologie de cette pratique pharaonique scandaleuse de nos jours.

Un témoin objectif constatera inéluctablement que les conséquences de la révolution ont touché énormément à la question des rapports hommes / femmes. Au lieu de focaliser les problématiques sur l’avenir du pays en matière de développement durable et de calquer la révolution sur l’évolution, certains destructeurs émergés depuis, utilisent toute leur énergie pour déséquilibrer les rapports sociaux hommes / femmes (dans le travail et le mariage), femmes / femmes (avec burqa vs sans burqa) et hommes / hommes (libéral vs religieux).

Il est temps pour agir localement sur l’esprit de l’opinion publique et surtout pour créer des pistes de réflexion en tenant compte des générations futures. Débattons !

Chaimae Bouazzoui

Nota de Jean Corcos :

J'ai le plaisir de publier ici une nouvelle tribune libre de mon amie Chaimae, jeune journaliste marocaine en stage à Tunis, et dont vous avez pu lire ici le témoignage sur les débuts de la révolution tunisienne.
A noter que son indignation traite essentiellement de ce qu'elle a lu et entendu suite aux propos de ce Cheikh intégriste, à propos de l'excision des jeunes filles. Or, et il est bien triste de le constater, la presse locale est restée muette devant les cris antisémites haineux - notamment le fameux chant "Khaybar, Khaybar, oh Juifs, l'armée de Mahomet revient", entendus sous la coupole du Palais des sports d'El Menzah, près de Tunis, alors qu'il s'adressait à une foule de plusieurs milliers de personnes.
Il existe une vidéo de ce passage, et j'en donne le lien à cette adresse

27 février 2012

Sept ans et toutes ses dents !


Formule devenue classique pour mes fidèles lecteurs : "Et voilà, ...". Et voilà venu le moment de fêter un nouvel anniversaire du blog !

L'année dernière, j'avais rebondi sur "Six ans, l'âge de raison". Un an plus tard, je m'autorise juste ce titre en forme de clin d'œil pour les sept ans, avant de faire un petit point sur ce qui a changé, ou non, depuis 2011 !

Ce qui n'a pas changé, c'est le "discours dominant" de la blogosphère juive francophone et ma volonté de m'en démarquer, non par coquetterie, non par esprit de contradiction, mais parce que ce discours traduit - et je ne suis pas le seul à le penser - un appauvrissement inquiétant de la réflexion et de la culture de son lectorat. Je vous inviterai, dans un très prochain article, à relire les publications faites ces derniers mois sous le libellé "à contre courant" : n'en disons donc pas plus aujourd'hui.

Ce qui a changé par rapport à février 2011, c'est le contexte national et international qui s'est singulièrement obscurci, pour qui s'inquiète pour la survie d'un état juif et démocratique au Moyen-Orient : prise de pouvoir légal ou rampante par les islamistes en Tunisie, en Égypte, en Libye, sans doutes ailleurs bientôt dans le monde arabe ; impression que rien ne peut arrêter le programme nucléaire iranien, et donc à moyen-terme une situation invivable pour Israël ; autisme du gouvernement de Jérusalem, qui n'arrive même pas à mettre les Palestiniens face à leurs contradictions et est présenté, donc, comme le seul responsable du blocage du processus de paix ; ceci dans un contexte où, le moins que l'on puisse dire, se préparent une série d'élections, en France, aux USA ou ailleurs, ou ce ne sont pas les exécutifs les plus pro-israéliens qui viendront aux affaires !

La situation est-elle pour autant désespérée ? Bien sûr que non, mais ce n'est pas en insultant - comme le font la plupart des blogs épinglés plus haut - tous ceux qui n'ont pas notre sensibilité juive écorchée à vif que l'on avancera les choses ! Ce que réalise, au quotidien le CRIF par ses contacts avec l'ensemble des composantes de la société françaises, j'essaie de le faire à ma très modeste échelle : d'abord dans mes émissions, qui vous font entendre les invités les plus divers, par leurs formations, origines ou opinions ; ici sur ce blog, en reprenant aussi de nombreux articles publiés par la presse nationale - qui, enfin, donne des analyses en profondeur sur ce qui se passe dans le monde arabe ; et au delà, au sein du CRIF ou ailleurs, en m'investissant de plus en plus dans des initiatives de dialogues interreligieux, afin d'empêcher l'importation du conflit dans notre République ... et ceci, bien sûr, en ne restant jamais silencieux face à la marée antisémite qui continue de monter !

Quelques informations maintenant, sur un plan pratique.

Ce blog, devenu réellement "durable" depuis 2005, continue son bonhomme de chemin avec une moyenne de 130 "hits" par jour. Il a été vu, on peut le dire, quasiment dans le monde entier avec 170 états indépendants -  du plus vaste au plus minuscule -, recensés par le logiciel "neocounter" (les petits drapeaux qui s'alignent en bas de page). Et vous avez vraiment de la lecture consistante, pour peu que vous vous donniez la peine de naviguer au moyen des libellés : 1541 articles à ce jour !
Pour qui s'intéresse au monde musulman autrement qu'au travers des prismes du conflit israélo-palestinien et de l'islam radical, vous pourrez y trouver une petite mine d'informations, sur la plupart des sujets - politique, culturel, sociétal, historique ... Et preuve, si besoin était, que le ton adopté est juste et attire l'intérêt même "en face", la Tunisie est maintenant passée au second rang pour les pays d'origine des visiteurs, avec 7 % des hits.
Bientôt j'aurai - si la santé m'est accordée, bien sûr - beaucoup plus de temps pour écrire ici, l'heure de ma retraite professionnelle arrivant dans les prochains mois : j'espère donc augmenter, sensiblement, le nombre d'articles originaux, éditoriaux personnels, analyses de l'actualité, traductions de la presse israélienne ou arabe, qui vous permettront de trouver vraiment ici ce que vous ne trouverez pas ailleurs : merci d'avance pour votre intérêt, et pour votre patience !
Enfin, et comme vous le savez, le blog est d'abord pour moi une "vitrine" permettant de faire connaitre mon émission et mes invités. Le "chapeau" apparaissant sous le titre, en haut de page, faisait vraiment poussiéreux avec sa référence à un article de 2005 pour en savoir plus sur ma série : je l'ai donc modifié, j'ai aussi repris dernièrement la présentation de ma série pour l'adapter au nouveau contexte ... et vous pourrez retrouver cette présentation, en lien permanent, juste en entrée du pavé "Invités et émissions", en colonne de droite.

Les enfants de sept ans sont peut-être aussi bavards que ceux de six ans l'année dernière : il est donc temps de prendre congé de vous, amis lecteurs ... en vous invitant juste à partager avec moi ce lancer de ballons symbolique !

J.C

26 février 2012

Obama, Netanyahou et l’Iran


Deux hauts fonctionnaires américains à Jérusalem ces jours derniers, Benyamin Netanyahou  et Ehoud Barak invités à Washington par Barak Obama. Tous signes qui indiquent les inquiétudes de la première puissance  du monde concernant le Moyen-Orient.

Obama ne veut absolument pas qu’Israël attaque l’Iran et il emploie tous les moyens pour le convaincre  de ne pas prendre l’initiative d’une conflagration dans la région. Il ne veut absolument pas être entrainé dans un nouveau conflit  en pleine  année  électorale, après les expériences pour le moins peu probantes en Irak et en Afghanistan. D’autant que l’hypothèse d’une nouvelle guerre froide se profile à l’horizon alors que la Russie entend reprendre  ou prendre un rôle majeur en Méditerranée et soutiendra jusqu’au bout dans cette optique son allié Bachar El Assad qui a mis à la disposition de ses  navires la base de Tartous lui permettant de prendre pied dans la région.

Et si son grand, son unique allié interdit cette opération, l’état Juif est obligé de se plier. Je ne vois pas le gouvernement israélien  envoyer ses avions et ses missiles sur l’Iran sans le feu vert et  le soutien des États-Unis.

Le New York Times estime qu’une telle entreprise nécessiterait une centaine d’avions  et plus de ravitailleurs en vol que n’en possède Israël  et que  les résultats sur les sites nucléaires iraniens, souvent enfouis à une grande profondeur sous terre, risquent de ne pas être évidents.
L’Union européenne étant aussi très réticente, l’hypothèse la plus vraisemblable  est une pression accrue d’Israël sur les Occidentaux pour renforcer  les sanctions contre l’Iran et la poursuite de la guerre secrète telle qu’elle est menée actuellement avec un soutien accru aux forces anti-Ahmadinejad, les actions de sabotage  et de commandos, les éliminations ciblées et la guerre informatique dans laquelle les Israéliens excellent et qui risque de faire très mal à leur ennemi. De telles opérations pourraient avoir l’aval de l’opposition  iranienne, alors qu’une attaque frontale verrait le peuple  entier soudé pour défendre sa patrie comme l’a laissé entendre le fils du dernier Shah.

Outre les réticences américaines, Il y a donc la  crainte que tel Nasser après sa défaite cinglante dans la guerre des six jours, Ahmadinejad puisse  s’en sortir  sur le plan national et le plan international, et que se renforce  au lieu d’être  détruite la main mise des  Ayatollahs sur le pays.
Ceci sans parler des nombreuses destructions et des nombreuses victimes qu’entrainerait une confrontation  entre Israël et l’Iran.

On peut alors se demander  si ces bruits de bottes que répercutent à loisir  la presse et  certaines personnalités israéliennes  ne seraient que de l’intox pour forcer à agir  maintenant un président américain qui aura les mains libres s’il est réélu en novembre prochain pour conduire à se guise sa politique moyen-orientale ?

En conclusion, je dirai comme ma grand-mère : Que Dieu rapproche le bien et éloigne le mal.

André Nahum
Judaïques FM, le 22 février 2012

24 février 2012

Sophia Aram, la beurette qui dénonce les antisémites !

Sophia Aram


Sophia Aram est une des plus percutantes des journalistes de la nouvelle génération, et ses "matinales" sur France Inter sont un peu la terreur de certains politiques, qui se sont frottés à ses questions sans langue de bois : parmi ses "victimes", citons les Le Pen (père et fille), Nadine Morano ou Jean-Luc  Melenchon.

Le Front National n'a pas du tout apprécié son comportement, et un "buzz" grotesque a été déclenché, faisant de cette fille d'immigrants marocains musulmans une ... juive ! Une rumeur qui n'est pas sans rappeler celle concernant Rachida Dati, et que j'avais traitée en son temps (lire ici).

Ci-dessous un extrait de son interview dans le journal "Les InRocks" :

"Depuis, je reçois des mails incendiaires de l'extrême droite assortis de menaces de mort qui me valent une protection policière. Lorsque je suis annoncée quelque part, les endroits sont sécurisés. Ce sont les risques du métier. Si l'on tape mon nom sur Google, on tombe en première page sur l'occurence : "Sophia Aram, juive". Avec en contenu des joyeusetés du genre : "Les Juifs se sont toujours enrichis aux dépens de leurs hôtes en les montant les uns contre les autres."Quand j'ai commencé sur France Inter, Laurent Fabius était l'invité et Patrick Cohen présentait. Sur le site d'Inter, en tête des commentaires, on trouvait :"Fabius, Cohen, Aram, le service public est tombé aux mains du lobby juif." C'est d'autant plus cocasse que je suis par mes deux parents d'origine marocaine. Mais bon, même si je ne suis pas juive, j'assume complètement vis-à-vis des crétins la judaïté qu'ils m'attribuent."

Bravo Sophia !

Pour lire l'article complet sur ce journal, aller sur ce lien.

J.C

23 février 2012

La Libye, quel avenir après 40 ans de Kadhafi ? Antoine Vitkine sera mon invité le 26 février



Nous allons rester dans le monde arabe pour l'émission de dimanche prochain, en parlant d'un pays qui a fait la "une" de l'actualité pendant une grande partie de l'année dernière, avant de la quitter en même temps que la révolution s'achevait, après une longue et sanglante guerre civile : ce pays, c'est la Libye, et pour en parler j'aurai le plaisir de recevoir le journaliste Antoine Vitkine. Antoine Vitkine est un jeune et brillant journaliste de 35 ans, diplômé de Sciences Po et en Relations Internationales, et il a prouvé son talent dans un domaine particulier, puisqu'il a déjà réalisé une quinzaine de films documentaires pour les chaînes Arte, Canal Plus, France 5, sur les sujets les plus divers. Parmi eux, "Mein Kampf, c'était écrit", et il a d'ailleurs écrit aussi sur le même sinistre sujet un ouvrage en 2009 : "Mein Kampf, histoire d'un livre", où il s'est attaqué à un tabou de nos médias en dénonçant son fantastique succès de librairie dans le monde arabe. Alors "politiquement correct", il ne l'est pas, car il a aussi dénoncé les "Nouveaux imposteurs" sur les théories du complot sur le 11 septembre, il a aussi écrit un ouvrage de politique fiction en 2006, "La tentation de la défaite" sur l'islamisme radical. J'ai choisi de l'inviter pour parler de la Libye parce qu'il avait réalisé un documentaire remarquable, tourné juste avant le soulèvement en Libye , "Kadhafi, notre meilleur ennemi" : très rares étaient ceux qui avaient fait œuvre d'historien à propos de ce dictateur fantasque, paria redevenu fréquentable, et pourtant, en voyant son film de 90 minutes on peut voir défiler plus de quarante années d'Histoire, de Pompidou à Sarkozy en passant par Mitterrand, et pourtant, il s'est passé tellement de choses en coulisses entre les Occidentaux et ce bouffon sanguinaire - et il lève un peu le voile sur ces négociations secrètes avec des interviews de Tony Blair, Condoleeza Rice, Martin Indick et plusieurs autres. Alors nous allons évoquer en première partie d'émission ce long règne de Kadhafi pour essayer de comprendre, après coup, comment il a fait pour durer si longtemps ; et puis en deuxième partie, nous parlerons de la Libye après la révolution, et de ce qu'elle peut devenir.

Parmi les questions que je poserai à Antoine Vitkine :

- Pourquoi cet intérêt pour le dictateur libyen ? 

- N'avez-vous pas été surpris par la fin, somme toute rapide, de cette dictature alors que dans une interview au journal "Le Monde", le 19 février 2011, vous disiez que Kadhafi était "une machine à survivre politiquement" ?

- Ce qui est frappant pour la première moitié du règne de Kadhafi, en gros les années 70 et 80, c'est sa radicalité qui était à la fois transparente, sans complexe et finalement assez bien tolérée par les Occidentaux, alors qu'il a hébergé tous les mouvements terroristes palestiniens, y compris Abou Nidal qui faisait des attentats en Europe. Et pourtant, il va falloir attendre 1986 et le raid aérien ordonné par Ronald Reagan contre sa résidence pour que les Américains réagissent ; et pourtant, il a fallu attendre les 270 morts de l'attentat de Lockerbie contre un Boeing de la PANAM et les 170 victimes de l'attentat contre le DC 10 d'UTA pour que la communauté internationale réagisse, et pour que la Libye subisse un embargo sévère de l'ONU, de 1992 à 1999 : comment l'expliquez-vous ? 

- Votre film documentaire apporte une révélation assez étonnante, le fait que finalement plusieurs années avant le 11 septembre et avant la création de l'A.Q.M.I il y a quelques années, Al-Qaïda était déjà présente en Libye, et affrontait durement les troupes de Kadhafi : cela apporte un éclairage intéressant, d'abord sur ses contacts avec la CIA dès les années 90, et puis sur ses propos que l'on a pris pour de la pure propagande au début de la révolution, quand il disait que les rebelles étaient de terroristes. Est-ce qu'on sait quel a été rôle des rebelles jihadistes dans les combats ?

- Christophe Ayad dans le journal "le Monde" en date du 26 janvier, se demande si la Libye sera un nouvel Irak au bord de la Méditerranée, et il énumère les analogies : des milices qui refusent de rendre leurs armes ; la montée du fondamentalisme religieux, le président du C.N.T, Moustapha Abdeljalil, ayant annoncé que la charia sera à la base de la législation libyenne et cela au lendemain de la mort du tyran ; le risque d'éclatement du pays, entre la Cyrénaïque qui s'est tout de suite révoltée, et la Tripolitaine restée plus longtemps fidèle. Mais il dit : non, la différence c'est qu'en Irak il y avait un état, omniprésent et totalitaire, alors qu'en Libye, Kadhafi avait créé une instabilité institutionnelle permanente ; les Libyens auraient donc soif maintenant d'un vrai état moderne : qu'en pensez-vous ?

Un sujet passionnant, sur un pays passé maintenant en dehors de la "une" des journaux !

J.C

21 février 2012

Connaissez-vous ce charmant pays (suite) ?


La devinette du mois
- février 2012

Nouvelle devinette, dans la série inaugurée l'année dernière : il s'agit de deviner un pays musulman d'après l'architecture, typique, de sa capitale ou d'une grande ville.

Celle-là est encore assez difficile ... oui, il s'agit bien d'un pays musulman, coupoles et minarets en atteste. Et en même temps, leur style architectural vous permettra de procéder par élimination et de trouver, au moins, la zone géographique de ce pays. Précisons juste qu'il s'agit d'une grande capitale. Comme d'habitude, mails bienvenus à l'adresse du blog : rencontre@noos.fr. Les centaines d'amis de mon réseau FaceBook pourront aussi répondre sur mon page, où je mettrai un lien. Le résultat sera donné avec la prochaine devinette, le mois prochain.

Quand à la devinette précédente, il s'agissait de ... Kaboul ! Pas facile à trouver, en fait comme je vous le disais cette photo a été prise dans un village de sa banlieue. Un pays très pauvre, montagneux, assez sauvage, et que hélas on voit assez souvent à la télévision pour parler des guerres qui n'en finissent pas depuis plus de trente ans.

J.C

20 février 2012

"Rencontre" : une présentation réactualisée de l'émission !




« Rencontre » est une émission de Judaïques FM consacrée à la connaissance du monde musulman, un dimanche sur deux de 9h30 à 10h (94.8 FM Paris, et partout dans le monde sur le site "www.judaiquesfm.com"). Elle est produite par Jean Corcos.

Cette série a commencé à être programmée en mai 1997, avec à l’origine comme principale vocation de promouvoir le dialogue judéo-musulman. Les principes suivants inspiraient, et inspirent toujours cette émission, avec le plein soutien de la direction d’antenne : donner une tribune aux intellectuels musulmans prônant l’ouverture et le dialogue ; soutien clair à la solution « deux États pour deux Peuples » pour le conflit israélo-palestinien ; promotion constante des échanges et de toute forme de coopération ; dénonciation des fanatismes et des intégrismes de tous bords, qui enferment chacun dans une image démoniaque de « l’autre » ; soutien à l’intégration des Musulmans en France, dans le respect de l’État de Droit ; dénonciation commune de toutes les formes de racismes.

Depuis le tournant des années 2000, hélas, ces principes ont été durement mis à l’épreuve lorsque la violence a repris son cours au Proche Orient, enflammant les passions, confortant le repli communautaire des uns et des autres, et servant de prétexte à la pire vague d’agressions antisémites dans notre pays depuis la Libération. L’origine maghrébine de beaucoup de responsables de ces actes et un vrai désespoir quant à l’issue de la fin du conflit ont fortement ancré, dans une partie de notre public juif, une amertume difficilement conciliable avec notre positionnement, tandis que, et leurs témoignages nous confortent, de nombreux autres ont compris notre démarche et nous font l’honneur de nous suivre - ceci, dans un contexte de périls réels pour Israël. Par un "effet miroir", compréhensible mais moralement insoutenable, les plus bruyants de notre communauté n'appréhendent maintenant l'identité musulmans que comme une menace, n'en parlent que sur le mode du dénigrement et n'hésitent pas à relayer le discours des populismes racistes, en France comme ailleurs. Mais de l'autre côté, et il faudrait être aveugle pour ne pas le voir, une propagande anti sioniste radicale s'est installée dans le paysage médiatique, confondant la critique normale de certains gouvernements avec la haine hystérique d'une nation, et au final militant pour la fin du peuple juif : c'est dire que la "ligne" de notre série est difficile à tenir !

Conscient que le prisme inter-communautés devenait trop étroit par rapport aux enjeux, conscient également que l’Histoire a basculé depuis les attentats du 11 septembre 2001 et le "Printemps Arabe" dix ans plus tard, nous avons recentré « Rencontre » sur une connaissance plus large du monde musulman, cet univers si vaste, si divers et tellement mal connu. Entre l’hagiographie d’orientalistes complaisants (et souvent marqués par l’anti-sionisme), et la caricature hostile (si facile en ces temps où l’islam radical fait les manchettes de l’actualité), il nous a semblé nécessaire de prendre du recul en faisant parler des invités de qualité, musulmans ou non, qui puissent nous aider à comprendre. Plusieurs journalistes, universitaires, écrivains, militants associatifs ou experts de référence, ont ainsi fait bénéficier notre auditoire de leur connaissance de l’islam, du monde arabe ou d’un pays particulier, en abordant tous les angles possibles, le politique, le religieux, l’historique et le sociétal. Notre série comprend également une réflexion sur les problèmes liés à l’immigration en France, sans complaisance ni dramatisation. Nous nous efforçons de toujours aborder l’actualité, hélas souvent brûlante, avec le recul nécessaire et en faisant entendre des opinions diverses - voire opposées - pour améliorer la compréhension de notre public : les seules limites que nous nous sommes fixées sont celles de la polémique et de la langue de bois. Nous avons ainsi eu des invités originaires d’une quinzaine de pays différents, et le plaisir de faire entendre sur les ondes de la fréquence juive plusieurs dizaines d’intellectuels brillants d’origine musulmane.
Nous espérons ainsi avoir contribué à rapprocher les communautés. Et nous espérons également poursuivre - et si possible encore améliorer - cette production consacrée aux problèmes peut-être les plus brûlants de ce début de Millénaire.

J.C

Nota :

On trouvera en bas de page du blog quelques références de nos invités les plus connus. On pourra aussi, en cliquant sur les couvertures de livres en colonne de droite, accéder à des présentations d'ouvrages et d'invités, donnant une idée de la grande variété de nos sujets d'émissions.

19 février 2012

Réentendre mon interview du 12 février sur le Qatar !


Vous avez été nombreux à apprécier mon émission de dimanche dernier, "Le Qatar, bon ou mauvais génie du monde arabe" : e-mails, appels téléphoniques ... beaucoup voulaient savoir comment ré entendre un podcast de cette interview de Farid Hannache, dont les propos directs et percutants ont été très appréciés.

Hélas, et comme le savent ceux qui ont la curiosité de "surfer" sur ma page "jean.corcos.free.fr" en lien, celle-ci est en panne depuis le printemps 2010, suite au départ de la station de l'un de nos techniciens. Tous les enregistrements mp3 sont conservés cependant, et j'espère bien, dès que j'en aurai le temps, trouver une solution pour cette mise à jour.

Mais dans l'attente et vu la demande, Judaïques FM a décidé de mettre en ligne mon émission du 12 février pour réécoute permanente : vous la trouverez sur ce lien.

Bonne écoute !

J.C

17 février 2012

Faurisson et Ahmadinejad, le couple infernal


Le falsificateur de l’histoire, Robert Faurisson doit pavoiser. Le 2 février 2012, il vient de recevoir des mains de Mahmoud Ahmadinejad le premier prix dit du « courage, de la résistance et de la combativité », en marge du 30e Festival International du Film de Téhéran (sic). Quels ont été les sujets évoqués lors de ces journées ? « L’hollywoodisme dans la décadence humaine » et « l’hollywoodisme et l’Holocauste » (re-sic).

Tant de délires paranoïaques et d’anti américanisme primaire ont dû satisfaire les journalistes arabes et iraniens qui ont assisté à cette clownerie et si l’on en croit la propagande du régime des Mollahs, ce festival aura été un succès.
 Autour de Faurisson, quatre rabbins antisionistes de la secte (folle) Neturei Karta étaient aussi de la partie, ainsi qu’un ancien « humoriste » du nom de Dieudonné, qui participera à cette sauterie. Le pitre de service était d’ailleurs accompagné de l’inénarrable Maria Poumier.

 Qui est Maria Poumier ?
 
 Cette universitaire est proche de Roger Garaudy. Plusieurs médias et associations lui reprochent d'être la « compagne de route des négationnistes » ou « des antisémites », comme secrétaire de rédaction de la revue À Contre-Nuit fondée par Roger Garaudy, et elle aurait été la traductrice d'Israël Shamir avec qui elle collaborera (1). Son rôle dans l'édition du Manifeste judéo-nazi -titre donné à un entretien anonyme paru dans Les Voix d'Israël, l'attribuant à Ariel Sharon- lui est également reproché. En septembre 1996, l'équipe de recherche de l'Université de Paris VIII Histoire des Antilles hispaniques, cadre de référence de María Poumier pour son activité universitaire, décide de l'écarter « de toute fonction au sein du bureau et de toute représentation de l'équipe à l'extérieur », en raison de « sa participation à la divulgation de l'ouvrage de Roger Garaudy, Les mythes fondateurs de la politique israélienne, et par conséquent à la divulgation des thèses révisionnistes ». Poumier n’arrête cependant pas de faire parler d’elle. Le 22 janvier 2009, lors du conflit entre Israël et le Hamas, elle publie un Appel des Chrétiens aux Evêques de France. Mais, ce texte transpose délibérément le « déicide » et son immense symbolique dans le conflit, rien que par son titre, un titre répugnant et délirant : « À Gaza, c’est Jésus qu’on assassine! » Le reste du texte suinte la violence et la haine d’Israël. Enfin, lors des précédentes élections européennes, Maria Poumier est candidate dans la liste antisioniste de Dieudonné.

 Proximité entre l’extrême droite française et l’Iran

La proximité de longue date des militants antisémites ou d’extrême droite avec l’Iran était encore d’actualité au printemps 2010. Seyed Mehdi Miraboutalebi, l'ancien ambassadeur de la République islamique d'Iran à Paris ne faisait lui aussi pas les choses à moitié. Mardi 13 avril 2010, « pour approfondir les relations entre les deux peuples » et « parce que les médias injectent des idées préconçues dans les opinions publiques », il s'était prêté à un jeu de questions-réponses dans un bar à vin parisien du 5e arrondissement (qui, pour l'occasion, ne servait pas d'alcool) tenu par un ex-militant du Renouveau Français (groupe pétainiste et antisémite), ex-colistier de la liste antisioniste de Dieudonné, très proche des hooligans du PSG et des ultranationalistes serbes, rapportait l’excellent Blog des droites extrêmes. Cette "causerie" était organisée par le journal Flash, le bimensuel d'une extrême droite qui se veut "altermondialiste" et dans lequel écrivent, entre autres, Christian Bouchet, Philippe Randa, Alain Soral et Alain de Benoist. Ce dernier était d'ailleurs aux côtés de l'ambassadeur. Dans la salle, se trouvaient des têtes bien connues du milieu. Marc George, ex-secrétaire général d'Egalité et Réconciliation, Jacques Bordes, nationaliste-révolutionnaire, proche de feu François Duprat et très introduit dans certains cercles du Proche-Orient, Thomas Werlet du Parti solidaire français, groupuscule "nationaliste-socialiste", Pierre Panet, ami de Dieudonné et auteur d'un texte intitulé "Faurisson, un humaniste".

 Un néonazi français : Thomas Werlet

 L’ambassadeur d’Iran a donc reçu tout ce beau monde. Arrêtons-nous un instant sur l’un d’entre eux : Thomas Werlet. Qui est-il ?
 Le 4 août 2007, des « militants » d’extrême droite agressent des enfants noirs dans le métro parisien. Après la diffusion de leurs « exploits » sur Internet, Kémi Seba l’ancien leader de la Tribu Ka -prétendant défendre les intérêts de la communauté noire- réagit sur Internet: « Si je les croise, si certains de mes frères, par hasard, les croisent, nous amoureux du nationalisme, déclarons que nous les corrigerons ». Six mois plus tard, Kemi Seba créée un mouvement, le MDI. Le MDI regroupe des militants nationalistes de tous bords. Ils sont fédérés par la haine du métissage et des Juifs. La droite socialiste -appelée dorénavant Parti solidaire français-, groupuscule néonazi, fait justement partie du MDI. Son chef s’appelle Thomas Werlet.
 Le 8 mai 2008, "la droite socialiste", organise une manifestation pour le retrait des troupes françaises d’Afghanistan. Kemi SEBA prend la parole. Dans le service d’ordre, nous retrouvons des militants connus du PSF de Thomas Werlet et des skins de Nomad 88. Ce sont les mêmes militants qui avaient agressé des enfants noirs dans le métro.
 « Le sionisme, c'est la gangrène, on l'élimine ou on crève. » « Le sionisme, c'est la gangrène, à Paris comme à Gaza, intifada. » Pour avoir diffusé ces slogans dans la ville de Courbevoie en 2009, Thomas Werlet, « garant de la grandeur de la France » et « antisioniste » comme on peut le lire sur son site Internet, comparait devant le tribunal correctionnel de Nanterre pour « provocation à la discrimination nationale, raciale, religieuse ». Car, en découvrant les affichettes portant ces inscriptions sur les lampadaires de la commune, la ville de Courbevoie avait déposé plainte en septembre 2008. Décrit comme « un personnage inquiétant » par le procureur Marie-Christine Daubigney, Thomas Werlet rejette en bloc les accusations d'antisémitisme. « Je suis un peu surpris de me retrouver devant le tribunal à cause du sionisme, qui est un concept politique », se défend cet homme de 26 ans à l'allure ordinaire, masquant sa nervosité à la barre, avec un brin d'assurance en trop, rapporte Le Parisien du 4 novembre 2009. Tout en tripotant ses mains croisées dans le dos, Thomas Werlet ne se démonte pas plus en exposant que « l'antisionisme n'est pas l'antisémitisme ». « Dire que le sionisme est un concept politique ne tient pas la route une seconde », rétorque Marie-Christine Daubigney. Le prévenu ne se démonte pas plus lorsque, tour à tour, le procureur et le président du tribunal, Olivier Fourmy, l'interrogent sur le choix et le sens du mot intifada.
 « Dans mon esprit, intifada signifie résistance. La résistance peut être passive. Ici en France, la guerre politique se fait en paroles, là-bas avec des armes et des bombes. » « Dans ces tracts, vous assimiliez le peuple juif à la gangrène, décrypte Marie-Christine Daubigney. Et vous suggérez à ceux qui croiseraient un juif sioniste de mener l'intifada. » Thomas Werlet sera... finalement relaxé à la suite de ce procès.
 Plus tard, dans un entretien qu’il accordera au site anti-impérialisme.com, Werlet exprime son aversion du sionisme (il faut entendre par là des Juifs): « La question de l’idéologie sioniste peut apparaître comme un détail lorsque l’on analyse la situation nationale ou mondiale actuelle. Mais, comme elle est la source des concepts politiques, économiques, universalistes et de conflits sociaux en tous genres… (démocratie libérale, capitalisme, brassage des populations, immigration de masse, communisme, socialisme, anarchisme, droite bourgeoise, libéraux, démocrates.. .diviser pour mieux régner), cette dernière ne peut alors plus paraître aussi insignifiante et sans importance aux yeux d’hommes et de femmes clairvoyants et compatissants envers les peuples qui luttent chaque jour contre cette doctrine dangereuse, raciste, colonialiste et meurtrière. Par conséquent, les Français doivent disposer d’une formation politique sérieuse et véritablement dissidente du système actuel et qui ne soit ni prisonnière d’un dogme religieux quelconque, ni d’une famille politique particulière. Elle doit être structurée pour mener un combat purement et exclusivement politique sans jamais remettre en question le lutte originelle du parti : « la défense de la Sainte mère Patrie et du peuple qu’elle abrite depuis des siècles ». »
Le même Thomas Werlet cosigne un article extrêmement virulent et d’un antisémitisme grossier, publié sur le site Internet du Parti national Radical de la fédération de Corse : « Nous n’avons aucune leçon à recevoir de ce peuple “sûr de lui et dominateur”, qui a plus de sang sur les mains que n’importe quelle autre communauté dans le monde : Nous n’oublions pas le rôle des commerçants juifs dans l’esclavagisme au Moyen Age, ainsi que dans la traite négrière ; nous n’oublions pas le rôle des juifs bolcheviques dans le massacre de trente millions de Russes et d’Ukrainiens après 1917. Aujourd’hui, ce sont les populations palestiniennes qui sont transformées en “chaleur et lumière” par les bombes au phosphore de l’occupant. Nous en avons ras-le-bol de cette propagande judéo-sioniste qui vise à détruire les peuples libres dans le but d’établir une dictature cosmopolite universelle. » Cet article est également cosigné par Henri De Fersan, Président du Parti Français Chrétien, le négationniste Pierre Guillaume (Éditions de la Vieille Taupe), Maurice Martinet (Président du Parti National Radical), et le blogueur antisémite fanatique Hervé Ryssen.
 Bref, ce sont ces gens que l'ambassade d'Iran aide (et finance?) 
Faurisson, l’extrême droite française et le régime des Mollahs : une vraie histoire d’amour sur fond d’antisémitisme crasse, de fascistes violents et d’un j’irai cracher sur vos tombes permanent.

Note :
1) Le lecteur regardera l’entretien qu’elle a réalisé avec Israël Shamir. Cet entretien est reproduit sur le site d’extrême-droite de Voxnr.com

Marc Knobel
Site du CRIF, 15 février 2012

14 février 2012

Henri Matisse, clin d'œil à l'Orient

Odalisque au tambourin, toile d'Henri Matisse

Une toile sur la Toile 
- février 2012 

Soyons honnête, Henri Matisse a laissé une œuvre aussi abondante que diverse, et l'Orient n'a joué qu'un rôle pratiquement négligeable dans son inspiration. Toutefois, cette biographie nous rappelle qu'il a beaucoup voyagé, en particulier en Algérie qui était une colonie à l'époque de sa longue vie, à cheval entre deux siècles (1869-1954).

Virtuose aux couleurs chatoyantes, chef de file des "fauves", il était aussi un amoureux du corps féminin qui lui inspira des nombreux tableaux de nus ... Cette odalisque est certes vêtue - à l'Orientale -, son visage est presque enfantin, mais je la trouve tout à fait charmante : et vous ?

J.C

13 février 2012

Christianisme et islam


Il est toujours périlleux de travailler sur des statistiques religieuses car elles se heurtent souvent à des problèmes de fiabilité. De ce point de vue, l'enquête réalisée par le think-tank américain Pewforum est sérieuse: elle est fondée sur une compilation de résultats issus de 2400 instituts statistiques dans le monde qui travaillent en réseau. Tout est consultable et vérifiable.
Réfléchir en ce jour de Noël - toujours pas célébré en commun par ces deux milliards de chrétiens, en raison d'une différence de calendrier chez les orthodoxes - permet de saisir le poids réel, religieux, culturel, social et politique de cette religion dans le monde.
Et peut-être de relativiser l'idée reçue et l'impression - fausse - que l'islam serait la religion définitivement dominante et conquérante dans le monde. Il ne s'agit pas de nourrir la dialectique du choc inéluctable entre ces deux civilisations mais de voir précisément où sont les vrais enjeux.

Car ces chiffres sont très éclairants sur la comparaison christianisme-islam. Il apparaît en effet que la confrontation annoncée est déjà jouée, à la défaveur du christianisme, au Proche-Orient et dans le nord de l'Afrique. Même si le développement des évangéliques protestants est remarquable en Algérie et plus souterrainement en certains pays comme l'Iran. Souvent au prix d'un héroïsme inouï puisque les lois d'État, inspirées de près ou de loin par l'islam, interdisent au prix du bannissement et de la mort la conversion au christianisme.

Confrontation en Afrique
Il apparaît aussi que cette confrontation est en partie jouée en Europe occidentale où l'islam est durablement installé, à hauteur de 6% de la population européenne, et où il devrait croître de seulement 2% dans les 20 années qui viennent (selon une autre étude publiée par ce même institut en janvier dernier). En partie jouée parce que le rapport de forces entre la civilisation d'inspiration chrétienne européenne et le mode de vie musulman est déjà nettement visible et, somme toute, assez prévisible. Il ne pourra pas remettre en cause un équilibre général établi sur une double culture, chrétienne et issue des Lumières.
En revanche, c'est en Afrique subsaharienne et en partie en Asie que cette confrontation va se produire, sur une base essentiellement démographique. Mais là, rien n'est joué, tant le dynamisme des chrétiens évangéliques n'a pas fini de réserver des surprises.

Jean-Marie Guénois
Le Figaro, 23 décembre 2011

Nota de Jean Corcos :
J'ai mis le libellé "à contre courant" pour cet article du Figaro, car en vérité la propagande anti-musulmane nous abreuve d'articles apocalyptiques, annonçant tous une grande marée islamique devant tous nous submerger tous à terme : démographie, conversions ... cette religion, tellement plus dynamique que sa concurrente chrétienne, devrait nous balayer sauf - et même si cela n'est pas écrit implicitement - "choc des civilisations", inévitable et finalement salvateur.Or, si l'islam a clairement triomphé dans certaines régions du monde, cela n'est pas le cas ailleurs, et cet article le démontre !
 

12 février 2012

Tunisie : la société civile réagit ...


Une affiche très osée appelant à une manifestation contre le niqab le 5 février ... des manifestants par milliers dans les rues de Tunis le 28 janvier, pour une "marche des libertés" ... cela ne fait pas encore assez de monde pour renverser le rapport des forces, lors des prochaines élections ; ni pour intimider les Salafistes, qui multiplient partout les provocations : mais cela montre en tout cas que la société civile réagit face au danger !

J.C

10 février 2012

Les mille et une vies de Tarak Ben Ammar

Le producteur de cinéma tunisien Tarak Ben Ammar


Introduction :
Hasard des classements sur "Google images", vous avez été des milliers à atterrir sur mon blog justement à partir de cette photo. Ce serait bien dommage de le quitter sans une visite un peu plus approfondie ; quelques mots de précisions, alors ;
- Ce blog est associé à une émission de radio (présentation sous le titre) ;
- Sa thématique est le monde musulman ; 
- Plus d'informations sur l'émission en cliquant sur les liens permanents en colonne de droite, ou sur les dizaines de photos de livres et d'invités ;
- Et en navigant à partir des autres liens ou des différents articles, vous pourrez découvrir plus de 2.000 articles.
Bon surf !
J.C


Avec "Or noir" Tarak Ben Ammar vient d'exaucer son rêve de producteur : adapté d'un roman et réalisé par Jean-Jacques Annaud, le film interroge les ambitions du monde arabe.

LA SOIF NOIRE, le roman de Hans Ruesch, aventurier, journaliste et ancien pilote de course, restait bien à l'abri dans sa sacoche. Ce n'était plus seulement un livre, mais un ouvrage rare, à conserver avec tout le soin que mérite un titre paru en 1961, épuisé en France depuis. Au point que l'observateur ne savait plus ce qui importait aux yeux de Tarak Ben Ammar, 62 ans, en le voyant arpenter, le 13 janvier, ses studios d'Hammamet, en Tunisie. L'exemplaire abîmé à force d'avoir été annoté, jauni, rafistolé ? Ou le bon déroulement du tournage d'Or noir, adaptation par Jean-Jacques Annaud du roman. Un récit d'aventure et une parabole philosophique, situé dans un pays du golfe Persique en 1930, lors de la découverte des premiers puits de pétrole ?
La veille, plusieurs quartiers d'Hammamet venaient, malgré le couvre-feu de rigueur, d'être mis à sac par un peuple tunisien excédé par des années de dictature. Le président Zine El Abidine Ben Ali s'apprêtait à prononcer un discours important à la télévision, pour tenter de mettre fin à ce que l'on croyait être de graves manifestations, pas encore la "révolution du jasmin". Mais ses mots n'ont pas suffi. Le 14 janvier, le président tunisien quitta le pays pour l'Arabie saoudite. Le "printemps arabe" était en marche. Il apparaissait alors à Tarak Ben Ammar qu'il ne pouvait y avoir de meilleur moment pour produire son film. "La question posée dans Or noir de l'utilisation du pétrole reste plus que jamais ouverte. Qu'a fait le monde arabe de cette manne ? Il s'est certes enrichi, mais a-t-il investi cet argent dans la culture, la recherche, le savoir ? Bref, dans son avenir ? Du coup, continue de s'interroger M. Ben Ammar, le pétrole a-t-il constitué une chance ou un handicap pour des populations devenues subitement riches, mais confites dans le luxe, n'envisageant leur avenir que comme un moyen de dépenser leur capital ?" Dans le cas d'une Tunisie qui s'apprêtait à changer d'époque, le producteur dressait alors le constat suivant : "Il serait temps que la corruption disparaisse du monde arabe. La Tunisie est une République, nous ne pouvons plus nous conduire comme des roitelets. Si la Tunisie bascule dans la démocratie, cela pourrait produire un effet domino."

TARAK BEN AMMAR RETRACE SA TRAJECTOIRE PROFESSIONNELLE comme si elle relevait d'un scénario hollywoodien. C'est que l'homme qui côtoie "Silvio" (Berlusconi), "Rupert" (Murdoch), le prince saoudien Al-Walid, "Mel" (Gibson), dont il a distribué, en France, La Passion du Christ et Apocalypto, à la fois producteur de cinéma, banquier d'affaires, patron - avec les frères Nabil et Ghazi Karoui et le groupe italien Mediaset - de Nessma ("la brise", en arabe), la première chaîne de télévision privée et libre du Maghreb, aime donner corps à ses récits. Or noir, par exemple, incarnerait la concrétisation d'une idée fixe. Son rêve de producteur. Porté à bout de bras des décennies durant, monté grâce à son obstination et, finalement, distribué dans le monde par deux majors hollywoodiennes, Warner et Universal. Le producteur a renouvelé son option sur le roman tous les cinq ans, toujours anxieux de voir lui échapper les droits, certain aussi que le coeur du roman - un jeune prince promis à une vie d'études se retrouvant au centre d'un conflit lié à la découverte du pétrole - serait toujours d'actualité. "Je me suis toujours dit, après avoir vu Lawrence d'Arabie, qu'il serait bien de faire, un jour, un film dont le personnage principal ne serait pas le colonel anglais incarné par Peter O'Toole, mais le prince arabe interprété par Omar Sharif. Je suis allé dans le monde entier pour trouver de l'argent, notamment auprès de financiers arabes. Mais ça ne les intéressait pas. C'était l'époque du boom économique des années 1970, lié au pétrole. Tout ce qui les intéressait était de financer des routes, des logements, d'acheter des armes, et surtout pas de faire des films ou d'investir dans la culture."

TARAK BEN AMMAR EST LE NEVEU DE HABIB BOURGUIBA, premier président de la République de Tunisie, fils du premier ambassadeur de Tunisie à Rome et en Allemagne, petit-fils du premier bâtonnier de Tunisie. "Quand je suis né, en 1949, la Tunisie n'était pas encore indépendante. Pierre Mendès France nous a donné l'indépendance. Je me souviens que Bourguiba, raconte-t-il, n'avait pas accroché de photos de ses enfants dans son bureau, mais une photo de Mendès." Quand Tarak Ben Ammar est envoyé à la fin des années 1960 à l'université de Georgetown, à Washington, l'usine des futurs dirigeants politiques, aux Etats-Unis et ailleurs, c'est pour marcher dans les pas de son père, et devenir l'un des futurs cadres du pouvoir tunisien. Mais il échappera au destin que sa famille lui assigne en choisissant la voie des saltimbanques, le monde du spectacle, le cinéma. Là où personne ne l'attend, où personne ne veut qu'il aille, surtout quand on est issu d'un pays sans réelle tradition cinématographique.
Dans les années 1970, il persuade George Lucas de venir tourner plusieurs scènes de La Guerre des étoiles en Tunisie, puis Steven Spielberg pour Les Aventuriers de l'arche perdue. Le réalisateur des Dents de la mer se montre d'abord réticent à la perspective de planter sa tente dans le Sud tunisien et, plus largement, dans un pays arabe. Qu'à cela ne tienne ! Tarak Ben Ammar prend l'avion et réussit à convaincre le cinéaste.
Tarak Ben Ammar se plaît à découper son itinéraire en chapitres qui, assemblés, racontent, selon lui, une histoire cohérente : celle d'un homme parti de son pays pour s'établir en France et qui, fort d'une compétence acquise à l'étranger, revient se déployer en Tunisie, et, au-delà, dans tout le monde arabe. Il apprend son métier dans les années 1970. Dans les années 1980, il produit La Traviata de Franco Zeffirelli et Pirates de Roman Polanski. Ce dernier sera un échec commercial cuisant, amplifié par le refus d'Universal de distribuer le film aux Etats-Unis, après s'y être engagé. Ce qui ouvrira la voie à un procès que Tarak Ben Ammar gagnera. Dans les années 1990, il fait de la télévision, en partenariat avec deux mastodontes de la télévision payante en Italie et en Allemagne - Silvio Berlusconi et Leo Kirch -, investit en France dans les industries techniques dans les années 2000.

LA DÉCENNIE 2010 SERA CELLE DE SON EXPANSION dans le monde arabe. Le générique d'Or noir se révèle, de ce point de vue, aussi riche d'enseignements que le film lui-même. Le panneau Doha Film Institute, l'institut du film de Doha, signale la part qatari de cette coproduction qui ne va pas de soi, pour un film où les impasses de l'islam intégriste sont explicitement montrées du doigt. " Le film a réussi son test lorsqu'il a été présenté, en octobre, au Festival du film de Doha-Tribeca, dans le Qatar wahhabite, se réjouit le producteur. Je craignais qu'il soit sifflé : il a été applaudi. Je voudrais inciter les pays arabes à investir dans la culture. La sortie d'Or noir en Tunisie, le 23 novembre, où un parti islamiste vient de remporter les élections, sera un autre test. "Le rôle de Tarak Ben Ammar dans la Tunisie de Ben Ali, lors du tournant qu'a constitué la " révolution du jasmin ", a fait débat. Une information publiée dans L'Express faisait état d'un engagement du producteur, avec une soixantaine d'autres personnalités, en faveur d'un nouveau mandat de Ben Ali. Une nouvelle qui donnera lieu à un vigoureux démenti. Nessma avait été, le 30 décembre 2010, le premier média tunisien à critiquer le régime. Le producteur avait reçu, dans la foulée, une mise en demeure du président tunisien qu'il a, depuis, encadrée. "Nessma est la télévision du Grand Maghreb, la plupart de nos téléspectateurs sont algériens, viennent ensuite les Tunisiens, puis trois millions de Libyens. Nous avons l'intention, prévient-il, comme toutes les chaînes de télévision en Occident, de refléter les différentes opinions de notre vie démocratique."
Nessma s'est retrouvée, une nouvelle fois, mise à l'épreuve quand, en pleine période électorale en Tunisie, les salafistes ont manifesté contre la chaîne. Voitures de ses dirigeants et maison de son directeur général ont été incendiées, en réaction à la diffusion de Persépolis, le film d'animation de la réalisatrice française d'origine iranienne, Marjane Satrapi. Une des séquences du film montre Dieu sous les traits d'un vieillard barbu. Ce qu'interdit l'islam. Le film avait beau avoir été montré dans plusieurs festivals arabes, sa diffusion, en dialecte tunisien, accessible au plus grand nombre donc, lui offrait une tout autre exposition. Qui plus est dans un contexte explosif, où le parti islamiste modéré Ennahda s'apprêtait à prendre le pouvoir. "La démocratie consiste à respecter la volonté populaire, et je n'ai pas de raison, dit-il, de remettre en question ce qu'Ennahda a déclaré pendant la campagne, où il a dénoncé cette violence. Ennahda s'est prononcé pour la démocratie et la liberté d'expression et les acquis des Tunisiens. Nessma fera en sorte de rappeler aux gouvernants leurs promesses électorales. Personne ne nous empêchera d'exporter le succès de la société civile tunisienne, avec sa tolérance pour toutes les minorités, juive et chrétienne, et de montrer au monde, et au monde arabe en particulier, qu'on peut être musulman, moderne et démocrate, comme on peut être juif ou chrétien et démocrate." Tarak Ben Ammar s'apprête à produire, en janvier 2012, en langue arabe, à Sidi Bouzid, un film consacré à Mohamed Bouazizi, l'homme qui s'est immolé par le feu le 17 décembre 2010, marquant le début de la révolution tunisienne et, au-delà, du "printemps arabe". Le producteur a pour objectif d'organiser la première du film en Tunisie, lorsque le pays aura un gouvernement élu avec un Parlement, signe alors que son pays sera entré de plain-pied dans la démocratie. A supposer qu'il y entre enfin pour de bon.

Samuel Blumenfeld,
LeMonde.fr, 25 novembre 2011

09 février 2012

Tunisie, des caricatures qui font du bien (2/2) !

Pour rappel, ce dessin - extraordinairement osé, dans un pays musulman et qui plus est maintenant gouverné par un parti islamiste - dénonce le procès qui a suivi la diffusion sur une chaîne de télévision du dessin animé "Persépolis", où la figure divine apparait sous des traits humains, ce que les intégristes considèrent comme un sacrilège vis à vis du Coran. Le patron de la chaîne tunisienne Nessma, Nabil Karoui, est poursuivi pour "atteinte aux valeurs du sacré".

J.C

07 février 2012

Tunisie : les 10 erreurs fatales d'Ennahda


Le gouvernement Hamadi Jebali, qui multiplie les bourdes, serait bien inspiré de revoir sa stratégie, ses méthodes et sa communication. Faute de quoi, il risque de jeter l’éponge avant la mise en place d’une nouvelle constitution !

Il est généralement admis que tout gouvernement nouvellement élu bénéficie d’une période de grâce de 100 jours durant laquelle les citoyens lui accordent leur préjugé favorable. Pour le gouvernement à forte prédominance «nahdhaouie» mis en place suite aux élections du 23 octobre 2011, la période de grâce tire à sa fin et il est temps d’établir un premier bilan. Disons-le d’emblée, ce bilan est négatif, pour ne pas dire désastreux !
Le manque de compétences au sein de ce gouvernement, les mauvais choix stratégiques, l’absence totale de visibilité, les déclarations intempestives inappropriées, la mauvaise gouvernance et la communication déficiente ont conduit à une très mauvaise situation économique, une accentuation du chômage et une situation d’insécurité inquiétante.
Chaque jour qui passe nous apporte son lot de scandales, de maladresses et de décisions inappropriées qui font que le citoyen tunisien perd confiance en ce gouvernement. Pire, l’image de la Tunisie est sérieusement écornée, ce qui n’est pas pour rassurer touristes et investisseurs potentiels

Plutôt que de se remettre en question, le gouvernement «nahdhaouie» tente d’imputer la responsabilité du désastre actuel «à certaines parties qui ne veulent pas du bien à la Tunisie» ! Pathétique !
Je ne vais pas pouvoir énumérer toutes les erreurs commises par ce gouvernement, tellement elles sont nombreuses ; on va se contenter de passer en revue celles qui semblent les plus graves ou qui ont suscité le plus de réactions négatives :

1) Le «6ème Califat» de Hamadi Jebali : moins d’une semaine après les élections, alors que les résultats définitifs n’étaient pas encore publiés, le Premier ministre autoproclamé a fait une déclaration incroyable aux sympathisants d’Ennahdha, affirmant qu’il avait reçu des «signaux divins» et qu’il allait instaurer le 6e califat !
Il y a lieu de signaler que même les talibans n’ont jamais osé faire une telle déclaration !

2) Souad Abderrahim et les mères célibataires : surnommée «Souad Palin», celle qui se présente comme l’égérie d’Ennahdha du fait qu’elle soit non voilée a déclaré sur les ondes d’une radio étrangère que «les mères célibataires sont une infamie en Tunisie ; éthiquement elles n’ont pas le droit d’exister» [en tant que telles, Ndlr] !
Propos fascistes que l’on pensait ne plus pouvoir entendre après la fin du nazisme !

3) Les salafistes et la Faculté des lettres de la Manouba : sans doute l’affaire qui reflète au mieux l’incompétence et la mauvaise foi de ce gouvernement !
Un groupe d’une trentaine de salafistes entreprend d’investir l’administration de la Faculté des lettres de la Manouba menaçant le doyen, les enseignants et les étudiants et empêchant la tenue des cours et des examens dans cet établissement universitaire qui compte près de 10.000 étudiants ; incroyable mais vrai ! Devant la passivité du gouvernement de Béji Caïd Essebsi, puis de celui de Hamadi Jebali, qui laissent pourrir la situation pendant 5 semaines, enseignants et étudiants se rendent au ministère de l’Enseignement pour demander au ministre, Moncef Ben Salem, issu d’Ennahdha, de trouver une solution. Ce dernier ne trouve pas mieux que d’envoyer la police pour les tabasser. Pis, une journaliste présente sur place pour couvrir la manifestation se fait violenter à son tour ! Le Syndicat national des journalistes tunisiens (Snjt) organise une manifestation pacifique pour exprimer sa solidarité avec la journaliste en question. Ennahdha, pour sa part, envoie une «milice» (on ne trouve pas d’autres mot pour qualifier ces préposés à l’intimidation de ses opposants) pour intimider les manifestants.
Entre-temps, les salafistes continuent leur sit-in à la Manouba, sans être inquiétés outre mesure !

4) Un candidat ministre essuie le véto d’un pays étranger : le Premier ministre a d’abord présenté un gouvernement pléthorique comprenant 51 ministres avant de céder à la pression populaire et ramener ce nombre à 41 ! Plus grave, le portefeuille de ministre des Finances a d’abord été attribué à Khayam Turki (Ettakatol), un expert en finance internationale dont la compétence est reconnue (chose rare dans ce gouvernement), avant de lui être retiré sous la pression d’un petit pays du Golfe : les Emirats arabes unis !
La souveraineté de la Tunisie prend un sale coup !

5) Tentative de contrôler les médias : le gouvernement Jebali a commis une grossière erreur en essayant de mettre la main sur les médias publics à travers la nomination de directeurs et de rédacteurs en chef qui lui sont inféodés. Pire, certains de ses nominés sont des anciens Zabatistes. Cette décision malencontreuse, d’un amateurisme primaire, a eu pour effet de souder les rangs des journalistes tunisiens.

6) Tentative de contrôle de la Banque centrale de Tunisie (Bct) : Après une première tentative ratée de mettre la main sur la Bct à travers une loi que voulait faire passer Ennahdha à l’Assemblée constituante, le gouvernement revient à la charge, indirectement, en envoyant des éléments proches d’Ennahdha, organiser une manifestation à la Bct, pour réclamer le départ de son gouverneur. Un scandale dont ce gouvernement pouvait se passer.
Parenthèse : Ennanhdha a pris la fâcheuse habitude d’envoyer ses hommes pour tenter d’imposer sa loi. Elle l’a fait contre les journalistes, le gouverneur de la Bct, le gouverneur de Kebili, devant le ministère de l’Intérieur, des intellectuels... Bref, la méthode d’un Rcd-bis !

7) L’Emirat salafiste de Sejnane : cette affaire gravissime, qui paraît relever du surréalisme, a gravement terni l’image de la Tunisie à l’échelle internationale. Un journal de la place a révélé l’histoire incroyable de la création d’un véritable émirat salafiste dans la petite ville de Sejnane ; les habitants de cette ville se trouvant à la merci d’un groupe extrémiste qui fait régner la terreur, à travers des actes de torture sur de paisibles citoyens. Un Etat dans l’Etat ! L’affaire a été largement répercutée à travers les chaînes de télévision tunisiennes et étrangères. 

8) Le chef du Hamas et les cris de haine à l’aéroport : le parti Ennahdha a commis l’énorme bourde d’inviter (en son nom ou bien en celui du gouvernement, on n’en sait rien) le chef du Hamas, prenant le risque de froisser les autorités palestiniennes légitimes. Pire, lors de l’accueil triomphal qui lui a été réservé à l’aéroport Tunis-Carthage, des cris de haine d’une extrême gravité ont été lancés par une horde d’énergumènes excités. C’en est fini de l’image d’une Tunisie tolérante !

9) La libération anticipée d’un pédophile : lors de la célébration du 1er anniversaire de la révolution du 14 janvier, un certain nombre de détenus ont bénéficié d’une amnistie, parmi eux se trouve un pédophile qui n’est autre que le frère du ministre de la Justice ! Pour un parti qui parle d’éthique et de morale, c’est vraiment la chose à ne pas faire !

10) Un appel au meurtre en direct : lors d’une séance de travail de l’Assemblée constituante, en présence du Premier ministre et retransmise en direct à la télévision, un des hauts responsables d’Ennahdha n’a pas trouvé mieux que de lancer un appel à la violence ! Evoquant les sit-inneurs et les manifestants qui réclament leurs droits, il n’a pas trouvé mieux que de citer un verset du Coran qui menace ces derniers, à travers un langage imagé, de couper leurs mains et leurs jambes et de les faire disparaitre de la surface de la terre. Le tyran Ben Ali paraît être un enfant de chœur.
En définitive, ce gouvernement est appelé à faire une révolution de palais et revoir de fond en comble sa stratégie, ses méthodes et sa communication. Faute de quoi il risque de devoir jeter l’éponge avant même la mise en place d’une nouvelle constitution !

Moez Ben Salem
Kapitalis, 26 janvier 2012